4 $

4$
No 168 Octobre 2014
S.V.P. n’achetez qu’au camelot portant une carte d’identification.
2 $ sur le prix de vente va directement au camelot.
Le magazine de rue de Québec
• Dix questions à
Normand Baillargeon
• Lettre à mes amis
cyniques
• Esprit critique en herbe
• Un système d’alarme
• La terre est plate
Découvrez mon histoire à
centraide-quebec.com
Concept : Publicis Montréal
Photographie : Shayne Laverdière
Maison de production : La Cavalerie
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2014-09-16 10:36
LA
ème
13
NUIT
DES
SANSABRI
PERSONNE N’EST
À L’ABRI
RELEVEZ LE DÉFI 18/2
VENDREDI LE
17 OCTOBRE 2014
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Québec, Québec
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Télécopieur : 418 529-4223
Ligne sans frais : 1-877-823-2067
Courriel : [email protected]
SOMMAIRE
POUR LE
PLAISIR
DE LIRE
DOSSIER
PENSÉE
C R I T I Q U E
22
La cage de verre
23
Le coffre à gants
Faire confiance à
John Travolta ?
24
Qui ?
25
Soudain le vent
Lettre à mes amis
cyniques
26
Crème de carême
29
« Quand il faisait bon être sans-abri »
06/07 Dix questions à
Normand Baillargeon
09
10
12
Inclusion plutôt
qu'intégration
13
Esprit critique
en herbe
Pas trop tôt pour
apprendre
JEUX
15
Un système d'alarme
20
Le jeu de La Quête
16
La permaculture
21
17
Penser la technique
La langue dans
sa poche
18
La terre est plate
14
Illustration: Danièle Rouleau
CHRONIQUES
11
28
OCTOBRE 2014
On ne pense pas avec
ses tripes !
Le graffiti et
les moutons
Le gros, le grand
et le petit
LA QUÊTE
Crédit: Jacques Nadeau
08
03
PAGE COUVERTURE
Illustration : Danièle Rouleau
[email protected]
RÉALISER L’ESPOIR
Conception graphique : Karyne Ouellet
Camelots recherchés
L’Archipel d’Entraide, organisme à but non lucratif, vient en aide à des personnes qui, à un moment
donné
Hey
toi! de leur existence, sont exclues du marché du travail ou vivent en marge de la société. Ces laissés
Tu
as 18compte
ans ou plus.
pour
cumulent différentes problématiques : santé mentale, itinérance, toxicomanie, pauvreté,
Tu
veux
te faire
quelques
dollars?
etc.
Dans
la foulée
des
moyens mis en place pour améliorer le sort des plus défavorisés, l’Archipel
d’Entraide lance, en 1995, le magazine de rue La Quête. Par définition, un journal de rue est destiné
Travaille à ton compte. Pas d’horaire.
à la vente
- sur de
la rue
rue !par des personnes en difficulté, notamment des sans-abri. La Quête permet
Vends
le magazine
La Quête
ainsi aux camelots de reprendre confiance en leurs capacités, de réaliser qu’à titre de travailleurs
Pour
plus d’informations
autonomes
ils peuvent assumer des responsabilités, améliorer leur quotidien, socialiser, bref,
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au certain pouvoir sur leur vie.
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L’Archipel d’Entraide, composée d’une équipe d’intervenants expérimentés, offre également des
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Toutes les éditions précédentes de La Quête : laquetejournal.blogspot.ca
UNE TRIBUNE POUR TOUS
Envie de faire connaître votre opinion, de partager vos poésies, de témoigner de votre vécu. Nos pages
vous sont grandes ouvertes. Envoyez-nous vos textes par courriel, par la poste ou même, venez nous
les dicter directement à nos bureaux.
Faites-nous parvenir votre texte (500 mots maximum) avant le 1er du mois pour parution dans
l’édition suivante. La thématique de novembre : Passionnés.
FAIRE DES SOUS
EN DEVENANT CAMELOTS
Les camelots récoltent 2 $ de profit sur chaque exemplaire vendu. Autonomes, ils travaillent selon leur
propre horaire et dans leur quartier.
Pour plus d’informations,
communiquez avec Francine Chatigny
au 418 649-9145 poste 31
Nous vous encourageons fortement à acheter La Quête directement à un
camelot. Toutefois, si aucun d’eux ne dessert votre quartier, vous pouvez vous
abonner et ainsi nous aider à maintenir la publication de l’unique magazine de
rue de Québec.
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Tu as 18 ans ou plus.
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190, rue St-Joseph Est (coin Caron)
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04
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75$
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Téléphone:
La Quête est appuyée financièrement par :
Stratégie des partenariats
de lutte contre l’itinérance
(SPLI)
ÉDITEUR PARRAIN
Claude Cossette
COORDONNATRICE
Francine Chatigny
CONSEILLÈRE À L’ÉDITION
Martine Corrivault
RÉDACTRICE EN CHEF
Valérie Gaudreau
RÉDACTRICE EN CHEF ADJOINTE
Isabelle Noël
CHRONIQUEURS
Martine Corrivault, Claude Cossette,
Mathieu Meunier
Depuis sa création, La Quête a redonné l’espoir à quelques centaines de camelots.
SUIVEZ-NOUS SUR
ÉDITEUR
Archipel d'Entraide
JOURNALISTES
Véronik Desrochers, Thomas Duchaine,
Valérie Gaudreau, Mathieu Massé, Isabelle Noël,
Jean-Michel Poirier, Éric Suarez,
Rémy-Paulin Twahirwa
AUTEURS
Kévin Besnard, Philippe Bouchard,
Jean-Pierre Colzon, Jean-Pierre Drolet,
Laurence Ducos, François Gagnon,
Mélanie Picard, Jacques Pruneau,
Bernard St-Onge, Christiane Voyer
AUTEURS DES JEUX
Hélène Huot, Jacques Carl Morin, Ginette Pépin
RÉVISEURES
Véronik Desrochers, Geneviève Loiselle,
Nathalie Thériault
CORRECTRICE D'ÉPREUVES
Véronik Desrochers
PHOTOGRAPHE
Camille Amélie Koziej-Lévesque
INFOGRAPHISTE
Karyne Ouellet
IMPRIMEUR
Les Impressions STAMPA inc.
418-681-0284
COPYLEFT
La Quête, Québec, Canada, 2014
Ce document est mis à votre disposition sous un
droit d’auteur Creative Commons « Paternité - Pas
d'Utilisation commerciale - Pas de Modification 2.5
– Canada » qui, si ce n’est pas commercial, permet
de l’utiliser et de le diffuser tout en protégeant
l’intégralité de l’original et en mentionnant le nom
des auteurs.
Journal La Quête
190, rue St-Joseph est
Québec (Québec) G1K 3A7
Téléphone : 649-9145
Télécopieur : 649-7770
Courriel : [email protected]
Nous reconnaissons l’appui financier du gouvernement du Canada
par l’entremise du Fonds du Canada pour les périodiques, qui relève
de Patrimoine canadien
LA QUÊTE
OCTOBRE 2014
MOT DE LA DIRECTRICE
LA QUÊTE PASSE À 4 $
de production (impression et montage).
Nous nous retrouvons dans la situation
que plus le tirage augmente plus il faut
augmenter les autres sources de revenus
(subvention, don, publicité). Cette situation n’est plus tenable avec la perspective
de la fin de la subvention fédérale liée à la
Stratégie des partenariats de lutte contre
l’itinérance (SPLI).
NOUVELLE RÉPARTITION
L’augmentation du coût du magazine
dans la rue ainsi que celui des abonnements sont devenus incontournables.
Avec la hausse, la nouvelle répartition
pour le magazine vendu dans la rue s’établit comme suit : 2 $ au camelot, 0,28 $ en
TPS/TVH et 1,72 $ pour payer l’impression et le montage du magazine.
Photo: Ginet Dombrowski
Nous espérons sincèrement que vous
continuerez de soutenir les camelots et
toute l’équipe de La Quête. Pour notre
part, nous nous engageons à faire tout ce
qu’il faut pour préserver sa mission.
La Quête fêtera son 20 anniversaire à
l’été 2015. Malgré ces réjouissances, l’année 2015 sera aussi synonyme d’un grand
défi pour le magazine avec la perspective
de la fin de la subvention fédérale liée
à la Stratégie des partenariats de lutte
contre l’itinérance (SPLI), en mars 2015.
La Quête ne cadre plus avec les nouveaux
objectifs de ce programme, maintenant
tous orientés sur le logement d’abord.
e
Pour notre part, nous croyons fermement que La Quête a fait ses preuves.
Elle est utile pour la clientèle itinérante
ou en situation d’instabilité résidentielle
comme alternative à la mendicité. De
plus, elle contribue de façon magnifique
à la création de liens sociaux au sein de
notre communauté. Afin de préserver
cet outil de réinsertion et de communication, l’Archipel d’Entraide prend certaines mesures. L’une de celles-ci est
l’augmentation du prix du magazine à
4 $ à compter du numéro d’octobre 2014.
Permettez-nous de vous expliquer ce qui
justifie cette hausse.
OCTOBRE 2014
RETOUR EN ARRIÈRE
La Quête s’est vendue 1 $ dans la rue
au cours de ses deux premières années
d’existence, soit en 1995 et en 1996 (0,50 $
allant au camelot et 0,50 $ à l’organisme).
Par la suite, pendant 15 ans, de 1997 à
2012, La Quête s’est vendue 2 $ dans la rue
(1 $ au camelot et 1 $ à l’organisme). En
juin 2012, le prix du magazine est passé
à 3 $ (2 $ au camelot et 1 $ à l’organisme).
Notons au passage que la hausse du revenu des camelots a contribué à multiplier
leur nombre et a entraîné une augmentation du tirage.
Pendant 17 ans, de 1997 à 2014, l’Archipel
d'Entraide, éditeur de La Quête a, en principe, récolté 1 $ par numéro vendu pour
se financer. Toutefois, ce n’est pas tout à
fait juste, car au cours des six dernières
années les ventes de La Quête ont atteint le seuil imposé par la loi pour payer
la taxe de vente. C’est ainsi que depuis
2008, l’organisme assume la TPS/TVH. Il
reste donc 0,86 $ par numéro vendu, une
somme insuffisante pour payer les coûts
LA QUÊTE
DIANE MORIN
DIRECTRICE GÉNÉRALE
ARCHIPEL D’ENTRAIDE
ÉDITEUR DE LA QUÊTE
PENSÉE CRITIQUE
Vous en aurez plus que pour votre argent
dans cette édition de La Quête ! La thématique pensée critique a littéralement
enflammé les journalistes et chroniqueurs
du magazine de rue de Québec. De la
rencontre avec Normand Baillargeon,
le grand gourou de la pensée critique
au Québec, à la réflexion très profonde
qu'a provoquée l'incursion dans l'univers
de Claude Gauvreau, en passant par la
découverte d'IdAction, un organisme
qui « pratique » la pensée critique avec
les marginalisés, ou la permaculture, un
mode de vie qui remet en question tous
les aspects contemporains du quotidien,
vous aurez de quoi réfléchir pendant un
bon bout de temps! Quant à elle, la section Pour le plaisir de lire réunit des textes
littéraires de grande qualité. À déguster
avec un bon café !
Bonne lecture,
FRANCINE CHATIGNY
05
DIX QUESTIONS À NORMAND BAILLARGEON
Crédit: Marie Santerre-Baillargeon
Fervent ambassadeur de la pensée critique et de l’éducation au Québec, Normand Baillargeon
consacre sa vie à enseigner à ses lecteurs, auditeurs et étudiants comment discerner le vrai du faux.
Passé maître dans l’art de débusquer les manipulations et tromperies dans les divers messages qui
nous submergent, l’auteur du Petit cours d’autodéfense intellectuelle nous propose des outils pour
affûter notre jugement.
Normand Baillargeon
LA QUÊTE : D’abord, qu’est-ce que la pensée critique ?
NORMAND BAILLARGEON : Il s’agit d’être critique de
tout, de refuser les idées préconçues, et ne rien accepter. Il faut
cependant la différencier de la critique négative : il ne s’agit pas
d’être baveux, ni pointilleux. Je le vois plutôt comme le fait de
passer au crible les idées, et de retenir celles qui ont de l’allure.
C’est de faire l’effort d’essayer de trier les idées proposées pour
distinguer le vrai du faux.
J’aime beaucoup l’expression anglaise : appropriately moved by
good reason. Pour moi, ça explique bien ce qu’est l’esprit critique : c’est de bien réagir devant un bon argument, et de changer son point de vue lorsque les faits avancés le réclament. C’est
tout le contraire du dogmatisme, en fait.
LQ : Qu’est-ce qui distingue la pensée critique du simple
chialage ?
NB : C’est simple : le chialage est le contraire de la pensée
critique. Un penseur critique qui se fait soumettre de bons
arguments change sa position.
Premièrement, il faut connaître les principes de pensée critique, afin de savoir repérer des mauvais raisonnements et les
sophismes.*
On doit donc s’habituer à repérer les arguments solides. Mais
on ne peut pas avoir une pensée critique sur un sujet qu’on ne
connaît pas, d’où l’importance des connaissances générales et de
la nécessité de les développer.
La deuxième avenue à explorer pour développer son esprit
critique est simplement de ne pas rester seul! Échanger, débattre
et discuter sont d’excellents moyens de l’affûter.
LQ : Pourrait-on, par exemple, le développer à l’école ?
NB : Oui. Certains cours de philosophie se donnent aux enfants
pour développer des penseurs critiques : il s’agit d’un ensemble
de stratégies pour amener les enfants à savoir argumenter et
discuter.
LQ : Selon vous, peut-on développer son esprit critique ?
LQ : Croyez-vous en l'impact de vos livres tels que Le petit cours
d'autodéfense intellectuelle? Avez-vous l'impression de contribuer au débat public et à faire de vos lecteurs des gens dotés
d'un esprit critique plus aiguisé ?
NB : Bien sûr ! Pour se faire, on peut explorer deux grandes
avenues :
NB : J’essaie ! Quand on fait des livres, ils circulent, on rencontre
des lecteurs, et c’est formidable. C’est le cas du Petit cours d’auto-
06
LA QUÊTE
OCTOBRE 2014
défense intellectuelle, qui a été traduit en dix langues. Cependant,
après avoir été publié, le livre ne nous appartient plus, et on ne
sait pas comment il va être lu et perçu.
LQ : Donc, quel serait le plus beau compliment qu'on puisse
vous faire ?
NB : [Rires] Que je ne suis pas dogmatique*. Je suis toujours
prêt à changer d’idée !
LQ : Y a-t-il des sujets ou domaines où vous estimez que les
Québécois manquent d'esprit critique?
