richard blass capturé chez sa blonde de la rue

PRINTEMPS 2013 – Vol. 8, No. 1 – www.histoireplateau.org
DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU
CONSTABLE BEAUDOIN
BRUTALEMENT
ASSAILLI
RICHARD BLASS CAPTURÉ CHEZ
SA BLONDE DE LA RUE FABRE
UNE PRINCESSE
EMPOISONNÉE
DES CHAMPIGNONS
MAGIQUES DANS LE
PARC LA FONTAINE
VOIR SOMMAIRE À LA PAGE 3
ÉVÉNEMENTS / PROJETS
de la Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-RoyaL
Conférences sur l’histoire de
femmes exceptionnelles
POUR FAIRE SUITE à une première conférence sur Robertine
Barry, donnée par Sergine Desjardins le 6 mars dernier
(voir résumé à la page 21), nous avons le plaisir de vous
annoncer pour ce printemps deux autres conférences sur des
d’insoumises.
Éva Circé-Côté par Andrée Lévesque
Le mercredi 10 avril à 14 h. Entrée gratuite.
LIBRE-PENSEUSE, iconoclaste, féministe,
Éva Circé-Côté (1871-1949), qui s’est
mariée à l’église Saint-Jean-Baptiste et
a habité le Plateau, a été une critique
intarissable des quatre premières
décennies du XXe siècle et a publié plus
de 1800 chroniques, tout en travaillant
à la mise sur pied de la bibliothèque de la Ville de Montréal.
Ses textes viennent à la fois dessiner le portrait d’une femme
de lettres et ressusciter son époque. Éva Circé-Côté y défend
la raison, la modernité, la séparation de l’Église et de l’État,
comme elle dénonce la corruption et le militarisme.
Judith Moreau de Brésoles par Guylaine Massoutre
Le jeudi 2 mai à 14 h. Entrée gratuite.
HOSPITALIÈRE de Saint-Joseph, cofondatrice de l’Hôtel-Dieu
de Laval (France), fondatrice et première supérieure des
religieuses hospitalières de l’Hôtel-Dieu
de Montréal, Judith Moreau de Brésoles
(1620-1687) s’enfuit du château paternel
à l’âge de 25 ans pour soigner les malades
à l’Hôtel-Dieu de La Flèche (Loir), où
elle apprend les secrets de la pharmacie.
Arrivée au Canada avec Jeanne Mance le 7
septembre 1659, Judith de Brésoles fut reconnue surtout pour
son travail d’apothicaire. Dans le jardin des Hospitalières, elle
cultive une grande quantité d’herbes médicinales, apportées
d’Europe ou aborigènes, pour fabriquer les médicaments
nécessaires aux soins des malades.
Lieu : Centre communautaire du Monastère, 4450, rue SaintHubert, salle Hilda Ramacière. Réservations : 514 563-0623.
Appel à tous :
recherche d’objets insolites du
Plateau
DANS LE CADRE d’une exposition à venir à Pointe-à-Callière,
le musée d’archéologie et d’histoire de Montréal, on est à
la recherche d’objets insolites qui illustrent la culture ou
l’histoire du Plateau. (Voir le communiqué du musée à la
page 20 du présent bulletin.)
Le journal Place publique au
Centre de documentation de la
SHGP
TOUS NOS REMERCIEMENTS à Andréanne
Foucault,
que le Centre puisse, grâce à la généreuse
collaboration du Centre d’écologie
urbaine, s’enrichir des archives de Place
publique, le journal communautaire diffusé
sur le Plateau entre 1994 et 2006. Fondé
par Dimitri Roussopoulos, économiste,
politologue, éditeur et environnementaliste,
responsabilité et l’engagement citoyens.
Publié à la fois en français et en anglais, Place publique abordait
tous les thèmes liés à la vie de quartier : patrimoine et histoire,
enjeux urbains et environnementaux, logement et pauvreté,
Place publique
comporte 13 volumes totalisant plus de 200 numéros, soit la
collection presque complète qui sera bientôt reliée et offerte
en consultation aux amateurs d’histoire et aux chercheurs.
Nous nous réjouissons de cette acquisition, qui témoigne
éloquemment de la vitalité communautaire qui a cours sur le
Plateau, et nous offrons nos plus chaleureux remerciements à
M. Roussopoulos et au Centre d’écologie urbaine.
Don de livres d’histoire
LA SHGP remercie les Sœurs Grises pour leur don de livres
d’histoire. Des titres tels que Jeanne Mance au Canada
(1937), Le Curé Labelle (1930) et Laurier, sa vie, ses œuvres
(1919) viennent enrichir notre centre de documentation.
Nous tenons à remercier également Paul-André Linteau,
historien réputé, pour son don de 22 livres d’histoire, dont
trois de ses propres livres et quatre écrits en collaboration.
Tous sont disponibles pour consultation à notre centre de
documentation situé au 4450, rue Saint-Hubert, local 323.
Tél. : 514 563-0623.
Nos coordonnées
SOCIÉTÉ D’HISTOIRE ET DE GÉNÉALOGIE
DU PLATEAU-MONT-ROYAL
Centre de services communautaires du Monastère
4450, rue Saint-Hubert, local 323, Montréal H2J 2W9
[email protected]
La SHGP a été fondée le 8 janvier 2006
et est membre de la Fédération des Sociétés d’histoire du Québec.
La SHGP est un organisme de bienfaisance,
numéro 85497 1561 RR0001.
page 2 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013
Éditorial
Sommaire
Événements / Projets
de la SHGP ........................... 2
Éditorial
Richard Ouellet ......................... 3
NOUS AUSSI, ON A
NOTRE COMMISSION
D’ENQUÊTE
Meurtre au Lutin qui bouffe
Kristian Gravenor ..................... 4
La police de quartier en 1888
Marielle Signori ........................ 6
Historique des postes de
police .................................... 6
Roch Beaudoin, policier
Huguette Loubert ....................... 7
Richard Ouellet
[email protected]
Président, SHGP
CHARBONNEAU
fascine le Québec depuis
le début de ses audiences
au printemps 2012. On ne vous
cachera pas que les travaux de cette
commission d’enquête nous ont
inspirés dans le choix du thème du
présent bulletin.