NB : Beaucoup, et je m’inclus là-dedans! Collectivement, il y a
une certaine ignorance de la population. Beaucoup de gens sont
très peu capables en sciences et en mathématiques. Pourtant, la
maîtrise de ces matières est indispensable au point de vue de
l’esprit critique. Les gens se renseignent uniquement en lisant
un journal et, au final, en savent peu sur le fonctionnement réel
du monde.
De plus, au Québec, 49 % de la population est analphabète fonctionnel, c’est-à-dire que près d’une personne sur deux a du mal
à lire un texte simple, à en saisir le sens. Selon moi, si t’as pas
envie de pleurer quand t’entends ça, rien ne te fait pleurer !
LQ : Concernant l’actualité, qu'est-ce qui vous frappe, vous
pousse à vous interroger, vous indigne ou vous fait réfléchir ces
temps-ci ?
NB : On devrait tous être catastrophés par le réchauffement
climatique. Les gens ne sont pas au courant, mais le Canada est
le chef de file dans le domaine, avec les sables bitumineux.
LQ : Qu’est-ce qui vous réjouit dans l’actualité dernièrement ?
NB : De voir que les gens réagissent et se battent. Les étudiants
l’ont fait, et maintenant ce sont les employés municipaux, et ça
a fonctionné : le gouvernement revient sur des ententes pour les
régimes de retraite.
LQ : Quels sont vos prochains projets ?
NB : Je publierai à titre d’auteur deux livres cet automne : Une
histoire philosophique de la pédagogie [Poètes de Brousse], et
Chronique des années molles [Léméac], lequel est une sélection
de textes publiés depuis un an ou deux sur tous les sujets qui
m’intéressent.
BIO
Normand Baillargeon porte de nombreux chapeaux : philosophe, essayiste, pédagogue, chroniqueur, écrivain, sceptique…
et il les porte autant à la radio à Dessine-moi un dimanche à
Radio-Canada, que jadis à Bazzo.Tv, ou en tant qu’auteur.
Professeur en sciences de l’éducation à l’UQAM, il explique
l'anarchisme, a interviewé Noam Chomsky, vulgarise des
concepts intimidants. Les sujets qui l’intéressent sont nombreux : le hockey avec La vraie dureté du mental, la musique
avec Quand Platon écoute les Beatles sur son iPod, l'humour avec
Je pense donc je ris. Il s'attaque à la réforme pédagogique du
système éducatif québécois, et il plaide pour une université
publique avec Je ne suis pas une PME.
*Lexique du penseur critique
Dogmatisme : le dogmatisme est une pensée ou une attitude qui
se fonde sur un dogme, une opinion jugée comme une vérité
indiscutable, et qui rejette catégoriquement la critique ou le
doute.
Sophisme : un sophisme est un raisonnement qui semble rigoureux, mais qui est invalide au sens de la logique. Il est volontairement utilisé afin de tromper un auditoire. Par exemple, la phrase
suivante semble irréfutable, mais est illogique : « Tout ce qui est
rare est cher, un cheval bon marché est rare, donc un cheval bon
marché est cher ».
Par contre, c’est désolant de voir que la propagande là-dessus est
tellement forte que les gens en viennent à croire que l’ennemi,
c’est le voisin pompier qui se bat pour sa retraite, ou l’étudiant
pour ses frais de scolarité…
ISABELLE NOËL
Note pour Karyne : Mettre cette pub le plus petit possible. Tu peux jouer avec les éléments si tu veux.
La Quête est
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La Quête est diffusée par téléphone via
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OCTOBRE 2014
LA QUÊTE
07
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ETTE
COSS
ON NE PENSE PAS AVEC
SES TRIPES !
Non, on ne pense pas avec ses tripes : on pense avec sa tête. C’est
toute la distance entre l’affectif et la raison qui est soulignée ici.
Le cœur, les tripes, ça sert à tisser des liens entre les humains,
à stimuler la compassion, et éventuellement à sombrer dans
l’irrationnel. La tête, la raison, la pensée critique, ça permet de
résoudre les problèmes de la vie, de régler les désaccords qui
surviennent entre humains, de spéculer sur n’importe quoi avec
le danger de s’enliser dans la sécheresse du cœur.
LE DOMAINE DU CŒUR
L’affectif est la partie de la psyché qui permet d’entrer en
relation avec les autres. L’exemple le plus fort est sans doute le
sentiment qu’un parent ressent pour son enfant. L’affectif pousse
à passer du temps avec les personnes que l’on aime, à les soigner,
à les protéger, voire à les défendre au risque de sa propre vie.
L’affectif englobe sentiments et émotions. Le sentiment est un
état constant comme la haine, l’amour, etc.; l’émotion est une
réaction que l’on éprouve en réponse aux afflux biochimiques
de notre corps (nous rougissons) et aux expériences que nous
vivons (nous nous fâchons devant un affront).
Aujourd’hui, beaucoup de personnes carburent aux émotions.
Il est fréquent de voir des milliers de personnes se joindre à une
folie Internet, genre Ice Bucket Challenge (versement d’eau glacée sur la tête) ou par pitié, donner des sous pour une cause dont
ils ne savent rien — ou autres folies déclenchées par l’émotion
du moment.
D’autres individus entretiennent des sentiments erronés et
persistants, faute du raisonnement qui leur permettrait de voir
plus clair ou au moins, de mettre de l’eau dans leur vin : pensons
à ces personnes démolies par leur amour aveugle pour un goujat ou étouffées par une haine irrationnelle envers l’étranger, le
Noir, l’Arabe.
La foi est également un domaine où un affectif frisant l’irraisonnable se déploie avec autant d’effets néfastes que bénéfiques.
Pensons à tous ces « fondamentalistes » qui s’activent les uns
contre les autres : ces chrétiens pro-vie qui sont prêts à tuer les
médecins avorteurs, ces fous d'Allah qui se font sauter pour emporter la vie de quelques incroyants.
Le chrétien et scientifique Blaise Pascal avait compris la force
des émotions quand, il y a 300 ans, il disait : « Tout notre raisonnement se réduit à céder au sentiment ». Effectivement, la
recherche a montré que devant une situation où une personne
hésite entre son cœur et sa raison, elle choisira la plupart du
temps son cœur.
08
E
CLAUD
LA FORCE DE LA RAISON
La déraison continue à notre époque qui est pourtant est réputée scientifique. On peut citer l’engouement pour des médecines
dont l’efficacité n’a jamais été démontrée comme l’homéopathie, qui utilise des granules dans lesquelles il n’y a aucune molécule active, les pseudosciences comme l’astrologie qui prétend
prévoir votre avenir… ou, comme peut-être la psychanalyse.
Si ces « croyances » persistent, c’est que les émotions nous
travaillent au corps malgré nous, alors que le raisonnement exige
un effort. Or, les immenses progrès réalisés par la science en
santé aussi bien qu’en technologie n’ont été possibles que grâce
à la capacité de quelques personnes à exercer leur jugement
critique, à se distancier de la croyance populaire.
C’est heureux qu’il y ait eu ces personnes capables de raisonner convenablement pour opposer une contrepartie à ceux qui
ne pensent qu’avec leurs tripes ! Sans appui sur la raison ne seraient pas apparus ce Copernic qui comprit que c’est la terre qui
tourne autour du soleil ; ce Descartes qui a répandu l’idée de
douter systématiquement ; ce Léonard de Vinci qui pratiquait
la dissection de cadavres malgré l’interdiction de l’Église ou ce
Lavoisier qui identifia le rôle des éléments chimiques, tuant
ainsi l’alchimie. Tous ces gens pensaient avec leur tête et de
manière critique.
Penser de manière critique, cela veut dire penser avec discernement. La pensée critique permet d’atteindre la vérité objective :
on y arrive par l’analyse, le doute, le discernement, l’évaluation
et le jugement. Cela exige de ne pas tout avaler comme vérité,
mais de se faire sa propre opinion après avoir vérifié les sources,
voire mis en contradiction les opinions des spécialistes mêmes.
Encore faut-il raisonner de manière correcte, sans se laisser charmer ou berner ni par les beaux parleurs, ni par les personnages
importants, ni par les sarraus des scientifiques, ni par ceux qui
parlent au nom de Dieu. On peut y arriver de deux manières : en
raisonnant selon les règles de la logique ou en observant minutieusement (voire en expérimentant). Et en fouillant, en décortiquant les sources sérieuses.
On pense avec sa tête, ce qui n’empêche pas d’être éveillé par des
intuitions. Le grand rationnel qu’était Descartes l’admettait : « Il
n’y a pas d’autres voies qui s’offrent aux hommes, pour arriver à
une connaissance certaine de la vérité : que l’intuition évidente
et la déduction nécessaire. » J’insiste sur le dernier point : l’intuition est sans doute utile, mais la déduction (expressément
rationnelle) est nécessaire.
LA QUÊTE
CLAUDE COSSETTE
PUBLICITAIRE & PROFESSEUR
OCTOBRE 2014
SANTÉ
FAIRE CONFIANCE À JOHN TRAVOLTA ?
La grippe s’attrape en sortant au froid la tête découverte, les vaccins causent l’autisme et le lait est
dangereux pour l’humain… Vraiment ? La santé est un sujet sensible pour bien des Québécois, ce qui
les pousse à croire une multitude d’études aux résultats partiels, quand elles ne sont pas tout simplement fausses. Alors que nous sommes bombardés par toutes ces croyances, il est important de savoir
différencier les prétentions des faits scientifiques avérés.
Or, devant les nombreux résultats d’études qui essaiment un peu partout dans les
médias, sur Internet — et même du beaufrère, il devient difficile de s’y retrouver.
Dans sa pratique, Olivier Bernard passe
beaucoup de temps à répondre aux inquiétudes de ses clients et à rectifier le
tir. « Au moins les deux tiers des questions qui me sont posées sont des mythes
médicaux. » Il suggère donc quelques
conseils pour mieux s’y retrouver dans
cette jungle d’études scientifiques et
éviter les pièges de la pseudoscience, cette
forme de raisonnement qui prend l’apparence de la science sans en respecter les
principes.
Lorsque l’on est confronté à une affirmation aux allures scientifiques, il est important d’être très critique. « Il faut poser le
plus de questions possible », dit M. Bernard. « Souvent, la personne qui affirme
quelque chose sans fondement scientifique derrière se rendra vite compte des
trous dans son argumentaire et on s’aperçoit rapidement que son argumentaire
ne tient tout simplement pas la route »,
poursuit-il.
Il faut ensuite établir la crédibilité de la
source. « Il faut savoir qui fait ces affirmations. Est-ce que la personne est une
experte ou s’agit-il de la coiffeuse ? On
ne se pose pas assez souvent cette question-là, pourtant, elle est fondamentale »,
déplore M. Bernard. « Sur le blogue culinaire Trois fois par jour, on mentionnait
que consommer du citron aidait à rééquilibrer le pH du corps. D’où vient cette
affirmation-là ? L’auteure est-elle crédible
pour parler de l’équilibre acido-basique
du corps humain ? », illustre-t-il.
OCTOBRE 2014
Enfin, Olivier Bernard suggère de faire
appel à une personne compétente qui
possède les connaissances pour discerner
le vrai du faux.
LE CAS DE LA VACCINATION
Évidemment, la controverse autour des
bienfaits de la vaccination impose un
tel raisonnement pour discerner le vrai
du faux. En 1998, le Dr Andrew Wakefield a signé une étude dont la principale
conclusion établissait un lien entre la vac-
gens quant à l’innocuité et la nécessité
des vaccins, a transformé la crainte de la
vaccination en une crainte d’un véritable
complot. « À la pharmacie, j’ai entendu
des gens parler d’un complot mondial
étouffé par l’industrie pharmaceutique
et l’Organisation mondiale de la Santé. »
Cette controverse, qui dépasse maintenant le milieu scientifique, a été reprise
par de nombreuses vedettes américaines,
comme John Travolta et Jenny McCarthy,
Photos: Archives Web
Mais d’abord, qu’entend-on par fait
scientifique ? Un fait scientifique est
« un fait démontré clairement par des
études bien construites et accepté par un
consensus scientifique », explique Olivier
Bernard, pharmacien et auteur du blogue
de vulgarisation scientifique Le Pharmachien. Les données brutes sont ensuite
interprétées par des spécialistes du domaine, et les résultats entérinés par des
associations de professionnels.
cination et l’autisme. Rapidement contestée, car d’autres chercheurs n’arrivaient
pas à reproduire ses résultats, son étude
a été jugée frauduleuse, et une enquête de
2004 a révélé des conflits d’intérêts financiers de la part du Dr Wakefield.
Pourtant, malgré les preuves discréditant les conclusions du Dr Wakefield,
un important mouvement anti-vaccination s’est développé. « On aime parler des choses qui choquent et, malheureusement, quand on se ravise, ça
fait beaucoup moins de bruit », précise
M. Bernard. D’ailleurs, ce mouvement
est plutôt récent. « Quand j’ai commencé à pratiquer, il y a 10 ans, presque personne ne remettait en cause les bienfaits
des vaccins. Maintenant, c’est une grande
portion de la clientèle qui se pose cette
question-là », ajoute M. Bernard.
ce qui rend la tâche plus difficile pour les
professionnels de la santé et contribue à
maintenir l’image négative de la vaccination. « Et ça fait l’affaire de groupuscules
et de lobbys qui profitent de ce faux débat », poursuit Olivier Bernard.
JEAN-MICHEL POIRIER
[email protected]
Olivier Bernard ajoute que le discrédit de l’étude, plutôt que de rassurer les
LA QUÊTE
09
LETTRE À MES AMIS CYNIQUES :
SE RAPPELER GAUVREAU !
Les chances sont minces,
car le cynisme, dans le sens
contemporain du terme,
finit par conduire au refus
de participer à la vie sociale. « Le cynique reste sur
son quant-à-soi, puisque
c’est son seul refuge contre
les aberrations d’un système qui l’écrase
de ses conventions et contre l’attitude
de ceux qui se contentent au pire d’y
acquiescer, au mieux de le contester »,
écrit Isabelle Fortier dans son ouvrage Du
scepticisme au cynisme.
Je mélange ici cynisme et Refus global
dans une sauce un peu improvisée je l’admets, car deux phénomènes se synchronisent dans mon existence et semblent
se faire écho : un nombre grandissant
d’amis qui sombrent dans le cynisme, et
la découverte, merci à La Quête, de l’univers de Pierre Gauvreau, peintre, auteur,
réalisateur et signataire du Refus global.
Un homme dont l’œuvre me semble
livrer un message aux antipodes de la résignation, destination ultime du cynisme.
Voici donc, sous forme de missive à mes
amis, mon interprétation de ce message.