LÀ OÙ IL Y A de l’homme, il y a de
l’hommerie, disait saint François de
Sales. Une enquête sur la police en
1910 nous révélait que les élections
municipales auraient été arrangées
dans le quartier Saint-Jean-Baptiste.
Qui l’eut cru? Des scandales
politiques à la mairie de Montréal!
L
A COMMISSION
Gabriel Deschambault ................ 8
Des champignons magiques
Gabriel Deschambault ................. 9
La princesse empoisonnée
Kevin Cohalan ......................... 10
Huguette Loubert ..................... 12
Faits divers en « crime »!
Robert Thériault ....................... 13
Spectaculaire évasion de
Blass Marielle Signori ............ 14
Bombe du FLQ
Marielle Signori ....................... 14
Docteur Wilfrid Derome
Marielle Signori ....................... 15
Enquête sur la police
Huguette Loubert .................... 16
L’ancienne Cour juvénile
Marielle Signori ....................... 17
LE PLATEAU-MONT-ROYAL n’y
échappe pas. Le territoire fut le
théâtre d’événements dignes des
Mont-Royal dans les années 50, à
la bombe du FLQ dans les années
60 ou à la capture de Richard Blass
dans les années 70, rue Fabre. Parmi
les personnages qui ont retenu
notre attention, mentionnons le
docteur Derome, pour son expertise
judiciaire dont le FBI faisait appel,
ou encore Roch Beaudoin, policier et
patrouilleur à Montréal du 19e siècle,
dont le souvenir est toujours cher à
lire dans le présent bulletin.
L’HISTOIRE du corps policier et de
la criminalité dans le Plateau a fait
partie de la vie de nos parents, nos
grands-parents et nos ancêtres.
Souvenons-nous
et
rendons
hommage aux victimes d’actes
criminels. Et pourquoi pas faire un
clin d’œil au défunt journal Allô
Police qui nous a inspirés pour notre
page couverture?
MERCI
à
Jean-Luc
Trudel,
illustrateur, pour sa maquette de la
page couverture, aux rédacteurs et
à Jean-Marc De Nobile, responsable
du Musée de la police de Montréal,
pour sa collaboration au présent
numéro.
Vol au dépanneur
Marielle Signori ....................... 19
Pointe-à-Callière .............. 20
Conférence sur Robertine
Barry Huguette Loubert .......... 21
Guibord ou Gilford?
Justin Bur .............................. 22
hef :
Kevin Cohalan, Micheline Émond
Infographie : Jean-Luc Trudel
Jutin Bur, Kevin Cohalan, Gabriel Deschambault, Kristian Gravenor,
Huguette Loubert, Richard Ouellet, Marielle Signori, Robert Thériault
Conseil d’administration : Richard Ouellet, président, Huguette Loubert, vice-présidente,
Marie-Josée Hudon, secrétaire, Robert Ascah, trésorier, Kevin Cohalan, Gabriel Deschambault,
Jimmy Di Genova, Ange Pasquini et Marielle Signori, administrateurs
Webmestre :
Myriam Wojcik
Convocation
à l’AGA 2013 ...................... 23
Le bulletin est publié quatre fois par année, les 21 mars, juin, septembre et décembre.
Devenez membre ................. 24
Dépôt légal : Archives nationales du Québec et Bibliothèque nationale du Canada.
La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 3
DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU
RUE SAINT-GRÉGOIRE
GERTRUDE SERVANT ET LE HOLD-UP
RATÉ AU LUTIN QUI BOUFFE
Kristian Gravenor
L
e crime montréalais
le plus retentissant
des années 1950
a eu lieu durant la nuit
du 18 au 19 janvier
1953, au 753, rue SaintGrégoire, à quelques
Joseph et Saint-Hubert.
plus grand-chose à cet
autrefois le site du
célèbre restaurant Au
Lutin qui Bouffe, dont le
truc consistait à prendre
des photos des clients
tendant un biberon
de lait à un véritable
cochonnet.
Le propriétaire maLadif, B.J.
McAbbie, 59 ans, alias Burt (ou Bert)
McAbbie, était un adepte de la chasse.
On prétendait qu’il gardait jusqu’à
10 000 $ dans son coffre-fort. Cette
nuit-là, quatre hommes et une femme
orchestrent une ruse. La femme
va souper au restaurant et oublie
intentionnellement son sac à main aux
toilettes. Au moment de la fermeture,
son prétendu mari téléphone, disant
qu’il allait passer sans tarder pour
récupérer le sac. Quatre hommes se
présentent, dont l’un est en tenue de
femme. Le propriétaire n’est pas dupe
et porte une arme à feu. Une bagarre
s’ensuit, on frappe McAbbie avec
Le restaurant Au Lutin qui bouffe (collection SHGP)
un pistolet, une balle part et
celui-ci est blessé à la tête. Il
meurt deux jours après, mais
non sans avoir raconté son
histoire à la police. Les cinq
voleurs se partagent 4000 $,
beaucoup moins qu’espéré.
Gerry mcKuhen, le petit
ami de Gertrude Servant, est
immédiatement soupçonné.
Or, il s’est déjà enfui et
Gertrude refuse de dire quoi
ville, où il a fait l’erreur de
signer du pseudonyme qu’il a
utilisé lors de sa conversation
ont trouvé sa chambre et
recherché ses empreintes —
Gertrude
Servant
de l’escouade des homicides,
dirigée tout au long des
années 1950 par le détective
très en vue, Henry Bond.
(photo de The
Gazette, Montréal,
le 26 juillet 1954)
gardent en prison — en toute
illégalité — ne lui permettant même
pas de parler à son avocat pendant
deux semaines.
pLus tard, en Californie, un voyou
torontois, Jonathan Dawn, est arrêté
pour vol, et ses empreintes digitales
bande. La nuit du crime, Dawn a appelé
le restaurant d’un hôtel du centre-
une fois capturé, Dawn
n’hésite pas à dénoncer tous
ses complices. Mais McKuhen
demeure introuvable. La police dégote
son père, vivant sous un faux nom dans
mettent sur écoute et, après 18 mois,
retrace l’appel au Texas, où le chef
de la bande mène une nouvelle vie en
tant que père respectable et vendeur
de voitures marié à une ravissante
page 4 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013
Le petit cochonnet
(photo Coolopolis)
Avis de recherche
Service de Police de la Ville de
Montréal, le 13 février 1953
B.J. McAbbie
cochonnet
(Collection
Christian Paquin)
Allemande du nom d’Erika,
qui n’avait aucune idée que
son mari était recherché.
McKuhen est ramené à
Montréal en juillet 1954.
et qu’est-iL advenu de
Gertrude Servant, impliquée dans le complot
dès le départ? Elle est la
huitième d’une famille de
neuf enfants originaire de
la Gaspésie. Elle déménage
à Montréal alors qu’elle
est une enfant et fugue à
l’âge de 13 ans, ne tardant
pas à travailler comme
liftière à l’Hôpital général
de Montréal, aide-coiffeuse
à l’Hôtel Mont-Royal et
préposée au vestiaire dans
un club. En cours de route,
elle se lie d’amitié avec Luc
Baxter, un beau perceur
de coffres-forts. Elle se
transforme en femme fatale
et commence à sortir avec
un propriétaire de club,
déclarant à ses amis « Je sors
avec ce singe juste pour son
cash ». Elle se lie ensuite
avec Gerry McKuhen, un
escroc d’Irlande criblé
de balles. Elle est dans le
coup du hold-up au Lutin
qui bouffe depuis le début.
en juiLLet 1954, Servant,
alors âgée de 24 ans,
crochète une serrure à la
prison de la rue Fullum et
saute par-dessus un mur
(en compagnie d’une autre
détenue de 200 livres). Elle
ne jouit que brièvement
de sa liberté, avant d’être
capturée à nouveau. Son
procès débute le 13 octobre
1954, à la suite duquel elle
écope d’une peine de dix
ans. Sortie de prison en
1963, elle se trouve aussitôt
accusée de recel à cause
du butin trouvé dans son
appartement, mais n’est pas
trouvée coupable. On ignore
ce qu’elle est devenue par la
suite. Le reste de la troupe
est inculpée de meurtre,
mais évite l’échafaud en
marchandant un plaidoyer
d’homicide involontaire.
Kristian Gravenor est un journaliste montréalais, expert de la petite
histoire de Montréal et notamment de son monde interlope. La version
originale anglaise de cet article se trouve sur son blogue Coolopolis
(coolopolis.blogspot.ca). Il est l’auteur, en collaboration avec son frère
John David Gravenor, du livre Montreal: The Unknown City (Arsenal
Pulp Press, Vancover, 2003).
Traduction de Micheline Émond et Kevin Cohalan.
Le photographe montréalais Michel Campeau a retrouvé près de 500
photos prises au restaurant Au Lutin qui Bouffe au cours de 25 ans, avant
sa fermeture à la suite d’un incendie en 1972. Il en a publié plus d’une centaine dans la collection
in almost every picture, album #10 (Kessels Kramer Publishing, Amsterdam, Pays-Bas, 2011),
en vente à 40 $ à la boutique du Musée McCord. Une copie est disponible pour consultation au
Centre de documentation de la SHGP.
Plusieurs cartes postales du restaurant provenant de la Collection Christian Paquin sont
La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 5
DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU
ANGLE DULUTH ET COLONIALE
LA POLICE DE QUARTIER... EN 1888!
Marielle Signori
Membre du CA de la
SHGP
IL Y A EU plusieurs postes
de police sur le Plateau
Mont-Royal et nous pouvons facilement
saviez-vous qu’à partir des années 1887,
le service de police louait des maisons
postes, et ce un peu partout à Montréal?
C’EST AINSI qu’entre les années 1888 et
1899, le poste de police No 12 était situé
au 340, rue Saint-Hyppolite (maintenant
le 4026, Coloniale), à l’intersection de
la rue Saint-Jean-Baptiste (aujourd’hui
le 72-80, avenue Duluth Est). Cette
maison construite en 1885 est toujours
là, encore aujourd’hui. Cependant, on
n’y poursuit plus les criminels, mais
plutôt les goûts et les saveurs de la
bonne soupe maison, avec le restaurant
façade de pierres de taille au rez-dechaussée et ses pilastres sont ornés de
Ancien poste de police No
Soupesoup, avenue Duluth
(photo : Marielle Signori)
DANS LE BOTTIN Lovell de 1887-1888,
on remarque à cette adresse le nom du
sergent Isaïe Gauthier, ainsi que ses
adjoints, F. Beauregard et le sergent
intérimaire H. Spedding. Le sergent
Gauthier habite d’ailleurs l’étage
ferme et déménage au 1174 (aujourd’hui
le 4306) Saint-Laurent, près de Vallières,
dans une maison construite la même
année. Ce poste sera actif jusqu’en
1935, alors qu’il ferme pour des raisons
d’économie et le territoire est fusionné
au poste 20.