Chers amis,
Comme beaucoup d’autres, dont moimême, vous êtes inquiets, en colère même
parfois. En cette ère où nous contemplons
l’œuvre humaine par le biais d’un prisme
planétaire, le portrait n’est guère reluisant : pauvreté, corruption, discrimination, viol, racisme, agression, pollution,
destruction, changements climatiques,
mensonge, faux-semblant… Bref, forte
est l’impression que l’humanité n’est
qu’un mince reflet de ce qu’elle pourrait
être.
Il est vrai que le désir de faire mieux
semble parfois aussi inerte qu’un tas de
cendres. Écrasé sous le poids d’un obscurantisme qui n’a cessé de se renouveler, le
silence est lourd. Mais, n’y a-t-il pas des
10
signes, surtout depuis la crise économique de 2008, qui indiquent que, sous
la cendre, les rougeoyantes braises du
changement et de la soif de liberté couvent toujours ? Cette même soif de liberté
qui a motivé Borduas et les automatistes
à lancer le Refus global.
www.collectionscanada.gc.ca
Photo: Janine Carreau
Et si les Borduas, Arbour, Barbeau, Cormier, Ferron, Gauvreau, Guilbault, Leduc, Renaud, Riopelle, Sullivan et Perron
avaient été cyniques, le manifeste Refus
global aurait-il été écrit et publié ? Ce
document dénonçant l’obscurantisme du
clergé et des élites, lancé comme un pavé
dans la marre en 1948, aurait-il pu constituer une des
initiatives fortes ayant mené
à la Révolution tranquille ?
Claude Gauvreau, le frère de Pierre a écrit : « Il
faut poser des actes
d'une si complète audace, que même ceux
qui les réprimeront devront admettre qu'un
pouce de délivrance a
été conquis pour tous ».
Plutôt que de se faire cynique, n’est-il pas temps
de reconnaître les signes et de souffler sur
la braise ? Se résigner à ce qui est ou ce qui
n’est pas, n’est-ce pas refuser le privilège
de participer à transformer ce qui est et à
faire naître ce qui n’est pas encore ? Poursuivre la quête de liberté n’est-il pas une
attitude plus féconde que la résignation ?
GAUVREAU OU L’OBLIGATION DE
LA LIBERTÉ !
À ces questions, Pierre Gauvreau répondrait sûrement oui! Sa série de treize
tableaux intitulée Les Insoumis est éloquente à ce sujet. Par cet hommage,
dédié à la bravoure des Giordano Bruno
(1548-1600), Fleury Mesplet (1734-1794)
et autre Hypathie (370-415) ou Bruno
Cormier (1919-1991), Gauvreau souligne
l’importance, pour l’Histoire, d’avoir
porté des esprits libres.
Pour Gauvreau, être libre, c’est se préoccuper d’abord de vérité. « On peut avoir
des certitudes, si on ne se préoccupe pas
de la vérité. Moi, je veux savoir ce qui
est vraiment », lance-t-il dans le film de
Charles Binamé, Gauvreau, ou l’obligation de la liberté. Une quête exigeante qui
fait peur. Il ajoute d’ailleurs : « Il n’y a pas
de doute que le vertige de l’infini est une
sensation que l’homme a beaucoup de
difficulté à supporter ».
C’est probablement ce vertige qui rend
le statu quo si séduisant. Au prix même
d’étouffer la recherche de vérité, clé de la
liberté. N’est-ce pas ce statu quo qui vous
choque et nourrit votre cynisme ?
Le chroniqueur Normand Baillargeon,
paraphrasant Ambrose Bierce, a écrit :
« (…) le cynique (…) voit dans le refus
généralisé de voir les choses comme elles
LA QUÊTE
sont et d’en tirer les conséquences qui
s’imposent comme un nouvel aliment
pour son cynisme : comment réagir, sinon avec cynisme, devant ceux qui ne
sont pas cyniques ? »
Mais répudier, dans le cynisme, ceux qui
se laissent séduire par le statu quo, sert-il
la recherche de la vérité ? N’est-il pas plus
constructif de s’en prendre à ce qui l’entretient ?
« La nature de l’homme est d’être libre
et de vouloir l’être, mais il prend facilement un autre pli lorsque l’éducation le
lui donne » , écrivait Étienne de La Boétie
en 1574 dans son Discours de la servitude
volontaire.
Gauvreau va plus loin en affirmant que :
« la liberté intérieure, c’est la liberté qui
nous est donnée face à la vie, par le fait
qu’on a repéré ce qu’on est réellement,
en dehors des conventions, en dehors de
l’éducation ». Pour lui : « l’éducation vise
d’abord à nous traumatiser, à nous faire
renoncer à nous-mêmes et à entrer dans
le système de désir de la société de nos
aînés. C’est à la longue quand on se développe, quand on devient adulte, qu’on
peut arriver à savoir ce qu’on est vraiment ».
Ainsi, pour transcender le vertige de l’inconnu, Gauvreau suggère la réalisation
de soi. Il en fait même un devoir envers
autrui : « notre premier devoir envers les
autres est de nous réaliser nous-mêmes ».
En étant cynique, ne se refuse-t-on pas la
possibilité de se réaliser, de se libérer et de
laisser des repères pour aider les autres
à faire de même ? En nous abandonnant
au cynisme, ne clouons-nous pas au pilori notre potentiel de liberté et celui des
autres, si crucial pour la suite des choses ?
J’ai été cynique, mais je ne le suis plus.
J’espère ne plus jamais l’être. Le cynisme
mène à la résignation, il tue la quête de
liberté.
Je termine cette lettre en me ralliant à
Pierre Gauvreau, lorsqu’il dit : « je ne
cherche pas des amis qui pensent comme
moi. Je cherche des amis qui pensent ».
Vous en êtes, et je vous en remercie !
En toute amitié,
THOMAS DUCHAINE
OCTOBRE 2014
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LE GRAFFITI ET LES MOUTONS
Pour bien des gens, une critique, ça parle d'un produit, de
quelque chose qui existe : livre, film, disque, pièce de théâtre,
spectacle, œuvre artistique, etc. Et ça se lit dans un journal, sur
un écran ou s'entend à la radio. Quand il s'agit de performance
sportive, on pense plutôt à un compte-rendu, ne me demandez
pas pourquoi. Parfois, le produit jugé peut lui-même devenir
une critique, exposée bien en évidence, pour susciter une réflexion. Mais il faut un petit effort pour comprendre.
Un bel exemple existe sur l’un des murs intérieurs du Grand
Théâtre de Québec (GTQ) et porte un jugement sévère
sur l'ensemble de la société. Une phrase du poète Claude
Péloquin, écrite comme un graffiti dans la grande fresque imaginée par Jordi Bonet, il y a 45 ans, se lit : « Vous êtes pas écœurés
de mourir, bande de caves. C'est assez ! » Cri d'alarme, de désespoir ou provocation ? Un peu de tout ça pour qui connaît un peu
les textes iconoclastes de Pélo.
À l'époque, le dévoilement de la murale, lors des célébrations
inaugurales de la nouvelle salle de spectacles de Québec, avait
choqué une partie de l'élite bien-pensante. Normal : personne
n'aime se faire traiter de « cave », surtout quand il paye la facture. (Pélo a depuis révélé n'avoir rien touché pour ce bout de
texte qu'il avait donné à Bonet.) Mais ceux qui se sentaient visés
percevaient une forme de mépris dans l'expression « bande de
caves ». D'autres s'en amusaient. Alors, bien des gens qui n'auraient jamais mis les pieds dans le prestigieux édifice y sont
entrés pour voir « la chose ». Plusieurs se demandaient même
pourquoi régnait une telle tempête dans un si petit verre d'eau.
Parce que du coup, on oubliait l'essentiel de la protestation :
« Vous êtes pas écœurés de mourir... » et le « C'est assez ! » qui
la ponctuait comme un appel à réagir. En 1971, philosophes et
politiciens n'ont pas vraiment cherché à analyser le message :
le Québec en était encore à digérer la crise d'Octobre. Dans les
médias, les démagogues insistaient plus sur l'indignation qu'on
devait éprouver que sur l'examen de conscience qu'imposaient
les comportements trop soumis de tout un chacun. C'est bien
connu, les moutons n'ont pas l'esprit critique : ils se contentent
d'obéir aux ordres et aux consignes des chefs et des bergers qui
mènent le troupeau de la bergerie à une verte prairie, quelque
part, en attendant le pire. Pour certains, le petit peuple est un
troupeau de moutons.
Olympiques (qu'on n'a pas eus), les Nordiques (perdus, mais
peut-être récupérables avec un super auditorium et quelques
millions de dollars) et les vedettes (anglophones de préférence)
qui « nous mettent sur la mappe » quand on s'entasse (comme
des moutons) sur les Plaines pour les accueillir.
Le graffiti, art de la communication des peuples de l'Antiquité,
a repris du galon pour devenir une forme d'expression (parfois
artistique) urbaine, agaçante parce qu'elle obéit à ses codes et
modes et « salit les murs », mais tolérée, car on peut l'effacer à
coups de brosse lors des grands nettoyages municipaux. Les stratèges de l'affichage ont même appris à l'utiliser.
La publicité se donne des airs d'information vitale en envahissant des plages hier réservées dans les grands médias, qu'elle
abandonne s'ils lui résistent. Plus que jamais, « le médium est le
message », comme disait Marshall McLuhan. Mais pour décoder
le message sans se laisser endormir ou manipuler, il faut un minimum d'esprit critique. Et cultiver le sens critique des citoyens,
ça peut devenir risqué pour les maîtres penseurs. Imaginez le
drame si les gens ignoraient les campagnes de promotion et de
propagande qui rythment leur état de soumission consommatrice !
Pour que l'augmentation potentielle des effectifs de la « bande
de caves » soumis, dociles et aveugles se maintienne, l'esprit et le
sens critique doivent être contrôlés et dirigés vers des objectifs
inoffensifs pour l'ordre établi. Pour cela, les moyens modernes
ne manquent pas.
« Vous êtes pas écœurés de mourir... », disait Péloquin. On a envie d'ajouter : « Vous êtes pas écœurés qu'on vous vende au plus
offrant ? »
MARTINE CORRIVAULT
Il y a belle lurette que la murale du GTQ ne dérange plus
personne. La société québécoise en évolution en a vu d'autres :
crises syndicales, événements d'Oka, le grand verglas, le Parti
québécois au pouvoir, les deux référendums et les campagnes
électorales qui les accompagnaient, puis l'explosion des nouvelles technologies et l'arrivée de l'an 2000... que rien n'a différencié de 1999 ou de 2001. Pour mobiliser les gens, on s'est
tourné vers le sport devenu porteur de la fierté nationale : les
OCTOBRE 2014
LA QUÊTE
11
IDACTION : INCLUSION PLUTÔT
QU’INTÉGRATION
Crédit: Jacques Nadeau
L’esprit critique, si on le considère parfois comme inné dans
nos vies, n’est pas accessible
de facto à tout le monde. Certains individus, en milieux plus
difficiles, sont beaucoup plus
susceptibles de tomber dans les
pièges que leur tend la vie. Exeko est un organisme de Montréal né en 2006 dont le moto
est : « L’inclusion par l’innovation
en culture et en éducation ». Un
de leurs projets : IdAction, vise à
enseigner l’esprit critique. Pour
en savoir plus, La Quête a parlé
avec William Beauchemin, médiateur intellectuel pour Exeko.
Idaction et idAction mobile sont des
projets nés en même temps qu’Exeko.
Le premier tente d’attirer sa population
cible avec des ateliers dans différents lieux
comme l’Accueil Bonneau ou d’autres
refuges. Le second se déplace plutôt vers
elle. « C’est une caravane philosophique
de médiation intellectuelle et culturelle.
Quatre jours par semaine, elle fait le tour
des parcs ou des stations de métro, où on
peut trouver des gens en situation d’itinérance », explique M. Beauchemin.
À savoir si Exeko et idAction produisent
des résultats concrets, le médiateur intellectuel parle avec fierté d’un groupe de
la réserve de Kanesatake. Il raconte rapidement : « À travers l’atelier, ils se sont
rendu compte que pour être plus ouverts
à leur communauté, rouvrir leur radio
communautaire était utile. Les médiateurs les ont accompagnés dans ce projet
et aujourd’hui la radio est rouverte. Ça,
c’est un impact concret de ce qui se passe
avec idAction ».
Étant également une bibliothèque mobile, idAction mobile donne accès à un
savoir auquel ces personnes n’y auraient
pas nécessairement. « Un livre, c’est un
objet intellectuel, mais ça peut devenir
aussi une pratique intellectuelle, car on se
sert souvent de ces objets pour créer des
situations de réflexion ».
William Beauchemin termine en tentant
de bien faire comprendre la philosophie
de ce projet. « Nous, on ne travaille pas
vraiment dans une logique d’intégration, mais plus d’inclusion. C’est-à-dire,
on ne travaille pas sur les personnes
pour qu’elles correspondent à certaines
normes de la société, mais plutôt sur le
potentiel présent en chaque personne qui
lui permettra de se positionner comme
acteur de changement ».
Comment faire, toutefois, pour inclure
ces individus que la société exclue ? Enseigner l’esprit critique ne se fait pas dans
une classe à l’aide de craies et de tableaux,
explique William Beauchemin. « On n’arrive pas là pour leur donner un cours à
ces personnes-là. On ne les fait pas étudier », résume-t-il.
POPULATION CIBLÉE
C’est grâce à des projets comme idAction et idAction mobile que l’organisme
touchera sa population cible. La tranche
d’âge visée par le projet s’étend de 15 à 35
ans. Ainsi, idAction tente de toucher les
jeunes de la rue, les gens en milieu carcéral, les jeunes autochtones et plusieurs
autres groupes de « laissés pour compte ».
« Les gens en situation de précarité sont
particulièrement exposés à des manipulations et ont besoin des outils qu’on leur
offre. En fait, tout le monde dans la société en a besoin ! », confie William Beauchemin à La Quête.
MATHIEU MASSÉ
12
Crédit: Jacques Nadeau
M. Beauchemin explique qu’en arrivant dans un atelier, il n’est pas là pour
démontrer qui dit la vérité à qui, mais
plutôt pour créer des situations de réflexion. Basées sur le concept d’égalité des
intelligences, les activités sont souvent à
caractères ludiques ou créatifs afin de
permettre aux participants de développer
ces aspects de leur personnalité.