HISTORIQUE DES POSTES DE POLICE DU PLATEAU
No de poste
Emplacement
Ouverture
Fermeture
12 (1er)
Village de Saint-Jean-Baptiste, angle rues Saint-Jean-Baptiste (avenue Duluth depuis
1874) et Saint-Hyppolite (aujourd’hui avenue Coloniale)
1888
1899
12 (2e)
4306, boulevard Saint-Laurent (près de Marie-Anne et Vallières)
1899
1935
14 (1er)
1040, rue Rachel Est, angle rue Amherst (avenue du Parc-La Fontaine depuis 1901)
1892
1989
14 (2e)
1033, rue Rachel Est, angle avenue du Parc-La Fontaine
1989
Actuel poste de
quartier 38
15 (3e)
Quartier Saint-Denis, 333, rue Saint-Louis (avenue Laurier depuis 1906), angle rue
Saint-Denis
1879
1906
15 (4e)
Quartier Saint-Denis, 333, rue Saint-Louis (avenue Laurier depuis 1906), angle rue
Saint-Denis
1908
?
16 (1er)
Quartier Saint-Denis, 333, rue Saint-Louis (avenue Laurier depuis 1906), angle rue
Saint-Denis
1879
1906
19 (1er)
Village de De Lorimier, 2151, avenue Mont-Royal Est, angle avenue des Érables
1901
1941
20 (1er)
Ville de Saint-Louis (Mile-End), partie sud (1902), 5100, boulevard Saint-Laurent,
angle rue Saint-Louis (avenue Laurier depuis 1906)
1905
1979
21 (1er)
Ville de Saint-Louis (Mile-End), partie nord, 5501 à 5511, boulevard Saint-Laurent,
angle rue Beaubien
1902
1918
Remerciements à Jean-Marc De Nobile, responsable des communications au Musée de la police de Montréal. Tableau dressé par Richard Ouellet et Marielle
Signori.
page 6 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013
DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU
DOCUMENT FAMILIAL REMIS PAR UN RÉSIDENT DU PLATEAU
ROCH BEAUDOIN, POLICIER
E
À MONTRÉAL AU XIX SIÈCLE
Armand Beaudoin, né
en 1910, père de Michel
Beaudoin, fait sa première
communion dans un
nouveau costume,
Huguette Loubert
Vice-présidente de la
SHGP
et responsable
du Centre de
documentation
par sa grand-mère dans
son grand-père retraité.
M
BEAUDOIN,
dont la famille
habite le Plateau
depuis trois générations, a
remis à la SHGP un document
exceptionnel concernant son
arrière-grand-père,
Roch
Beaudoin. Ce document
est un article publié dans le
journal La Presse daté du 16
février 1910 et qui est depuis
conservé
précieusement
dans la famille. Il nous
raconte l’histoire de son aïeul
Beaudoin, policier à Montréal
pendant 48 ans. Il porte le
matricule 97 et il est sur le
point de prendre sa retraite
à l’âge de 71 ans. On le dit
de haute stature (il mesurait
plus de six pieds), et qu’il ne
semble pas vouloir courber
sous le poids des nombreux
jours vécus, a encore l’œil
vif, la mémoire alerte, le
geste rapide. Le même jour,
le journal La Patrie lui rend
aussi hommage.
ICHEL
ROCH BEAUDOIN, né à SaintRoch-de-l’Achigan,
entre
dans la police en 1862 alors
que la frontière de Montréal
se situe approximativement
à la hauteur de la rue Duluth,
voisine du territoire de
Coteau Saint-Louis où se
développent des villages
autour de la tannerie Bélair et
les carrières.
Mais ceux qui ont le plus de
chance d’être admis ont des
recommandations signées par
le curé, le maire et d’autres
VOICI, commenté, l’essentiel
de l’article de La Presse :
siennes sont signées par
l’honorable Louis Renaud,
homme politique et sénateur,
qu’il a servi comme cocher,
ainsi que plusieurs membres
connus de son entourage.
QUAND ROCH BEAUDOIN
postule
pour
devenir
constable, la Ville compte
alors 61 policiers. Mais cette
année-là, plusieurs postes
restent à combler suite à
des décès et des démissions.
Comme le travail est rare, plus
d’une centaine d’hommes
se présentent aux examens.
APRÈS
des
examens
sommaires, car il ne sait ni
lire ni écrire, a de bons bras,
, comme
le mentionne l’article, il est
engagé avec 36 nouveaux
membres pour le salaire
de 76 cents par jour. Le
mariage étant obligatoire, il
épouse deux mois plus tard
une demoiselle Grégoire de
Saint-Roch-de-l’Achigan,
son village natal.
LE TRAVAIL est exigeant, les
rondes à pied fort longues et,
à cause du nombre restreint
de policiers et des absences
fréquentes
de
ceux-ci,
chaque constable fait souvent
le travail de deux ou trois. Il
n’y a alors que trois postes
de police, soit Place JacquesCartier, Square Chaboillez et
rue Panet. Sa première ronde
a lieu sur les rues SaintUrbain et Dorchester (actuel
boulevard René-Lévesque).
PENDANT le séjour de la
garnison à Montréal, il doit
se rendre jusqu’à la ferme
Logan pour patrouiller. Il
fait partie d’un détachement
de 50 policiers qui a bien
failli se faire écharper par le
régiment qui y est stationné.
Il est alors bien connu que
les militaires abusent de leur
pouvoir et utilisent la
(Suite à la page 16)
La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 7
DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU
RÈGLEMENT DE COMPTES
LA MAFIA SUR LA RUE MONT-ROYAL…
BEN VOYONS DONC !
Gabriel Deschambault
Membre du CA de la SHGP
EN 2013, on trouve que
notre quartier est créatif
turbulent, mais dans les années 1970,
rare que sa vie était bousculée. Bien
Cette photo de 1961 nous
Royal à son époque de gloire.
CETTE HISTOIRE de meurtre
se déroule avenue du MontRoyal en mars 1972, en face
de l’église, près de la rue
Pontiac, au restaurant New
Miss Mont-Royal. Sa grande
annonce néon dit « mets
aussi le menu traditionnel du
restaurant de quartier de cette
époque : pizza, spaghetti,
charcoal steak, etc.