LA QUÊTE
OCTOBRE 2014
ESPRIT CRITIQUE EN HERBE
« La vérité sort de la bouche des enfants », dit l’adage. Il est vrai que par leurs observations pour le
moins comiques, les petits ont souvent l’art de dire bien plus qu’il n’y semble en apparence. Leurs
questions, répliques et réflexions témoignent parfois d’un étonnant esprit critique. Avec leurs yeux
d’enfants, ils remettent en question l’ordre établi, ne se satisfont pas toujours d’une réponse à un
« Pourquoi ? » et tiennent tête aux adultes. La Quête a sondé quelques parents à la recherche de situations où leurs marmots en ont fait rire et réfléchir plus d’un en exprimant un point de vue traduisant
tout un esprit libre et frondeur.
STRATÉGIE POLITIQUE
OBSERVATION LINGUISTIQUE
LE RECORD DE L’AUDACE
Laure, 8 ans, passe avec sa mère devant
une statue d’Adélard Godbout. Elle demande qui il est. La mère explique qu’il
s’agit d’un ancien premier ministre, celui
qui a autorisé le droit de vote aux femmes
québécoises.
« Je suis vraiment content d’être francophone parce que je ne comprends pas
l’anglais. »
En première année du primaire, Léo
doit préparer un exposé oral pour lequel
la consigne est de résumer un livre lu
récemment.
« Ah, je comprends, répond Laure, il
voulait que deux fois plus de gens votent
pour lui. »
La maman de Rémi, 4 ans : « Dans dix
minutes, on ferme l’ordinateur et on fait
autre chose ».
UN BRIN DE CONSTITUTION
L’enseignante tranche : Le Livre Guinness
des records n’est pas permis pour l’exposé
oral. La mère de Léo aborde ainsi le sujet
avec lui :
Réplique de Rémi : « OK maman. Mais un
gros dix minutes ».
- Le Livre Guinness des records, tu ne peux
pas résumer ça pour ton exposé oral.
PROVERBE REVU ET CORRIGÉ
- Je sais.
Célestin, 3 ans, demande à sa mère ce
qu’est le Canada. La mère lui explique ce
qu’il en est.
Réplique de Célestin : « Ah ! Le Canada,
c’est un pays par-dessus notre pays ! »
L’AUTORITÉ PARENTALE
SÉRIEUSEMENT REMISE EN
QUESTION
« Je vais aller me trouver d’autres parents. »
LE TEMPS, ÇA SE NÉGOCIE
Encore la jeune Laure, cette fois-ci à 9
ans. Sa mère loue un film pour faire une
surprise à la fillette et à son jeune frère.
Mais au lieu de dire merci, Laure lui
répond qu’elle aurait préféré un autre
titre. La mère lui réplique alors le proverbe suivant : « À cheval donné, on ne regarde pas la bride ». Et Laure de répondre
du tac au tac : « Ben, à film donné, on regarde pas le film ! »
Léo choisit Le Livre Guinness des records.
- Vas-tu changer de livre ?
- Non. Je suis courageux.
CITATIONS COMPILÉES PAR
VALÉRIE GAUDREAU
Illustration: Valérie Gaudreau
— Léanne, 3 ans
— Jérôme, 5 ans
OCTOBRE 2014
LA QUÊTE
13
PAS TROP TÔT POUR APPRENDRE
À la fin des années 60, Matthew Lipman, professeur de philosophie et de logique à l’Université de
Chicago, relève que ses étudiants n’utilisent pas dans leur quotidien les outils de réflexion qu’ils apprennent en cours. De ce constat, il tire la conclusion que la philosophie1 n’est peut-être pas enseignée
assez tôt à l’école. En effet, si l’on n’apprend pas à un enfant à réfléchir sur le monde qui l’entoure
« par et pour lui-même », il est probable qu’une fois adulte, il ait des difficultés à réfléchir de manière
approfondie et constructive aux problèmes qu’il rencontrera dans la vie.
Mais trois questions se posent alors :
qu’est-ce qu’un esprit critique ? Comment inviter les enfants à le développer ?
Et puis, surtout, à quoi sert-il de l’améliorer ?
Pour Matthew Lipman, l’esprit critique
se définit essentiellement par la rigueur
logique, la recherche de critères, l’ouverture d’esprit, l’autocorrection et la
sensibilité au contexte. Par exemple, on
pourrait se poser la question suivante :
« le mensonge est-il toujours mal ? » S’il
est tenu pour acquis qu’il ne faut jamais
mentir, y a-t-il des situations où mentir
serait bien? Si oui, lesquelles et pourquoi ?
Toutes ces questions témoignent d’un
esprit qui critique certaines croyances et
qui s’interroge (ici, la croyance est que
mentir serait forcément quelque chose de
mal).
Pour renforcer l’esprit critique des enfants, Matthew Lipman écrit, avec sa
collaboratrice Ann Margaret Sharp, des
romans (adaptés à des tranches d’âge
différentes) dans lesquels les personnages
sont confrontés à des problèmes philosophiques : Elfie, Kio et Augustine, Pixie,
Harry, Lisa, Suki et enfin Mark. Après la
lecture commune d’un extrait, chaque
élève construit une question concernant
le texte. Toutes les questions sont notées
au tableau, puis les enfants votent pour
celle qu’ils veulent. À partir de la question « élue » démocratiquement, les élèves
partagent leurs points de vue pour les
analyser et construire une réflexion commune dans le but d’apporter une réponse
éclairée à la question posée. On pourrait
d’ailleurs comparer l’esprit critique à un
tamiseur en ce que le tamiseur affine le
grain, comme l’esprit critique, la pensée.
Cet apprentissage du dialogue philosophique offre aux enfants les outils nécessaires pour interroger le monde dans
lequel ils évoluent, afin de mieux le comprendre. Ils ont l’occasion d’interroger
les différentes croyances (celles d’autrui,
mais également les leurs) par lesquelles
ils interprètent leur univers. De plus, le
dialogue stimule leur curiosité et contribue à une plus grande tolérance. En effet, dans une Communauté de Recherche
en Philosophie (CRP), la confrontation
d’opinions est davantage vue comme une
richesse que comme une agression.
Bien entendu, l’apprentissage de la pensée critique n’est pas réservé uniquement
aux enfants. À tout âge, l’esprit peut enrichir la qualité de son questionnement et
de son argumentation2. Que ce soit chez
les aînés, chez les adultes, dans les entreprises ou chez tout autre public, l’apprentissage du dialogue philosophe est
un extraordinaire moyen de renforcer la
pensée critique et d’ainsi appréhender la
vie de manière plus sereine et éclairée.
ÉRIC SUAREZ
MEMBRE FONDATEUR D’ANTIDOXE
COOPÉRATIVE DE SOLIDARITÉ.
WWW.ANTIDOXE.COM
La philosophie (du grec philo - ami,
et sophia - sagesse) est une discipline
qui interroge les concepts (ex. : la
beauté, le temps, la justice, la vérité,
etc.) grâce, entre autres, à la logique.
Illustration: Danièle Rouleau
1
14
Nous faisons ici une distinction entre
« discussion » et « dialogue ». Dans la
discussion, on partage des opinions :
« je pense que… » En revanche, dans
le dialogue, on apporte les raisons de
nos opinions : « je pense que… parce
que… »
2
LA QUÊTE
OCTOBRE 2014
UN SYSTÈME D’ALARME
La pensée critique dont je parle est
celle qu’on voit passer chaque jour sans
s’arrêter ou alors qui devient une seconde nature. Prenons un exemple que
nous connaissons tous bien à Québec :
les radios-poubelles. On y dit n’importe
quoi, l’auditeur y trouve du meilleur et
du pire et retient ce qui lui convient. Tu
hais les Angliches? On va parler contre
eux. Tu aimes ce joueur de hockey ? On
va le flatter. L’idée est simple, le cracheur
de postillons est simpliste et l’auditeur répète n’importe quoi. À ce point, on peut
parler de démagogie sans en faire ! Dismoi ce que je veux entendre et je t’aimerai.
PRATIQUER LA PENSÉE
CRITIQUE
C’est pareil pour les journaux ou la télévision, Internet ou le semainier paroissial. On y trouve n’importe quoi et plus,
mais la question demeure : où est la vérité
dans tout ce fatras ? La nouvelle est-elle
crédible ? Qui a écrit ce texte et l’auteur
est-il fiable ou non? En quoi l’est-il ? Sur
quels faits ou évidences se base-t-il pour
rapporter cette nouvelle ? Est-ce un spécialiste ?
Avancée comme ça, en touffes et en tas,
on dirait que c’est très compliqué cette
« pensée critique ». En fait non. Ce n’est
qu’un exercice auquel on s’habitue et auquel on prend goût. Lire ou écouter les
médias et savoir séparer le vrai du faux,
voir la coquille du raisonnement, ou l’absence de celui-ci, voir facilement à quel
point on nous prend pour des cloches et
ne pas agir comme si on en était une, c’est
vraiment très amusant !
Il est des choses qu’on remarque plus vite
que d’autres. Une étude révèle qu’il n’y a
pas de danger à acheminer du pétrole sale
d’Alberta jusqu’à Lévis. Ce n’est qu’un
exemple. Mais je remarque que l’étude a
été faite par l’Association canadienne des
producteurs pétroliers. Mon sens critique
et ma manie d’analyse me fichent des
OCTOBRE 2014
Photo: Archives Web
Rassurez-vous, loin de moi
l’idée saugrenue et non critique
de vous infliger l’œuvre du philosophe Kant (1724-1804) ou
d’autres grands penseurs de
tous les temps. Non que ce
soit de peu d’intérêt, bien au
contraire, mais ce n’est pas ici
le propos.
coups de pied sur le devant des jambes.
Je deviens bleu comme le gouvernement
du Kanada ! Suis-je convaincu par cette
étude « indépendante » ? J’ai l’air d’une
cloche ?
Si vous vous fiez aux apparences, vous
êtes fait ! Allez plus loin, regardez derrière
l’image, ne vous arrêtez pas. N’écoutez
pas les empêcheurs de vous informer
en rond. Allez-y, foncez. Si on semble se
payer votre gueule, on le fait probablement! Ne les laissez pas faire gratos ! Soyez
plus malin ! Vous méritez mieux. N’avalez
pas les couleuvres politiques, religieuses,
journalistiques ou commerciales. Allez
plus loin, cherchez. Informez-vous auprès de sources de confiance.
SE FAIRE SA PROPRE OPINION
Un film très bien noté pourrait bien être
un navet pour vous et vous êtes la personne la plus importante de votre vie!
Idem pour une musique, un livre ou un
spectacle. Votre opinion est la seule qui
compte, alors ne confiez pas à d’autres
le soin de la faire à votre place. Encore
moins de la contrôler ! Avoir une opinion, c’est être Libre! Il ne faut pas l’acheter toute faite, mais la faire soi-même. En
plus d’avoir une opinion propre, ce qui
est déjà bien, vous y gagnerez le respect.
Le vôtre et celui des autres.
Je me souviens, et je sais que vous aussi, du faux débat sur le choix entre un
référendum et les « vraies affaires ». Il n’y
avait pas de débat et pas le moindre référendum en vue. Il y avait un mensonge
grossier que beaucoup de Québécois se
sont empressés d’avaler. On ne voulait
absolument pas de référendum, mais personne ne parlait de cette éventualité. Sauf
ceux qui avaient intérêt à faire oublier
qu’ils étaient fort peu honnêtes.
Et pour faire oublier leur manque de
transparence passé, ils furent encore plus
malhonnêtes ! Et je connais des retraités
qui se mordent les doigts de ne pas avoir
eu plus de sens critique !
Rien n’est jamais si simple, je le sais
bien. Mais la pensée critique est un système d’alarme qui ne coûte somme toute
qu’un peu d’attention et de réflexion de
votre part. Il faut faire un certain effort,
soit, mais ensuite il y a la récompense ! Le
plaisir de savoir et de comprendre.
Cela ne se fait pas en quelques jours. C’est
l’habitude d’une vie. Mais le jeu en vaut la
chandelle, vous pouvez me croire de toute
votre pensée critique!
JACQUES PRUNEAU
L’ANARCHISTE
Au bout d’un certain laps de temps,
la pensée critique devient une habitude. Dans tous les domaines, il faut être
conscient que des gens ou des organismes
ont intérêt à vous tromper, à arranger
leur vérité et à vous la faire avaler.
LA QUÊTE
15
LA PERMACULTURE : SE
NOURRIR, SE LOGER, SOCIALISER
Permaquoi ? Permaculture. Au-delà du sympathique compagnonnage basilic-tomate du jardin de nos mères, la permaculture englobe tout. Il s’agit d’une science du design s’inspirant
de la nature appliquée à n’importe quel domaine et qui vise à
prendre soin des gens et de la nature et à redistribuer l’abondance. De la production agricole à la construction de bâtiments
et aux relations interpersonnelles, plusieurs réalités humaines,
comme se nourrir, se loger et socialiser, gagnent à s’inspirer de
la permaculture.
SE NOURRIR
Marie-Ève Roy et une cinquantaine d’autres personnes se
retrouvent deux fins de semaine par mois aux Fermes Miracles
à Saint-Anicet pour suivre un cours de permaculture (Permaculture Design Course). Elles ne sont d’ailleurs pas seules à s’y
intéresser, puisque le même genre de formation pullule partout au Québec : Granby, Chertsey, Val-David et bien d’autres
régions.
Du point de vue agricole, « la permaculture, c’est une vision
globale dans le but de diminuer le travail de l’homme qui
s’acharne à vouloir contrer la nature en cultivant par un système
non naturel : agriculture chimique, monoculture, sur un sol à
nu », déplore Marie-Ève.
Une forêt nourricière, voilà un projet concret à réaliser sur son
lopin de terre. Il faut d’abord observer longuement son terrain,
analyser la composition du sol, l’inclinaison du terrain, le temps
et l’angle d’exposition du soleil, l’écoulement de l’eau, etc. Ensuite, lors de l’élaboration de son design, un permaculteur averti
recrée les couches végétales d’une forêt naturelle. La rhizosphère, c’est-à-dire toutes les racines, le couvre-sol, les herbacées,
les arbustes fruitiers, les petits et grands arbres, et les plantes
grimpantes, sans oublier les champignons. Chaque plante joue
son rôle, qu’elle soit comestible ou non.
« Ce que je veux, c’est m’autosuffire, je veux cultiver ma propre
nourriture et moins dépendre du système et de la production
alimentaire qui est vraiment exigeante en pétrole. À la base,
toutes mes actions sont pour sortir du système pétrolier, […]
maintenant j’ai besoin de retourner en campagne et de me retrouver en nature », conclut Marie-Ève, plusieurs projets permaculturels en tête.