CE FAIT DIVERS, en apparence
des plus banals, ne l’est plus
du tout lorsqu’on prend
connaissance du contexte
abracadabrant entourant le
déroulement de l’histoire.
D’abord, il faut retourner en
août 1955, en Italie, en Sicile,
dans la ville de Cattolica
Eraclea.
GUISEPPE SPAGNOLO — un
paysan avec une forte
personnalité antifasciste et
un féroce militant syndicaliste en faveur des
droits
des
agriculteurs
— s’oppose aux
factions
locale qui défendent les
intérêts de la bourgeoisie
sicilienne qui exploite les
bonnes terres. Il dérange !
pas le rater, en plein dans
primes, mais le paysage
On trame donc son
élimination; ce qui est
vite fait. Mais la nuit du
meurtre, des carabinieri
en patrouille dans le
secteur remarquent trois
hommes cagoulés qui
fuient les lieux, dont
un qui est désarçonné
de son âne et qui abandonne
sa monture en cavale. La
police retrouve l’âne et par
conséquent son propriétaire,
Rosario
Gurreri,
que
l’on interroge alors avec
attention. Dans l’eau chaude,
pas participé à l’assassinat,
mais qu’il a prêté son âne à un
dénommé Giacinto Arcuri.
Celui-ci lui aurait avoué, le
page 8 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013
lendemain du meurtre, avoir
tué Spagnolo, en compagnie
de deux complices Leonardo
Cammalleri et Leonardo
Salvo. La police se met aux
trousses des trois compères,
mais sans succès.
ON DIT que les complices
auraient même été cachés
(Suite à la page suivante)
DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU
(suite de la page
précédente)
par le curé, qui n’aimait pas
beaucoup les communistes et
qui prétendait que Spagnolo
s’était suicidé ! La police
avait dit qu’il avait reçu
sept balles (ils ne voulaient
vraisemblablement pas rater
leur coup) !! Ils s’enfuirent
vers le Canada, mais furent
condamnés, in absentia, à la
prison à perpétuité en Italie.
Ils ne furent curieusement
que peu inquiétés ici. Gurreri,
quant à lui, purgea cinq ans
pour complicité et émigra au
Canada à son tour en 1962,
avec les conséquences que
l’on connaît maintenant.
LA POLICE montréalaise, en
découvrant dans la cuisine
de son restaurant son
corps lourdement amoché
et arborant une grosse
«
en une longue coupure au
visage, sévère mais pas
mortelle), ne fut pas longue à
considérer le meurtre comme
une vendetta des Siciliens de
Montréal, 18 ans plus tard. Il
n’y a pas que la justice qui a
le bras long.
MAIS quels sont les liens
avec l’actualité du crime
organisé montréalais de
2013? Simplement pour dire
que l’instigateur présumé à la
base du complot de Cattolica
Eraclea
était
Antonino
Manno, grand-père de Vito
Rizzuto. Quant à Leonardo
Cammaleri, c’était son beaupère.
AUJOURD’HUI,
le
temps
a passé. Les lieux sont
maintenant occupés par la
librairie L’Échange et, si
vous recherchez une bonne
histoire
policière,
vous
pourrez peut-être y dénicher
Grandeur et
misère du clan sicilien au
Québec d’André Cédilot et
André Noël, qui relate aussi
ces faits.
LE COIN DU BLOGUE
DES CHAMPIGNONS
MAGIQUES DANS LE PLATEAU?
Maintenant
sont plus
la chimie
la nature,
que les drogues
des produits de
moderne que de
la police fut très
champignons poussant au parc
La Fontaine, en plein cœur du
Jardin des Merveilles. Avec leurs
formes bizarres et multicolores,
on croyait bien avoir trouvé
magiques,
reconnus
pour
causer chez leurs utilisateurs
des
hallucinations
aussi
étranges que dangereuses.
EH BIEN NON! Pas vraiment!
Après
enquête,
les
champignons ne sont pas
magiques. Mais la magie
est tout de même au rendezvous.
toute la ville de Montréal).
C’est une destination obligée
pour les enfants sages (ou
encore ceux trop turbulents),
lors des beaux dimanches
après-midi d’été.
UN LECTEUR, monsieur Robert
Caron, m’a fait parvenir cette
belle photographie, parue
en couverture d’une édition
du Sélection de 1961. À ce
moment-là, le Jardin des
Merveilles est ouvert depuis
à peine trois ans qu’il est déjà
devenu une institution du
parc La Fontaine (et même de
LE DESIGN unique de cet
endroit et les thèmes traités
— par l’utilisation des
histoires et personnages de
contes pour enfants — en
font un véritable « parc
Il est aussi intéressant de
noter que l’ensemble avait
été créé et réalisé par les
Le coin du blogue de
Gabriel Deschambault
NDLR Le blogue publie des textes d’intérêt historique,
dont celui que nous reproduisons ici.
On peut consulter tous les textes en visitant le :
http://histoireplateau.canalblog.com/
services municipaux.
CE DOIT ÊTRE le côté
fantaisiste des concepteurs
qui explique les formes
comme ici avec l’arche
de Noé. Ce n’est pas
nécessairement l’effet des
champignons magiques de la
photo.
AU FAIT : pour ceux qui
s’intéressent à l’éléphant
du Jardin des Merveilles,
sachez qu’il est toujours
aussi fantôme et que je n’ai
pas encore réussi à mettre la
main sur une photographie
(appel à tous). Tout ce que
je sais, c’est qu’il s’agissait
d’un éléphant femelle, qui a
aujourd’hui 30 ans et qui loge
maintenant au zoo de Granby.
Son nom : SARAH. Elle
serait arrivée au parc en 1982
et l’aurait quitté en 1985 (il
s’agit vraisemblablement du
deuxième éléphant du parc).