SE LOGER
Francis Gendron, conférencier, professeur et fondateur de l’Air
des solutions, une entreprise qui « […] veut inspirer, éduquer
et donner du support aux gens qui désirent avoir une vie extraordinaire », s’est entretenu avec La Quête au sujet de la permaculture. Pour lui aussi, elle englobe tout : agriculture, humain, écoconstruction. « C’est simplement une manière de faire
interagir les éléments d’une manière gagnante-gagnante pour
16
Photo: Marie-Eve Boisclair
Ça court dans les rues des villes et des campagnes, se propage
dans plusieurs couches sociales et grandit : un changement, à
l’échelle planétaire, se trame. Des révolutions politiques aux
protestations environnementalistes, les consciences sont en
mouvement, l’esprit critique s’éveille. Alors que certains parlementent ou donnent dans l’activisme, beaucoup s’émancipent
dans la permaculture.
Cours de permaculture
l’humain et la nature, d’agencer stratégiquement les bâtiments,
les personnes, les plantes, etc. ». Selon Francis, les écoconstructions, en interaction avec la nature, ont une importance capitale en permaculture. Par exemple, certaines technologies permettent de collecter l’eau de pluie et de l’utiliser plusieurs fois
à l’intérieur de la maison avant qu’elle ne reparte dans la terre.
Ainsi, aucune nouvelle source d’eau n’est utilisée.
SOCIALISER
Bernard Alonso, facilitateur international en permaculture
depuis 1993, se spécialise en permaculture humaine. Selon lui,
la permaculture vise à recréer des écosystèmes viables. Dans la
nature, tous les systèmes ont des rôles et une fonction précise, il
en va de même pour un individu dans son écosystème qu’est la
société. Il explique : « Tous ont une niche, un rôle à la naissance.
Dans le monde industriel, l’école forme l’individu avec des compétences sans développer son talent. Cela fait en sorte que certaines personnes, qui avaient une raison d’être dans la société,
n’ont pas eu la chance de développer leur talent ».
En d’autres termes, l’éducation actuelle privilégie l’hémisphère
gauche, siège de la logique, du jugement, de l’analyse. L’école
forme des individus afin qu’ils répondent aux besoins de la
société. Cette dynamique se fait au détriment de l’hémisphère
droit, siège de l’intuition et la créativité, grâce auquel chacun
découvre son talent et sa vraie place dans le monde. Dans ses
cours, Bernard réveille l’hémisphère droit de ses élèves, afin que
les changements soient intérieurs, et ensuite extérieurs.
VÉRONIK DESROCHERS
PRINCIPES DE LA PERMACULTURE Observation, stockage de l’énergie, autorégulation, valorisation
des ressources renouvelables, zéro gaspillage, intégration et non
séparation des cultures, solutions petites et lentes, diversité,
créativité.
LA QUÊTE
OCTOBRE 2014
PENSER LA TECHNIQUE
Alors que la quantité de gadgets électroniques dits « intelligents » explose et qu’Internet continue de
s’étendre à travers le monde — regroupant bientôt plus de 3 milliards d’utilisateurs à travers le globe,
il devient de plus en plus difficile de remettre en question la technique dans nos sociétés.
En 2009, devant les gazouillis et les photos des rassemblements dénonçant la
victoire électorale de l’ancien président
iranien Mahmoud Ahmadinejad, un
journaliste américain, Andrew Sullivan,
reformulait le célèbre titre du poème de
Gil Scott-Heron « The Revolution Will
Not Be Televised » pour « The Revolution
Will Be Twittered ». Facebook, Twitter,
YouTube et les autres entreprises de Silicon Valley étaient portés aux nues en tant
qu’étincelles révolutionnaires de l’avenir.
(2014), le philosophe américain Andrew
Feenberg donne deux exemples illustrant très bien ce processus décisionnel,
notamment à propos de l’adoption de
petites roues pour la bicyclette.
leurs produits. Le récent piratage de plusieurs comptes de célébrités, dont l’actrice Jennifer Lawrence, illustre assez bien
le risque que nous encourons à partager
si volontairement notre vie privée.
Ainsi, au XIXe siècle, deux visions de la
bicyclette s’opposaient. L’une considérait que l’utilisation du vélo était exclusivement une activité sportive. L’autre
y voyait un moyen de transport et une
activité de loisir. Le premier camp prônait
l'installation d'une grande roue à l'avant
qui aurait pu permettre de parcourir plus
de distance par tour de pédalier. Le deuxième camp trouvait ce modèle trop dangereux et préférait l’utilisation de petites
roues. Avec l'apparition des roues gonflables, les fabricants opteront finalement
pour le second modèle qui s'imposera
alors sur le marché.
À ce sujet, Scott Mendelson, dans un
billet publié sur le site du Forbes, souligne
un lien causal existant, selon lui, entre
le fait qu’Hollywood fasse du corps des
actrices l’élément central de leur travail et
le phénomène de vols de photos personnelles qui ciblent presque exclusivement
des femmes célèbres.
Il faut attendre le livre du journaliste biélorusse Evgeny Morozov, The Net Delusion (2011), pour que les acclamations
enthousiastes de ceux qu’il nomme les
« cyber-utopistes », c’est-à-dire les élites
intellectuelle et économique qui considèrent les nouvelles technologies d’information et de communication (NTIC)
comme étant un remède à tous les maux
de nos sociétés, s’estompent. Dans son
livre, Morozov décrit comment les régimes autoritaires, comme celui de la
Chine ou de l’Iran, se servent d’Internet
pour traquer les dissidents politiques. Il
met en garde contre l’association trompeuse entre Internet et la liberté d’expression : le développement du premier n’assure pas nécessairement celui du second.
Ce petit retour en arrière démontre assez
bien le rapport de puissance qui s’établit
dans le développement des techniques :
le ou les groupes réussissant le mieux à
implanter leur modèle et leurs intérêts
marquent à tout jamais nos sociétés.
LA TECHNIQUE ET
LA PUISSANCE
LES COÛTS DE LA TECHNIQUE
Comme d’autres techniques avant elle,
Internet a beaucoup évolué dans les dernières années. L’orientation de ces techniques n’est pas un fait aléatoire, mais une
conséquence de décisions prises par des
individus, des groupes, des entreprises
ou des institutions gouvernementales et
non gouvernementales. Ces acteurs n’ont
évidemment pas la même influence sur
le développement d’une technique. Cependant, les conséquences des décisions
qu’ils prennent peuvent être cruciales
pour le sort de la société.
Dans le premier chapitre de son livre
Pour une théorie critique de la technique
OCTOBRE 2014
Qui décide de quoi et pourquoi, voilà ce
que nous devons garder en tête lorsqu’on
nous décrit euphoriquement la « révolution » que marque la sortie de brosses à
dents connectées, de montres et bracelets
mesurant nos activités physiques, de lunettes qui « augmentent » notre réalité,
etc. Le pari, c’est qu’avec ces objets, nous
serons plus en santé, plus informés et, par
conséquent, de meilleurs citoyens, mais à
quel prix ?
D’une part, très peu d’attention est portée aux conséquences environnementales
liées à la production de ces appareils en
quantité phénoménale. Ces produits, qui
sont construits à l’aide de substances hautement chimiques et très polluantes, sont
bien souvent destinés à être remplacés au
bout de deux à quatre ans. Autre exemple,
peu d’études ou d’actions sont faites par
les entreprises pour contrer la pollution
causée par les centres de données qui sont
alimentés en grande partie par des centrales thermiques au charbon.
D’autre part, les compagnies qui produisent ces objets n’indiquent pas ce
qu’elles feront des données recueillies par
LA QUÊTE
Photo: Archives Web
Si les questions politiques, sociales, économiques et environnementales existent
et sont de plus en plus soulevées dans les
couloirs des universités et des entreprises,
les réponses, elles, tardent à venir, soit
parce qu’elles sont inconnues, soit parce
qu’elles menacent le « progrès » ou la
démocratie.
Dès lors, une question s’impose à nous :
Internet profite-t-il plus aux hommes
qu’aux femmes ? La prolifération de la
pornographie, mais aussi le piratage dont
les femmes sont de plus en plus victimes
dû au fait qu’elles sont célèbres, sont des
exemples parmi d’autres démontrant que
les NTIC établissent un rapport inégalitaire entre les hommes et les femmes, ces
dernières subissant majoritairement leurs
effets néfastes.
Parce qu’Internet est encore très jeune, il
est tôt pour condamner entièrement son
utilisation. Néanmoins, l’idéologie propagée par Google, YouTube, Twitter et les
autres entreprises californiennes doit être
sérieusement questionnée. Il faut se rappeler que bien qu’elles se disent à l’avantgarde de la démocratie, ces compagnies
suivent une logique capitaliste priorisant
leurs propres intérêts économiques, politiques et sociaux au détriment de ceux
des autres groupes.
RÉMY-PAULIN TWAHIRWA
17
LA TERRE EST PLATE
Photo: Archives Web
La pensée est une libération de
l’esprit, la critique est une opposition, mais il s’agit de joindre les
deux mots pour se trouver face à
une situation où l’on doit tirer le
meilleur parti de ces entités. En
association, les éléments doivent
fournir une solution positive pour
améliorer un tant soit peu la situation ou l’objectif en cause. La pensée critique est le seul moyen de
faire bouger et avancer les choses.
Ainsi, un juge lors d’une procédure pourra faire abstention de la
pensée critique en se cantonnant
sur des agissements habituels, gardant le statu quo sur certaines situations qui parfois mériteraient
d’être améliorées : « Le monde agit
comme ça depuis des années, c’est
donc la bonne façon de faire ». Cela
n’est certes pas une garantie, surtout si cette cause devient une jurisprudence. Elle restreindrait alors
une évolution juridique.
La question A est un peu farfelue
pour les gens de notre époque. Tout
le monde en connaît la réponse.
Mais pendant des centaines d’années, on croyait que la terre était
plate, et certains personnages ont
passé un mauvais quart d’heure
pour avoir pensé autrement. Pauvre Galilée! Les questions B, C et D
sont un peu plus complexes, sûrement que nous aurons la réponse
à tout cela dans x années. Entretemps, nous devons faire face aux
sceptiques qui nous renvoient la
balle, requérant de nous une preuve
extraordinairement limpide et plaçant les réponses aux questions
face à l’évidence. Une enquête devra révéler les faits et les preuves
qui supportent les énoncés.
Sans la pensée critique, l’évolution
est impossible. Elle est le moteur
indispensable du perfectionneGalilée
ment de toute civilisation et de
tout être humain. Elle exige de l’inPeu importe le domaine ou le sujet dont il est question, la per- dividu le dépassement du savoir de son époque, une étude en
sonne qui avance une idée ou une opinion est-elle qualifiée pour profondeur qui mettra hors de tout doute l’orientation du sujet
établir le bien-fondé de ce dont il est question ?
élaboré, plaçant ainsi en lumière le point final sur ce que bien
d’autres avant lui n’ont pu faire.
L’esprit critique n’a pas de parti pris puisqu’il se réfère à la
logique, et il est à des années-lumière de l’opinion publique. Par
exemple, face aux phrases suivantes :
PHILIPPE BOUCHARD
A- La terre est-elle plate ?
B- Y a-t-il des êtres humains sur d’autres planètes ?
C- Dieu existe-t-il ?
D- Les soucoupes volantes existent-elles ?
MERCI À TOUS NOS PRÉCIEUX
PARTENAIRES !
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18
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Claude Gallichan, chiropraticien
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Michel Yacoub
LA QUÊTE
OCTOBRE 2014
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OCTOBRE 2014
LA QUÊTE
19
LE JEU DE LA QUÊTE
PAR JACQUES CARL MORIN ET GINETTE PÉPIN
LE JEU DE LA QUÊTE
par Ginette Pépin et Jacques Carl Morin
CE JEU CONSISTE À REMPLIR LES RANGÉ­­­­­­­ES HORIZONTALES AINSI QUE LES COLONNES 1 ET 20 À
Remplissez les rangées horizontales ainsi que les colonnes 1 et 20 à l’aide des définitions,
L’AIDE DES DÉFINITIONS, INDICES OU LETTRES MÉLANGÉES OU DÉJÀ INSCRITES. CHAQUE CASE
indices ou lettres mélangées ou déjà inscrites. Chaque case grise représente une lettre qui
GRISE
UNElettre
LETTRE
QUI
EST
À LA
FOIS LA
DERNIÈRE
LETTRE D’UN MOT ET LA
est à ­RlaEPRÉSENTE
fois la dernière
d’un
mot
et la
première
lettre
du suivant.
PREMIÈRE LETTRE DU SUIVANT.
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20
1
N
2
3
C
4
D
5
T
Q
6
7
M
M
8
9
10
Verticalement :
VERTICALEMENT :
5- Accord à une proposition. Piège tendu à une personne.
1- Action systématique exercée sur l’opinion publique pour faire accepter certaines idées ou
Actiondoctrines.
systématique exercée sur l’opinion publique pour 6- Pari. Assemblage de fils repliés sur eux-mêmes et attachés de
1faire accepter certaines idées ou doctrines.
telle sorte qu’ils ne se mêlent pas (HAUCEVEE). Récemment
amputée de la Crimée.
Art
de préparer,
d’empailler
monterenles animaux en leur donnant l’apparence de vie.
20-20Art de
préparer,
d’empailler
et de monteretlesdeanimaux
7- Amasser. Se dit d’un travail qui rapporte de l’argent.
leur donnant l’apparence de vie.
HORIZONTALEMENT :
8- Selon la chanson, elles sont longues à Winnipeg. Jeune femme
espagnole. Métal blanc et solide, léger et bon conducteur.
Horizontalement :
1- Nom d’emprunt. Opération magique consistant à jeter un
9- Père àet jeter
fils, tous
sont prénommés
sort1à quelqu’un
grâce à une figurine.
Nom d’emprunt.
Opération magique consistant
un deux
sort acteurs,
à quelqu’un
grâce àKirk
uneet
Michael. Tenue de soirée pour homme caractérisée par un refigurine.
2- Qui a la forme d’un cercle. Identification d’une maladie à vers de soie. Inscription ou dessin effectué sur un mur.
partir de symptômes. Marque commerciale américaine de boisQui a la forme d’un cercle. Identification d’une
maladie
à partir
symptômes.
10- Agent
chargé d’une
missionde
(ISESERAMI).
ÉviteMarque
de danser
son2gazeuse.
commerciale américaine de boisson gazeuse.en rond. Cérémonial.
3- Compteur kilométrique. Résine qui dégage son parfum lors
d’une combustion. Nom commun de la marmotte.
3- Compteur kilométrique.
Résine qui dégage son parfum lors d’une combustion.
Nom
commun
de la marmotte.
4- Attributs
du homard.
Pansement. On lui doit l’opéra
Madame Butterfly.
4- Attributs du homard. Pansement. On lui doit l’opéra Madame Butterfly.
5- Accord à une proposition. Piège tendu à une personne.
20
LA QUÊTE
OCTOBRE 2014
PAR HÉLÈNE HUOT
RIRE ET SOURIRE
GAUCHE. La malédiction s’est abattue sur la gauche depuis les temps les plus reculés. Dans l’Évangile, les élus sont à droite, les
damnés à gauche. Dans les grandes entreprises, les grands patrons ont souvent plus de deux bras, mais ce sont toujours des bras
droits. Dans le dictionnaire, l’antonyme de gauche est adroit, habile. Dans la vie courante, l’enfant apprend, dès l’âge scolaire, qu’il
doit suivre le droit chemin, et se fait gifler s’il tend la main gauche. (Pierre Daninos, Le Jacassin, 1962)
PARLER POUR PARLER
1. « Au tour des kurdes, des chrétiens et des yézidis », lit-on dans Le Soleil du 9 août dernier. Les yézidis sont les adeptes du
yézidisme. Mais qu’est-ce donc que le yézidisme ? a. une religion monothéiste issue de l’Iran ancien; b. une forme de superstition
courante au Moyen-Orient; c. un mode d’organisation sociale fondé sur la religion.
2. Comment appelle-t-on les habitants de Gaza ?
3. Les mots « critique », « crise » et « certain » appartiennent à la même famille. Vrai ou faux ?
4. L’influenza est un autre nom pour la grippe; quel autre nom donne-t-on à la malaria ?
5. Les mots abdomen, fluor et latex nous viennent : a. de l’arabe; b. du latin; c. du portugais.
6. Une fleur immarcescible : a. dégage un parfum mortel; b. meurt le jour de son éclosion; c. ne peut se flétrir.
7. Les expressions « rabaisser le caquet » et « clouer le bec » ont le même sens. Vrai ou faux ?
8. On peut lire dans le Journal de Québec du 9 septembre 2014 que le maire n’en a rien à cirer des critiques des « placoteux ».
Le mot « placoteux » fait partie de la langue parlée seulement ; on ne le trouve pas dans le dictionnaire. Vrai ou faux ?
9. L’éléphant barrit, la chouette chuinte ; que fait le chameau ?
10. César et césarienne sont des mots de la même famille. Vrai ou faux ?
ENCORE UN MOT… LE FLIP IMMOBILIER
« Payant, un flip immobilier ? » C’est la question que pose la journaliste Laurie Richard dans Le Soleil du 5 juillet 2014. Qu’est-ce
donc qu’un flip ? Dans le domaine de l’immobilier, faire un flip, ou flipper, signifie : agir de façon rapide pour l’achat, la réparation
et la revente d’un bien immobilier, dans le but de faire un profit. (On peut aussi, dit-on, faire un flip sans rénovation.) L’opération
est légale, mais assujettie à des règles qu’un notaire se charge d’appliquer ; les profits réalisés sont imposables. Celui qui fait un flip
immobilier est appelé flipper ou flippeux; en anglais, l’opération s’appelle : « house flipping ».
Le mot « flip » n’appartient toutefois pas au domaine de l’immobilier. Dans la langue courante, flipper signifie : être déprimé,
angoissé, avoir peur. Par ailleurs, le mot flip désigne un téléphone pliable, un saut piqué en patinage artistique, une boisson faite à
partir de jaune d’œuf et d’alcool (whisky, cognac, porto ou autre). En économie, un flip est une opération vente-achat qui vise à
éviter un impôt. J’attends de vos nouvelles…
Vous aimez les mots. Vous avez des commentaires à formuler ou des suggestions à faire concernant cette chronique. Rien de plus simple.
Écrivez-moi à [email protected]. Cela nous permettra d’échanger sur des questions qui vous intéressent et d’enrichir par le fait même les futures
chroniques. Merci à vous ! Les réponses page 28.
OCTOBRE 2014
LA QUÊTE
21
Photo: Archives Web
Dans l'édition du 21 août dernier du
Journal de Montréal, Sophie Durocher
titrait sa chronique « Airoldi, vos réactions ». Elle faisait référence à l'émission
Quel âge me donnez-vous ?, créée par Jean
Airoldi au Canal Vie. Cette émission
sème, avec raison, la controverse, spécialement auprès des féministes.
sa personnalité. Après le processus de
transformation, la dame était fière d'elle,
se sentait mieux dans sa peau et avec raison ! Bien sûr, cette boîte de verre porte à
la polémique, à la réflexion : ne sommesnous pas parfois esclaves des regards que
les autres jettent sur nous, victimes de la
société du paraître ?
Sophie Durocher est, tout comme moi,
une féministe modérée. Nous ne fonctionnons pas CONTRE les hommes, mais
AVEC eux ! Quel que soit notre sexe, au
fond, nous voulons tous plaire, recevoir
de la reconnaissance, être respectés... Tout
est dans le REGARD que nous posons sur
soi et sur l'autre ! J'ai voulu, en toute liberté, écouter l'émission pour en tirer
mes propres observations et réflexions.
Qu'importe les époques, il en a toujours
été ainsi, à moins de vivre nus, loin de la
civilisation, sur une île déserte ou dans
la brousse africaine. Encore là, d'intéressants reportages à la télévision nous
montrent ces femmes qui, même si elles
n'habitent pas nos grandes villes surpeuplées, veulent embellir leur corps par des
maquillages faits de henné, d'argile. Elles
portent autour de leur cou, de leurs poignets et de leurs chevilles, des colliers et
des bracelets qu'elles ont créés avec des
pierres naturelles afin d'attirer le regard
des hommes. Ces derniers font de même,
en se parant de plumes d'oiseaux très
colorées.
Dans l'épisode que j'ai regardé, la dame
s'appelait Caroline. Elle m'a fait penser
à moi et sans doute que plusieurs autres
femmes se sont reconnues en elle. La boîte
de verre que nous voyons au début et à la
fin de l'émission est pour moi un SYMBOLE représentant notre état intérieur.
Parfois, nous nous sentons pris en cage :
cela concerne toujours notre confiance
en soi et le fait d'être regardé dans toute
notre VÉRITÉ par les autres. C'est intéressant de constater que les autres nous
perçoivent parfois différemment de comment nous nous percevons. Si les critiques sont positives, nous sommes libres
de les accepter. Cela nourrit notre profond besoin de transformation de notre
être intérieur-extérieur, qui alors bénéficie de ces accents de Beauté.
J'écoutais Jean Airoldi dire à la dame que
c'est très bien de mettre en valeur l'âge
qu'elle a, d'accepter ses rondeurs, d'avoir
de bonnes dents, une belle coupe de cheveux, des vêtements qui l'avantagent, bref,
de dégager une vision positive de toute
22
La
cage
de
verre
Nos observations dans la Nature nous
révèlent que même les animaux se font
une beauté, notamment pour la parade
nuptiale! C'est très intéressant et passionnant de nous avouer qu'au fond,
nous sommes tous semblables, tout en
étant différents dans nos caractères, nos
cultures, nos milieux de vie. C'est pour
cela que tout est RELATIF et que nos
perceptions changent d'un pays à l'autre,
d'une époque à une autre, d'un âge à
l'autre. Il s'agit de voir, avec une pointe
d'humour, de simplicité et d'humilité,
que nos apparences peuvent s'harmoniser avec notre vraie identité, et ce, afin de
dédramatiser nos contacts humains.
CHRISTIANE VOYER
LA QUÊTE
OCTOBRE 2014
Le coffre à gants
Dans ce cher coffre à gants, qui avait
pourtant bel et bien les dimensions réglementaires, on pouvait également y retrouver un parapluie hyper-rétractable à
ouverture tellement soudaine et automatique qu’à un moment donné, personne
ne comprit la signification des baleines
qui nous obstruaient la vue, et ce, durant
de très longues secondes (d’autant plus
longues que nous roulions à plus de cent
vingt kilomètres à l’heure). Il y avait aussi, astucieusement placé là par l’oncle qui
condescendait parfois à nous faire profiter de sa vaste expérience des voyages en
nous refilant quelques conseils judicieux,
un cintre dénoué et terminé par une
boucle, qui nous permettrait d’ouvrir
les portières au cas où ma bonne tante
abandonnerait la voiture garée, tous
feux allumés, moteur en marche et, bien
sûr, toutes portes verrouillées, comme
ça s’était produit la veille au soir. Nous
passâmes un très bon moment à observer
celle-ci en train d’essayer d’expliquer en
joual à un grand policier couleur d’ébène,
qui ne s’exprimait qu’en anglais, pourquoi elle voulait qu’il force la portière
afin que nous puissions déverrouiller les
portes à l’aide du cintre de mon oncle.
Toujours dans ce même coffre à gants,
dans un petit compartiment de vinyle
collé à sa paroi gauche, il y avait un
condom écossais remisé là par le cousin,
depuis le soir où il avait visionné avec sa
copine la fresque de Jeannette intitulée
Comment j’ai perdu la jeunesse présentée
au ciné-parc des Trois colombes et durant
laquelle on leur avait servi des poutines à
la papaye flambées au kirsch. Derrière ce
compartiment, accoté au fond, se trouvait
un petit miroir de poche dont les filles ne
OCTOBRE 2014
se servaient plus pour se poudrer le nez…
mais bien pour se l’emplir. Leurs joues
pâlissaient un brin, d’accord, mais quel
sourire extatique illuminait alors leur
frimousse ! Et comme les garçons, nouvellement soucieux de développer leur
coquetterie et de prendre soin de leur
apparence, cherchaient à imiter les filles,
c’est narine contre narine sous la tempête
de neige qu’ils réinventaient l’art du baiser esquimau.
Il y avait aussi, sous l’enveloppe de plastique qui contenait les enregistrements
de la voiture, un petit grattoir à glace à
Mais souvent, lorsque la soirée se prolongeait, les réflexes du cousin s’émoussaient, tout comme l’arête, et lorsqu’une
nouvelle capsule virevoltait, elle emportait avec elle un petit bout de chair sanglant sous sa dentelure. Grimaçant alors
de douleur, sans dire mot, il offrait la
bouteille à sa compagne qui, de son côté,
pensait justement : « Comme il est généreux, comme il est doux avec moi ». Elle
émettait un petit cri en sentant la tiédeur
du sang sous ses doigts qui empoignaient
la bouteille fraîche. Avec le visage crispé
qui tentait de sourire, elle le dévisageait.
Au fond d’elle, elle savait qu’il avait mal.
Photo: Camille-Amélie Koziej Lévesque
Dans le coffre à gants de notre voiture,
il y avait le mouchoir américain, plus
large qu’un drap, que ma tante avait
utilisé pour essuyer le mascara qui descendait sur ses joues, délivré par les larmes
de joie que ses yeux ravis produisaient à
volonté en réalisant qu’elle traversait la
frontière pour rentrer au Québec. À côté
de ce mouchoir, se trouvait une carte du
métro de New-York qui sema un nouvel émoi dans la bonne figure ronde de
notre chère tante lorsqu’elle la découvrit,
avant de l’exhiber en s’esclaffant de notre
bêtise qui nous l’avait fait égarer, malgré
maintes quêtes infructueuses que nous
avions entreprises de façon systématique,
au moment précis où nous en avions besoin.
l’arête ébréchée, parce que le cousin l’utilisait souvent à l’époque des capsules
non-dévissables afin d’ouvrir les bouteilles d’alcool doré qu’il consommait
toujours lorsqu’il mangeait des poutines.
Il empoignait alors le goulot fermement
d’une main, et de l’autre appuyait l’arête
du grattoir sous la capsule. Si la fille en
était à une de ses premières sorties, elle
le regardait avec de grands yeux ébahis
et avec la bouche grande ouverte voulant dire : « Mais qu’est-ce que tu fous ? »
L’autre souriait, fier, comme il avait souri
aux autres avant elle, avec l’air de vouloir
dire : « T’en fais pas, j’ai l’habitude ! » Et
il avait l’habitude, en effet. La capsule
s’envolait en opérant une jolie suite de
tire-bouchons, traversait par la fenêtre
ouverte avant de plonger vers le gravier
du ciné-parc.
Dans ces moments-là, chacune des filles
l’aimait, orgueilleux et adroit.
LA QUÊTE
Dans ces moments, elle l’aimait, piteux et
penaud.
Sous le grattoir à glace, il y avait maintenant un décapsuleur en métal léger,
qu’une des filles à la peau douce avait placé là pour éviter que mon cousin n’abîme
ses bandages, parce qu’elle en avait assez
de se faire caresser par une momie. Au
lieu de lui tendre le grattoir, elle lui tendait le décapsuleur neuf, encore étiqueté,
qu’il acceptait sans rechigner, affichant
même un sourire.
Il l’aimait ainsi, lorsqu’il la découvrait si
prévenante, aux aguets.
Dans le fond du réduit, il y avait aussi
la clé du coffre à gants. Mais jamais, au
grand jamais, nous ne trouvâmes de gants
dans ce coffre-là.
BERNARD ST-ONGE
23
Qui ?
Photo: Archives Web
qui désire s'allonger sur un banc de pluie
qui se sait plus fidèle qu'une épouse faite
de vase et d'herbes séchées
qui croit monter vers un ange outragé
(mais ayant franchi le mur du son)
qui descend aux enfers pour se
dévergonder et se gorger de Stabat Mater
qui rêve des autres que eux en veulent
qui se plaît à souhaiter deux ou trois
petites choses inutiles
qui lit à voix haute quand s'agenouille
le crépuscule
qui s'allongerait contre des corps
suppliciés démembrés damnés
qui soulage la mère des vierges
qui pourrit mais debout
Qui dit vivre parmi les feuilles
qui dit chanter dans l'ombre de ses
débris
qui pense à donner ce dont on s'éprend
qui songe aux mourants quand point le
jour
qui fait l'amour tel un poisson rouge
qui procède au décompte des nuits les
plus pieuses
24
qui branle-bas sous les amas de coutelas
qui brillance hors sa cage
qui bruits et neumes côté jardin
qui fatale morsure au fond des caveaux
qui débâcle quand on espérait
qui demain d'une astuce ou d'un tournis
qui flatulences et manèges
qui donc rebond où s'émouvoir
qui lenteur et ressort non point sommeil
qui claquement deçà la voix
qui mesure aux embouchures
qui tiroir de préférence à terroir
qui prélude ô finesse ô doigté
qui bouche prêtée pour l'accent
qui multiplication des amours de leurs
relents
LA QUÊTE
qui l'éclisse éclipse ellipse
qui devant le peu des regards
qui dans l'embrasure défraîchie
qui dedans les bouges par delà
qui dessous ses débarques
qui en la mer sur les pavés du rêve
qui pour quoi dites-le-moi
qui à la cantonade
qui autour
qui Neruda Pablo Dorion
Hélène Marlowe Christopher
qui Nelligan qui Gaston Miron Denise
Désautels
qui wiegenlied
qui quoi
qui l'échouerie de ces îles inventoriées
contre la tempe
qui cette fragrance d'eau de mer toute
verdâtre
qui ça
qui :
conque à la coque translucide.