La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 9
DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU
UNE ÉNIGME DU CARMEL
LA PRINCESSE EMPOISONNÉE
Kevin Cohalan
Membre du CA de la SHGP
ROYAL, MAIS UNE AUTEURE MÉCONNUE DU PLATEAU NOUS
C
’EST BERTHE SÉNÉCAL (18911972), Carmélite de Montréal
— en religion Sœur Berthe du
Carmel —, qui raconte succinctement
les faits, en énumérant les grandes
Carmélites de l’histoire de France :
Nous terminerons cette liste, dit-elle,
qui pourrait s’allonger encore, par la
plus illustre de toutes : Mme Louise
princesse, tout en étant très consciente
de ses faiblesses, adore son père, qui la
visite souvent au couvent. Elle cherche
dans les austérités du Carmel une voie
d’expiation pour lui et pour la France.
EN TANT QUE RELIGIEUSE, elle s’abstient
de se mêler de la politique — sauf quand
les intérêts de la religion sont en cause,
ce qui est souvent le cas quand, comme
elle, on considère toute opposition
au roi comme un quasisacrilège. En raison de sa
naissance, de sa vocation et
de ses convictions, et malgré
le cloître, Thérèse de SaintAugustin émerge en grande
au Carmel de Saint-Denis, en 1770, et
prit le nom de Thérèse de
Saint-Augustin… Pendant
dix-sept ans, elle fut un sujet
d’admiration par ses vertus
d’humilité, de prudence,
de douceur et d’aimable
gaieté. Elle mourut en
1787, empoisonnée par une
poudre mystérieuse qu’elle
respira en baisant des
reliques envoyées par des
inconnus qui en voulaient à
« Je suis en droit
sa vie…
LOUISE DE FRANCE, née en
1737 — sa mère, Marie
Leczynska,
épouse
de
Louis XV, avait eu dix
grossesses en dix ans —
est appelée « Madame
de naissance. (« Madame
la Carmélite est
plus heureuse dans
palais.»
(Frontispice de la
biographie de 1857
où la nouvelle de
est publiée pour la
là même qui, à ses beaux
jours, était à l’origine de
la fondation de Montréal).
Rendus à l’époque des
Lumières, les dévots avaient
perdu beaucoup de terrain
devant les philosophes : la
princesse voit la religion
comme
une
citadelle
assiégée. Elle consacre
une correspondance « aux
à sa défense, si bien que
sa nièce Marie-Antoinette
(1755-1793) est réputée
petite Carmélite la plus
son père.) Se démarquant de
Saint-Sulpice)
ses frères et sœurs par son
tempérament vif et joyeux,
elle est la première Fille de France EN NOVEMBRE 1787, le parti dévot
depuis cinq siècles à devenir religieuse. est épouvanté par un geste qui paraît
anodin aujourd’hui : la publication
DANS QUELLE MESURE la perte du Canada, par Louis XVI (1754-1793, neveu
et même l’effondrement de l’Ancien de Madame Louise) d’un édit de
Régime, sont-ils le fait de l’insouciance tolérance, restaurant aux protestants
de nombreux droits civiques. L’abbé
(1710-1774)? Impossible de le dire. La Proyart, futur biographe de la princesse,
déclare — prophétiquement? —, dans
un discours prononcé devant le roi,
« Aussitôt que vous aurez réhabilité
le protestantisme dans votre royaume,
votre trône se trouvera posé sur un
atterrée. La nouvelle, selon sa biographe
carmélitaine, est comme un glaive
de douleur qui pénétra son âme et la
plongea dans une angoisse mortelle.
Elle reçoit le même jour une enveloppe
portant l’inscription « Reliques du Père
Elle rompit le sceau, et vit un
gros paquet de cheveux tout recouverts
d’une poudre qui n’était que du poison.
l’avait aspirée, et en avait senti les effets
immédiatement. Elle n’en dit pas un
mot, et la portière la vit jeter vivement
le tout au feu. Madame Louise meurt un
mois plus tard, le 23 décembre 1787, à
la suite des semaines des souffrances
atroces. (Sa mort prématurée lui a peutêtre épargné un rendez-vous avec la
guillotine.)
SŒUR BERTHE SÉNÉCAL parle du
mystérieux empoisonnement à deux
reprises : dans un premier temps, dans
page 10 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013
l’œuvre de sa vie, la biographie Mère
Séraphine du Divin Cœur de Jésus.
Fondatrice et prieure du Carmel de
Montréal (1944), et par la suite, dans
l’opuscule Le Carmel. Son Histoire. Son
Esprit. Sa Vie (1949).
BERTHE SÉNÉCAL, née en 1891 dans
le quartier Saint-Henri de Montréal,
est l’une des premières bachelières
montréalaises et une musicienne
accomplie avant son entrée en 1914 au
Carmel de Montréal, dont
elle sera élue prieure en
1956. Bien que son nom
page titre — sa vie de Mère
Séraphine est anonyme —
et que son unique livre soit
le remaniement d’un autre
publié 36 ans auparavant,
elle mérite considération
comme une grande écrivaine
méconnue du PlateauMont-Royal. Son œuvre
transforme radicalement sa
source : chaque chapitre,
chaque paragraphe, chaque
accusés dans ce dernier cas étant les
Jésuites!). Un siècle plus tôt, « l’Affaire
Louis XIV. Madame Louise elle-même
écrivait dans sa dernière lettre, le 17
décembre : Depuis quelques jours, j’ai
des grands maux d’estomac, j’avoue que
c’est ma faute, j’ai le cœur trop sensible
et les nouvelles qu’on m’a apprises de
la révocation m’ont fait une peine dont
je ne suis pas la maitresse.