J.-P. D.
LE POÈTE DE LA RUE
OCTOBRE 2014
Photo: Camille-Amélie Koziej Lévesque
SOUDAIN TOUT LE VENT
soudain
tout le vent
m’envole
au-delà des glaces
qui se dispersent en éclats de lumière
soudain
la montée des neiges
m’écrase
telle une souche enfouie
sous la neige
tout demeure
tout passe
même ce qui reste gelé
dans les eaux noires
tout m’étiole
même si la clarté du soleil faiblit
tout n’est pas perdu
car la chaleur profonde de la pierre
d’hier
devient l’éclat de cœur d’aujourd’hui
soudain
tout le fleuve
m’enclave
puis me fracasse sur cette pierre
et me fissure sur cette plage
que dire de la fragilité d’être nu
les mots dits
me colorent la peau
l’union du bronze et de l’or
réconcilient nos divergences
soudain
tout l’amour
sort sur les balcons au printemps
et les midis en ville
résonnent plus fort que l’angélus
que dire d’une joie d’une légèreté
comme une aile
qui m’ancre dans l’air
OCTOBRE 2014
beaucoup de gens
s’allègent d’un poids immense
en pratiquant une activité légère
comme cette infirmière
à la voix blanche
qui traverse un boulevard
sur la pointe des pieds
telle une ballerine
soudain
tout le chagrin
me dévisage
et mes larmes corrosives
me percent les yeux
m’aveuglent
tout m’enserre
et nos mains nouées
dessinent mille et un paysages
impossible à contempler
même en pleine clarté
tout le ciel
m’échappe et m’incite
à rester en bas
très loin mais pas trop
dans l’ombre paisible
de ce bois intime
rempli de murmures
soudain
tout le bonheur
aplanit les obstacles
avec ardeur avec passion
ne serait-ce qu’un instant
tout m’invisible
tout m’éclipse
comme une lune opaline
qui se boit
avec un morceau de pain
tout est clair-obscur
tout est présent
et absent à la fois
LA QUÊTE
comme une page blanche
comme le retour d’une lettre
sans destinataire
nous savons que l’épilogue
ne peut se confondre
avec le dénouement
et quelques fois
la conclusion est inattendue
tout m’électrifie
tout m’électrocute
une fois que le survoltage sera achevé
la conclusion n’aura pas de mots
épilogue
nous savons ce qu’il y a au-dedans
il y a ça
il n’y a pas ça
c’est bien
ce n’est pas trop ou très peu
c’est juste assez
nous irons cogner à la porte
de ce qu’il y a au-dedans
de ce qu’il n’a pas au-dedans
et celui qui vient ne porte pas de nom
on lui a enlevé aussi son prénom
il a une voix mais il n’a pas de voix
maintenant
nous savons ce qu’il est
nous savons ce qu’il n’est pas
FRANÇOIS GAGNON
25
Photo: Camille-Amélie Koziej Lévesque
Crème de Carême
L’homme qui paraissait ivre, parla avec
émotion à son fils, un garçonnet de dix
ans, devant la barrière appelée « barrière
du Maine » :
- Mon petit, pense à ton avenir. Nous
arrivons à une époque où avoir de l’esprit
permet de faire fortune. Et tu en es rudement pourvu. Nous devons nous quitter...
Avance devant toi avec ce que le Bon Dieu
t’a donné ».
Et l’homme, ouvrier de chantier et père
de vingt-cinq enfants, s’éloigna sans se
retourner.
*
*
*
Antonin Carême, à l’article de la mort en
janvier 1833, et bien que dictant à sa fille
Maria des recettes de cuisine pour son
encyclopédie de la cuisine, se souvient de
sa jeunesse : « Quoique mon père m’ait
littéralement jeté dans la rue, afin de me
sauver, la fortune m’a souri rapidement,
et une bonne fée m’a pris souvent la main
pour me mener au but ».
*
*
*
Né en 1783 à Paris, Antonin connaît la
faim et le froid à l’âge de six ans . À la fin
de ce printemps 1789, Paris se réchauffe
tant bien que mal, après un hiver rigou-
26
reux. La Seine avait gelé jusqu’à son embouchure, et les moulins, prisonniers de
la glace, ne tournaient plus : certains soirs,
il faisait – 18. Enfant de la rue du Bac,
Antonin aime très tôt les fêtes et les colonnes sculptées des façades parisiennes.
Le premier maître dont Carême parle,
c’est Bailly, qui l’embauche comme tourier. Devant son tour à pâte, ou table,
Carême travaille avec son rouleau avec
minutie : la pâte parfaite s’obtient après
des mois, après des années de travail.
À la Restauration, Carême fut demandé
par le tsar de Russie et le roi d’Angleterre
et termina ses jours chez les Rothschild.
Avec Carême, déguster un plat, s’abandonner à un dessert, c’était aussi goûter
à l’Histoire et examiner ses effets sur nos
sens et nos âmes. En un mot comme en
mille : manger était faire acte de connaissance.
LAURENCE DUCOS
Si Carême n’est pas rebuté par les difficultés, il est avant tout curieux : il cherche, il
modifie les recettes ou bien les gestes que
le professionnel répète tous les jours. Il
fait confiance aux surprises de son four.
En faisant un jour ses tourtes et ses petits
pâtés, il eut l’idée de faire un couvercle
d’une forte rondelle de pâte crue. Son
collègue fournier lui dit : « Antonin, elle
vole au vent ! » La tour avait un sommet
penché, comme la tour de Pise. Antonin
la rendit droite : le vol-au-vent était né.
Carême inventa le mille-feuille, la
charlotte, le petit four, mais aussi les
pièces-montées pour lesquelles il s’était
inspiré des ruines antiques de Rome,
Palmyre… Il décréta : « Les beaux-arts
sont au nombre de cinq : la peinture, la
sculpture, la poésie, la musique, l’architecture laquelle a pour branche principale
la pâtisserie ».
LA QUÊTE
OCTOBRE 2014
Ressources
Aide sociale
ADDS
Association pour la défense des droits sociaux
301, rue Carillon, Québec
Tél. : 418 525-4983
Maison de Lauberivière
Centre de jour
401, rue Saint-Paul, Québec
Tél. : 418 694-9316
[email protected]
Relais d’Espérance
Aider toute personne isolée et en mal de vivre
1001, 4e Avenue, Québec
Tél. : 418 522-3301
Rendez-vous Centre-ville
Centre de jour
525, rue St-François Est
Tél. : 418 529-2222
Rose du Nord
Regroupement des femmes sans emploi
418 622-2620
www.rosedunord.org
Aide aux femmes
Centre femmes d'aujourd'hui
Améliorer les conditions de vie des femmes
1008, rue Mainguy, Québec
Tél. : 418 651-4280
[email protected]
www.centrefemmedaujourdhui.org
Support familial Flocons d'espoir
Écoute et aide matérielle pour les femmes enceintes
340, rue de Montmartre, sous-sol, porte 4, Québec
Tél. : 418 683-8799 ou 418 539-2939
[email protected]
Violence Info
Sensibilisation, information et intervention pour contrer la
violence conjugale et la maltraitance envers les aînées.
[email protected]
www.violenceinfo.com
Alphabétisation
Alphabeille Vanier
235, rue Beaucage, Québec
Tél. : 418 527-8267
[email protected]
Alpha Stoneham
926, rue Jacques-Bédard, bureau 202
Tél. : 418 841-1042
[email protected]
www.alphastoneham.com
Atout-lire
266, rue Saint-Vallier Ouest, Québec
Tél. : 418 524-9353
[email protected]
www.atoutlire.ca
Lis-moi tout Limoilou
798, 12e Rue, 1e étage, Québec
Tél. : 418 647-0159
[email protected]
La Marée des mots
3365, chemin Royal, 3e étage, Québec
Tél. : 418 667-1985
[email protected]
www.membre.oricom.ca/lamareedesmots
Détresse psychologique
Centre de crise de Québec
Tél. : 418-688-4240
[email protected]
www.centredecrise.com
Centre de prévention du suicide
1310,1re avenue, Québec
Tél. : 418 683-4588 (ligne de crise)
www.cpsquebec.ca
Communautés solidaires
5, rue du Temple, Québec
Tél. : 418 666-2200
[email protected]
www.communautessolidaires.com
Tel-Aide Québec
Tél. : 418 686-2433
www.telaide.qc.ca
Tel-Jeunes
Tél. : 1 800 263-2266
www.teljeunes.com
OCTOBRE 2014
Entraide
Carrefour d’animation et de participation à un
monde ouvert (CAPMO)
435, rue du Roi, Québec
Tél. : 418 525-6187 poste 221
[email protected]
www.campo.org
Fraternité de l'Épi
Aide aux personnes vivant de l’exclusion par la création
d’un lien d’appartenance
575, rue Saint-François Est
Tél. : 418 523-1731
Hébergement
Maison de Lauberivière
Pour hommes et femmes démunis ou itinérants
401, rue Saint-Paul, Québec
Tél. : 418 694-9316
[email protected]
www.lauberiviere.org
L'Armée du Salut et La maison Charlotte
Hébergement hommes
14, côte du Palais, Québec
Tél. : 418 692-3956 poste 1
Hébergement femmes
5, rue Mc Mahon, Québec
Tél. : 418 692-3956 poste 2
www.armeedusalut-quebec.ca
Maison Revivre
Hébergement pour hommes et femmes
261, rue Saint-Vallier Ouest, Québec
Tél. : 418 523-4343
[email protected]
www.maisonrevivre.net
SQUAT Basse-Ville
Hébergement temporaire pour les 12 à 17 ans
97, rue Notre-Dame-des-Anges, Québec
Tél. : 418 521-4483
[email protected]
www.squatbv.com
Gîte Jeunesse
Hébergement temporaire pour garçons de 12 à 17 ans
Résidence de Beauport
2706, av. Pierre Roy, Québec
Tél. : 418 666-3225
Résidence de Ste-Foy
3364, rue Rochambau, Québec
Tél. : 418 652-9990
YWCA
Hébergement et programme de prévention de l’itinérance
et de réinsertion sociale pour femmes (La Grande Marelle)
855, av. Holland, Québec
Tél. : 418 683-2155
[email protected]
www.ywcaquebec.qc.ca
Réinsertion sociale
Maison Dauphine
Pour les jeunes de 12 à 24 ans
31, rue D’Auteuil, Québec
Tél. : 418 694-9616
[email protected]
www.maisondauphine.org
Prostitution
La Maison de Marthe
75, boul. Charest Est, CP 55004
Québec (Québec) G1K 9A4
Tél. : 418 523-1798
[email protected]
www.maisondemarthe.com
P.I.P.Q.
Projet intervention prostitution Québec
535, av. Des Oblats, Québec
Tél. : 418 641.0168
[email protected]
www.pipq.org
Soupe populaire
Café rencontre Centre-Ville
Déjeuner et dîner
796, rue St-Joseph Est, Québec
Tél. : 418 640-0915
[email protected]
www.caferencontre.org
LA QUÊTE
Maison de Lauberivière (Souper)
401, rue Saint-Paul, Québec
Tél. : 418 694-9316
[email protected]
Soupe populaire Maison Mère Mallet (Dîner)
745, Honoré-Mercier, Québec
Tél. : 418 692-1762
[email protected]
Santé mentale
La Boussole
Aide aux proches d’une personne
atteinte de maladie mentale
302, 3e Avenue, Québec
Tél. : 418 523-1502
[email protected]
www.laboussole.ca
Centre Communautaire l'Amitié
Milieu de vie
59, rue Notre-Dame-des-Anges, Québec
Tél. : 418 522-5719
[email protected]
www.centrecommunautairelamitie.com
Centre d’Entraide Émotions
3360, de La Pérade, suite 200, Québec
Tél. : 418 682-6070
[email protected]
www.entraide-emotions.org
La Maison l'Éclaircie
Troubles alimentaires
2860, rue Montreuil, Québec
Tél. : 418 650-1076
[email protected]
www.maisoneclaircie.qc.ca
Le Pavois
2380, avenue du Mont-Thabor, Québec
Tél. : 418 627-9779
Téléc. : 418 627-2157
Ocean
Intervention en milieu
Tél. : 418 522-3352
Intervention téléphonique
Tél. : 418 522-3283
Parents-Espoir
Soutien et accompagnement des parents
363, de la Couronne, bureau 410, Québec
Tél. : 418-522-7167
Service d'Entraide l'Espoir
125, rue Racine, Québec
Tél. : 418 842-9344
[email protected]
www.service-dentraide-espoir.org
Relais La Chaumine
850, 3e Avenue, Québec
Tél. : 418 529-4064
[email protected]
www.relaislachaumine.org
TOXICOMANIE
Al-Anon et Alateen
Alcoolisme
Tél. : 418 990-2666
www.al-anon-alateen-quebec-est.ca
Amicale AlfA de Québec
75, rue des Épinettes, Québec
Tél. : 418 647-1673
[email protected]
www.amicale-alfa.org
Point de Repères
225, rue Dorchester, Québec
Tél. : 418 648-8042
www.pointdereperes.com
VIH-SIDA
MIELS-Québec
Information et entraide dans la lutte contre le VIH-sida
625, avenue Chouinard, Québec
Tél. : 418 649-1720
Ligne Sida aide : 418 649-0788
[email protected]
www.miels.org
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LE GROS, LE GRAND ET LE PETIT
L’Australie chevauchait mes rêves depuis un bon moment. Un
genre de mirage lointain teinté de chaleur, de koalas touffus et de
bibittes. Un gros pays pour lequel j’ai creusé un petit sillon dans
le champ de mes souvenirs, au cours des deux derniers mois.
quelques pièces de monnaie.
Six dollars australiens plus tard, il m’a remis le Big Issue. Ce
magazine de rue tentaculaire qui émerge du Royaume-Uni. C’est
vrai qu’il est gros, qu’il a adopté un modèle d’affaires semblable
aux grands magazines de ce monde. Une visite rapide sur les
sites Web du magazine étale l’étendue du phénomène. Australie,
Afrique du Sud, Angleterre, Japon (et autres) ont un Big Issue
qui parsème leurs rues. Certains lui reprochent ce statut, cette
soif de grandeur, cet appétit du profit. Je me demande pourquoi.
Si la mission reste dans la mire, j’y vois du bon. Si les gens qui
y participent et les camelots en sont fiers, idem. Et s’ils s’identifient à ses pages et à ses couleurs, je suis pour la grandeur. C’est
l’itinérance qu’on doit faire régresser. C’est sa croissance qu’il
faut empêcher, pas celle des magazines de rue. Me semble.