EST-CE QUE la vénération
des
religieuses
pour
Madame
Louise
les
induisait en erreur? Bernard
Hours essaie de résoudre
la question, en présumant
que son décès est dû à des
causes naturelles : « La mort
de Madame Louise, dit-il,
fut si rapide et si brutale
le milieu des années que les rumeurs les plus
extravagantes
coururent.
1950, pendant son
Pour les uns, l’édit de
priorat
novembre 1787 l’avait
(Photo gracieuseté du
leur
un livre nouveau qui respire lui-même
cet air de noble simplicité qu’il entend
conférer à son sujet.
L’HISTOIRE de l’empoisonnement n’est
qu’une anecdote que Sœur Berthe
raconte en passant. Où l’a-t-elle
prise? Pour les novices carmélitaines
de son époque, la lecture de la vie de
Madame Louise était recommandée, et
l’œuvre privilégiée était celle du Carmel
d’Autun, publiée en 1857, qui divulguait
cet épisode pour la première fois et se
trouvait présente dans la bibliothèque
du Carmel de Montréal. Le livre était
Stanislas Tourel avait été la novice de
Mère Raphaël, qui, elle, avait été la
novice de Madame Louise elle-même.
Pourtant, soixante-dix ans d’histoire et
des faits; et, pour les religieuses, la
tentation était forte de vouloir ajouter
aux autres titres de gloire de l’héroïne
celui de martyre.
POUR LA PLUPART, les biographes
de la princesse n’acceptent pas
l’empoisonnement comme un fait établi.
Proyart et Grandmaison n’en font pas
mention. De tels bruits étaient fréquents
à l’époque, ayant couru lors des décès
du Dauphin, le frère de Louise, en 1775,
et du Pape Clément XIV, en 1774 (les
Mère
avait
été
religieuses auraient pu bâtir de bonne
foi une légende « à partir d’un petit fait,
réel sans doute : peut-être un mauvais
plaisant avait-il jugé très spirituel de
faire une farce à Mère Thérèse de Saint
Augustin dont on connaissait bien la
MARTYRE OU NON, Madame Louise
est proclamée vénérable par Pie IX en
poursuit aujourd’hui.
SES DERNIERS MOTS, « qui résumaient
naturellement l’ardeur de son caractère
Dépêchons. Au galop! En paradis!
Quelques-uns de ses propos
AUCUNE MOROSITÉ chez Madame
Louise : autant par esprit que par
naissance elle est Fille de France.
Courir deux lièvres à la fois
VOICI SA RÉPLIQUE à l’ambassadeur
français à Rome, le Cardinal de Bernis
(1715-1794), qui voulait savoir, à propos
elle soutenait deux causes en même temps :
« Je voudrais de tout mon cœur que toutes
entendu dire qu’il ne fallait pas courir deux
lièvres à la fois. Vous verrez que ce sera
l’avocat du diable qui, inspiré par son rusé
client, aura levé ce second lièvre pour nous
donner le change et nous les faire manquer
tous deux. Il serait bien attrapé si cette
en donner deux pour un. Vous êtes bien
capable, Monsieur, de lui jouer ce tour, et
je vous avoue que je l’espère. Mais si cela
était impossible, travaillez uniquement
pour la vénérable mère Anne de Jésus, et
laissez là la vénérable mère Madeleine de
Saint-Joseph. Son tour viendra peut-être
ensuite, mais il faut que la mère passe
(Lettre de 1772)
Autoportrait
« Votre servante est fort petite, grosse tête,
grand front, sourcils noirs, yeux bleus gris
bruns, nez long et crochu, menton fourchu,
grasse comme une boule et bossue. On dit
cependant que depuis qu’elle est revêtue de
l’élégant habit du Carmel, il n’y paraît que
peu. Elle s’en moque, cela ne lui a jamais
rien fait depuis l’âge de raison. Du reste,
que vous ne voyiez en elle que son cœur qui
(Lettre à la Mère
prieure du Carmel de Bruxelles, 1783)
Voir les vies de Madame Louise par l’abbé Proyart (1793), le Carmel d’Autun (1857),
Geoffroy de Grandmaison (1907, ouvrage couronné par l’Académie française) et Bernard
Hours (1987). (Quelques expressions entre guillemets sont empruntées aux deux derniers.)
L’œuvre qui fournissait la base pour celle de Sœur Berthe, l’Histoire de Mère Séraphine de
été publiée par l’Imprimerie de l’École Catholique des Sourds-Muets, angle Saint-Dominique
et Laurier.
Remerciements à Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur, auteur du blogue du MesnilMarie, pour la référence à la biographie de 1857, à Mgr Norbert Lacoste et Jean Lacoste,
de l’Association des familles Lacoste, pour des renseignements généalogiques relatifs à
Sœur Berthe, à Louise Hodder, pour la lettre circulaire publiée lors du décès de sa grandetante Berthe en 1972 par le Carmel de Montréal, et, pour leur aimable collaboration, aux
Carmélites de Montréal elles-mêmes.
La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 11
DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU
ANNÉES 1950
TRAFIC DE BÉBÉS SUR LE PLATEAU
Huguette Loubert
LA
VEILLE,
les policiers qui
à une amie qui tente alors de
recueilli la preuve irréfutable
qu’ils
recherchent.
Ils
un bébé au réseau des
point un piège avec l’aide
d’une policière de New York
et une autre de Montréal.
Me Buller les reçoit au
bureau de Me Glazer, situé
avenue Mont-Royal. Elles
paient 3500 $ avec des
billets marqués, plus 50 $
iront ensuite chercher le
bébé dans une clinique de
la rue Bellechasse. D’autres
cliniques incriminées ont
leur adresse rue Laval, près
du Square Saint-Louis, rue
de l’Esplanade, rue SainteCatherine et une autre dans
l’ouest de la ville. Il est même
arrivé à Me Buller d’aller
faire lui-même une livraison
à New York en compagnie
d’une femme pouvant passer
pour la mère.