Le vendeur m’apparaissait roux, grand et volubile. Si mon garçon n’était pas entré en transe colérique (sa mère a bu dans sa
bouteille d’eau sans obtenir son consentement), je serais probablement encore en pleine conversation avec lui. Il exhibait ce
regard de vieux routier qui lit dans les craques d’asphalte. Qui
perce l’esprit jusqu’au néant. Qui réconforte et sème le doute en
même temps.
Avec un accent qui décape le cérumen, il parlait de Brisbane et
de ses attraits. Pourtant. Il n’avait pas à nous vendre ses charmes,
nous étions déjà conquis. Cette ville serpentée d’une rivière
offre une rasade de bonheur aux touristes. Et aux autres. Ici, les
gens semblent heureux. Comme partout en Australie. Est-ce un
mirage causé par la chaleur ? Un effet secondaire d’une piqûre
d’araignée grosse comme une boîte de Kleenex ? J’ai fouillé dans
mon esprit à la recherche d’un semblant d’explication.
Le long de la côte est australienne, j’ai vu des centaines de gens
qui arpentent les épiceries pieds nus. Qui mangent au resto pieds
nus. Qui conduisent pieds nus. C’est peut-être l’absence de bas,
de sandales ou de souliers qui alimente le flux du bonheur. Puis,
je me suis demandé ce qui apparaît en premier chez l’Australien
moyen. Un regard estampillé de bonheur ou la corne en dessous
des pieds ? Et là, pour mettre un terme à la réflexion, j’ai sorti
De retour au pays, j’ai feuilleté La Quête. Comme on lit une lettre
d’amour enfouie dans un vieux coffre rouge. Comme on déguste
un sushi en six bouchées pour faire durer le plaisir. Comme on
flatte la tête de ses enfants en espérant qu’ils restent petits, en
sachant fort bien qu’ils vont grandir. Et que c’est correct ainsi.
Dans la vie, on grandit.
La petite Quête a un grand sillon de creusé dans mon cœur, juste
pour elle. Et je suis tellement heureux de la voir grandir, elle
aussi.
6- Pari. Assemblage de fils repliés sur eux-mêmes et attachés de telle sorte qu’ils ne se mêlent
MATHIEU MEUNIER
pas (HAUCEVEE). Récemment amputée de la Crimée.
7- Amasser. Se dit d’un travail qui rapporte de l’argent.
8- Selon la chanson, elles sont longues à Winnipeg. Jeune femme espagnole. Métal blanc et
solide, léger et bon conducteur.
9- Père et fils, tous deux acteurs, sont prénommés Kirk et Michael. Tenue de soirée pour
homme
par un revers
soie. Inscription
ou dessin
effectué
sur un mur.
10.
Faux.caractérisé
Contrairement
à la de
croyance
populaire,
le mot
« césarienne »
n’a
SOLUTION DE PARLER POUR PARLER
1. a. Les yézidis, appelés aussi yazidis, sont les adeptes du yézidisme, une
religion monothéiste qui plonge ses racines dans l’Iran ancien; le principal
lieu de culte yézidiste est situé dans le Kurdistan irakien.
rien à voir avec Jules César. Ce mot vient du latin caedere qui veut dire :
10-couper.
Agent chargé
d’une mission
de danser
en rond. Cérémonial.
On trouve
dans la(ISESERAMI).
même familleÉvite
le mot
« césure ».
SOLUTION
SOLUTION LES MOTS CROISÉS
2. Ce sont les Gazaouis.
3. Vrai. Ces trois mots appartiennent à la famille étymologique de
« certes ».
4. Le paludisme.
5. b. Ces mots nous viennent du latin.
6. c. Une fleur immarcescible ne peut se flétrir. Des chercheurs brésiliens
ont trouvé une telle fleur, qu’ils ont appelée Jouvencia Cappilum (Fontaine
de Jouvence). Immarcescible s’oppose à marcescible.
7. Vrai. Les deux signifient : faire taire une personne, la remettre à sa place.
8. Faux. Placoteux (ou placoteur), qui signifie « bavard », ainsi que placotage et placoter figurent bel et bien dans le Petit Larousse ou le Petit Robert.
9. Le chameau blatère.
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« Quand il faisait bon
être sans-abri »
Ce que veut Capo ce n'est pas la toute dernière iBox 6, summum
du logis, de loin supérieur au taudis de la dernière génération
(même avec les mises à jour de rabat à ses pieds et la protection
antifuite, ça ne l'empêche pas de partir au vent), ce qu'il veut
c'est simplement de la chaleur. De la chaleur avec le froid qui
approche, mais également de la chaleur humaine.
____________
Photo: Archives Web
Si cette histoire est un mélange de présent de l'indicatif, de passé
simple et composé ou tout autre temps imparfait, il n'en reste
pas moins que ce matin le froid a eu le dessus sur Capo.
Capo vit dans la rue. C'est un sans-abri, un SDF, un oublié des
fonds de ruelles.
Capo, bien sûr, ce n'est pas son vrai nom. Ça, il l'a gardé pour
lui ou il l'a peut-être seulement oublié. Qu'importe, maintenant,
c'est Capo.
Il m'a raconté qu'il vivait dans la rue depuis plusieurs années,
des années qu'il ne compte plus. Il est meilleur pour calculer les
Celsius. Plus précis que le mercure, son épiderme sensible ne se
trompe jamais sur le temps qu'il fait.
Puis, il s'est mis à parler du passé. « Le bon vieux temps ! »,
comme il le disait dans sa barbe couleur neige de bord de trottoir. « Quand il faisait bon être sans-abri ! »
« Avant, les gens donnaient à ceux qui vivaient dans les
rues. Maintenant ils n'ont plus les moyens. Pas qu'ils
manquent de sous, non ! C'est que les sous ne sont
plus réels dans leurs poches.
Les gens se promènent avec leurs cartes de pétrole
transformées de seize chiffres à argent virtuel. Ils n'ont
même plus un sou noir, eux qui sont disparus en espérant faire disparaître la pauvreté du même coup.
Bientôt, ça va être quoi ? Les gens vont pouvoir payer
avec leur téléphone ? » lâcha Capo d'un ton ironique.
« Non quand même pas... je ne crois pas que la société
pourrait évoluer autant alors que nous sommes des
milliers à habiter dans des boîtes de carton. Ce serait
totalement absurde », répliqua-t-il.
Capo vivait dans la rue. C'était un sans-abri, un SDF, un oublié
des fonds de ruelles.
Capo, bien sûr, ce n'était pas son vrai nom. Ça, il l'a gardé pour
lui ou il l'a peut-être seulement oublié. Qu'importe maintenant,
car Capo nous a quittés.
Nous vivons dans une société instagramée de hashtag, qui infuse
son propre cocktail de cellules cancéreuses dans ses veines de
fibres optiques. Dans une société paradoxalisée par des communautés facebookiennes aux notifications intempestives qui font
vibrer ses téléphones que l'on ose qualifier d'intelligents de par
cette faculté qu'ils ont de contrôler et de diriger.
Nous oublions parfois trop facilement que le monde est bien
plus que des écrans.
Nous oublions que certains n'en possèdent pas et, comme dirait
Dédé, qu'ils ne sont « qu'un beau sujet pour le show des nouvelles ».
Au Québec, il y a plus de 30 000 sans-abri.
Je ne vous demande pas de les héberger ou de leur donner vos
économies, mais simplement d'avoir une petite pensée pour eux
avec le froid qui approche.
Donnez votre vieux manteau ou une de vos huit tuques, une
vieille couverture ou des chandails que vous ne voulez plus, car
trop démodés.
Et si le cœur vous en dit, pourquoi ne pas participer à la Nuit des
sans-abris, le 17 octobre prochain, afin de « donner un p´tit brin
de chaleur à ceux qui ont l´hiver raide dans le cœur » ?
Car au final, il ne fait jamais bon être sans-abri.
KÉVIN BESNARD
C'est à ce moment que j'ai compris que cet homme, que l'on
définit par quelque chose qu'il ne possède pas (de la même façon
qu'on pourrait nommer quelqu'un un sans-jambe ou un sans
émotions fixes), ne demandait pas grand-chose.
OCTOBRE 2014
LA QUÊTE
29
TREIZIÈME ÉDITION
LA NUIT DES SANS-ABRI !
déguster la soupe : s’asseoir et accepter
d'échanger.
Crédit: Suzie Genest
L'équipe de Graff 'Cité, issue du Carrefour jeunesse-emploi de la Capitale-Nationale, étalera ses talents artistiques sur
des cubes géants et vous offrira la chance
de vous initier à cette forme d’expression
urbaine.
monsaintroch.com
Bibliothèque vivante, parcours des lieux
d'errance, atelier de graffitis, pour ne
nommer que ces activités, font partie de
la programmation fort originale qu'ont
concoctée les organisateurs de la treizième édition de la Nuit des sans-abri
(NSA). Le 17 octobre, les citoyens de
Québec, pas seulement ceux de la BasseVille, sont invités à se rendre à la Place de
l'Université-du-Québec (parc St-Roch)
afin de réfléchir ensemble à ce phénomène qui prend de plus en plus d'ampleur dans notre ville : l'itinérance.
DE LA SENSIBILISATION
LUDIQUE
Le visage le plus connu des sans-abri : une
personne un peu croche qui tend la main
au coin de la rue. Derrière cette réalité
bien visible se cache une multitude de
formes d’itinérance. De la femme obligée de cohabiter avec un conjoint violent
pour ne pas se retrouver sur le pavé à la
personne âgée qui erre de ressources à
ressources pour ne pas succomber dans la
rue, le prisme de l'itinérance est large et
surtout largement méconnu. La Nuit des
sans-abri offre une occasion exceptionnelle de découvrir les facettes cachées de
l'itinérance et d'échanger avec ceux qui
en sont victimes. Pour comprendre, rien
de mieux que de passer de l'autre côté du
miroir...
À 17 h, tout sera en place dans le parc
St-Roch pour lancer les activités de sensibilisation. Parmi celles-ci, mentionnons
la très originale Bibliothèque vivante :
empruntez une personne plutôt qu'un
livre! Voilà une chance inouïe d’écouter,
entre autres, d’ex-itinérants raconter leur
parcours — tumultueux, faut-il le préciser — de vie. Plus que de les entendre,
vous pourrez, installé dans un petit salon
propice à la discussion, poser toutes les
questions que vous désirez à ces « livres »
qui parlent!
LIBÉREZ VOTRE PLACARD
Libérez votre placard des vêtements d'hiver que vous ne portez plus et offrez-les
à ceux qui n'ont pas les moyens de s'en
payer! Avant le 13 octobre, allez porter
vos surplus dans l'un des points de service de L'Armée du Salut (1125, de la
Canardière, du lundi au samedi, de 8h à
16h ou 14, Côte du Palais, 7/7 jours, de 8h
à 20h). Mentionnez qu'il s'agit d'un don
pour la Nuit des sans-abri !
30
Dès 16 h, le Regroupement d’éducation
populaire en action communautaire des
régions de Québec et Chaudière-Appalaches (RÉPAC 03-12) manifestera devant l'Assemblée nationale dans le cadre
de la Journée internationale pour l’élimination de la pauvreté! Les manifestants
se dirigeront ensuite vers le parc St-Roch
afin de tenir un kiosque d'information et
de soutenir pacifiquement la NSA.
Comment satisfaire une envie aussi primaire que d’aller à la salle de bain quand
on est confiné à la rue? Les sans-abri déploient des trésors d’imagination pour
répondre à leurs besoins de base. Curieux
d'en savoir plus? Suivez le Parcours des
lieux d’errance, un itinéraire qui vous
surprendra.
Sous forme de speed-dating, Le temps
d’une soupe offre l'opportunité de discuter librement avec des gens comme vous,
qui ont eu envie d'en savoir plus sur ce
phénomène de société, mais aussi avec
des intervenants qui travaillent aux quotidiens avec les démunis et, évidemment,
avec des itinérants. La condition pour
LA QUÊTE
Des prestations artistiques, l’exposition de photos — Itinérance à travers
le monde, la distribution de nourriture
et de vêtements chauds font également
partie du programme. Les plus résistants
(!) pourront enfin participer à la vigile
de solidarité qui se déroulera de 23 h au
petit matin.
La NSA, c’est un gros party de sensibilisation : toutes les activités visent à favoriser
l’ouverture à la différence, l’échange et
une meilleure compréhension de ce phénomène — l’itinérance — dont personne
n’est à l’abri !
FRANCINE CHATIGNY
DÉFI 18/2
Les organisateurs de la NSA vous mettent
au défi de plonger, de manière officielle,
dans cet univers, en vous inscrivant au
défi 18/2. Ici, pas question d’amasser
des sous ou de vous asperger de quoi
que ce soit. Le défi consiste à vous engager à être présent dans le parc, de 18 h
à 2 h du matin, beau temps, mauvais
temps, de manière à ressentir l’obligation de rester dehors. Lancez le défi à vos
collègues de travail, amis ou membres
la famille, formez un groupe et inscrivez-vous auprès de Magali Parent au 418
694-9316 poste 287.
QUOI ? LA NUIT DES SANS-ABRI
QUAND ? 17 OCTOBRE 2014,
DE 17 H AU PETIT MATIN
OÙ ?
PLACE DE L'UNIVERSITÉ-DUQUÉBEC (PARC ST-ROCH)
COMMENT ?
EN PARTICIPANT
POURQUOI ?
PARCE QUE PERSONNE
N'EST À L'ABRI !
OCTOBRE 2014
LA
ème
13
NUIT
DES
SANSABRI
PERSONNE N’EST
À L’ABRI
RELEVEZ LE DÉFI 18/2
VENDREDI LE
17 OCTOBRE 2014
Activités dès 17h
Place de l’Université du Québec
Coin de la Couronne/Charest
www.raiiq.org
Michel Yacoub
Conseiller en sécurité financière
Conseiller en régimes d’assurances collectives
Représentant autonome
501, 14e Rue
Québec, Québec
G1J 2K8
Téléphone : 418 529-4226
Télécopieur : 418 529-4223
Ligne sans frais : 1-877-823-2067
Courriel : [email protected]
4$
No 168 Octobre 2014
S.V.P. n’achetez qu’au camelot portant une carte d’identification.
2 $ sur le prix de vente va directement au camelot.
Le magazine de rue de Québec
• Dix questions à
Normand Baillargeon
• Lettre à mes amis
cyniques
• Esprit critique en herbe
• Un système d’alarme
• La terre est plate
Découvrez mon histoire à
centraide-quebec.com
Concept : Publicis Montréal
Photographie : Shayne Laverdière
Maison de production : La Cavalerie
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2014-09-16 10:36