LE LENDEMAIN de l’arrestation
de Buller, a lieu une tentative
d’enlèvement d’un bébé. La
police découvre que le bébé
DANS LES JOURS qui suivent,
les détails de l’affaire sont à la
une des journaux d’ici et des
États-Unis. On apprend que
plus de 1000 bébés ont été
vendus à partir de Montréal
vers les États-Unis au cours
des dix dernières années
pour plus de trois millions
de dollars. Une majorité de
familles américaines qui ont
acheté ces bébés à des prix
variant de 1500 $ à 10 000 $
sont d’origine juive et
résident à New York.
LE 17 FÉVRIER, Gérard
Fillion, le directeur du
Devoir, met en doute dans
un article que justice sera
bien faite étant donné que les
accusés sont avocats. Il est
accusé de mépris de cour et
LE CONTEXTE social et
religieux
de
l’époque
condamne les naissances
hors mariage et les jeunes
femmes sont réprouvées par
leur famille et la société.
Elles sont plusieurs centaines
de milliers à donner leur
enfant en adoption, de
sorte que les orphelinats
d’ici débordent. Pendant
(Journal La Presse du 18 février 1954)
ce temps, aux États-Unis,
l’adoption est rendue très
barrières de religion, de
race, de classe sociale et de
revenu. Et cela, même si
plus d’un million d’enfants
américains attendent pour
être adoptés. Les demandes
prennent des années à être
étudiées quand elles le sont.
Les Juifs n’ont pratiquement
aucune chance de recevoir
une réponse favorable. Ainsi
la table est mise pour un
les mains d’avocats et les
parents adoptifs sont bien
intentionnés.
page 12 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013
À NEW YORK, une trentaine
de couples acceptent, avec
une garantie d’impunité,
de témoigner pour une
commission rogatoire qui
s’y déplace. Cinq bébés sont
rapatriés en attendant que les
demandes d’adoption soient
légalisées.
LA POLICE cherche la tête
du réseau, mais s’aperçoit
rapidement que plusieurs
réseaux se font compétition.
Son enquête se porte alors
vers les personnes qui les
renseignent. Les futures
mères sont recrutées dans
(Suite à la page 16)
DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU
LE CARRÉ AUX « DATES » : 1938 ET 1959
DES FAITS DIVERS EN « CRIME » !
Recherches et transcription :
Robert Thériault
Membre de la SHGP (avec la
collaboration de Marielle Signori)
souvient? Si pour certains esprits chagrins ça ne rime à
faisait vraiment le larron. En fouillant dans les archives du
Guide Mont-Royal, nous avons trouvé quelques perles;
subtilisées lors de ces années fertiles en événements de
LE MYSTÈRE DES BICYCLETTES
(Semaines des 3 et 17 novembre 1938, p. 2)
Les vols de bicyclettes se font de plus en
plus nombreux. Un fait reste à considérer,
les bicyclettes volées sont celles qu’on
achète à paiements différés et les vols se
font quand il reste quelques paiements
à faire. Ces articles proviennent presque
tous de la même ‘concerne’. Serait-ce
dernier numéro, il nous fut révélé
que la Pharmacie H. Trudel s’est fait
volé exactement vingt-huit bicyclettes
dans l’espace de dix ans, et dans des
circonstances analogues à celles que l’on
révélait la semaine dernière. Un policier
qui entreprendrait de tirer cette affaire
au clair s’attirerait une promotion...
feront probablement voyager dans le temps…
SUICIDE CHEVALERESQUE
AVERTISSEMENT : Ceci est une transcription des textes de 1938
et de 1959. Nous avons conservé la prose des rédacteurs de
l’époque, par souci d’authenticité. La rectitude politique? Ce
sera pour la prochaine fois. Autant vous avertir tout de suite,
certains propos pourraient en choquer plusieurs.
(Semaine du 17 novembre 1938, p. 2)
Le cheval du Clos Moderne, situé rue
Marie-Anne près de De La Roche,
‘défuntissait’ la semaine dernière,
alors que tirant que tirant sur sa leste,
il s’étrangla graduellement, jusqu’à ce
que mort s’ensuive... comme dans les
commutations de dame justice... ce que
c’est que de n’avoir assez d’intelligence
pour savoir quand ça fait mal.
LES APACHES ATTAQUENT
(Semaine
p. 3)
du
21
janvier
1959,
(SPÉCIAL À NOTRE JOURNAL) Les apaches attaquent et dévalisent les
messagers des magasins du Plateau.
Depuis quelques semaines les apaches
concentrent leurs activités sur le Plateau
Mont-Royal et poussent la lâcheté
jusqu’à s’attaquer à des adolescents
de 12 à 14 ans qui travaillent comme
messagers dans nos établissements
commerciaux,
pharmacies
ou
Pour 10$, ces gars-là peuvent se
sentir la gâchette nerveuse au point de
de deux semaines, les bandits se sont
attaqués aux messagers des épiceries
Desmarteaux, rue Mont-Royal, Allard,
Le mercredi 1er juillet 1959, p. 3b
(Voir d’autres faits divers à la page 18)
La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 13
DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU
FABRE ET MONT-ROYAL
SPECTACULAIRE ÉVASION
MARIELLE SIGNORI
LE 16 OCTOBRE 1969 un
fourgon cellulaire — une
provenance de la prison de
Bordeaux, circule sur la rue
Berri en direction du Palais
de justice. Il a à son bord
31 prisonniers, dont Richard
Blass, un criminel notoire,
ainsi que quatre gardiens,
dont seul le chauffeur est
armé. Près de la rue Sauvé,
un détenu sort un revolver,
ordonne au chauffeur de
s’arrêter au prochain feu
rouge et tire un coup de feu
en avertissement. Au même
moment, une clé circule
parmi les détenus et neuf
d’entre eux se libèrent de
leurs menottes. À l’arrêt
c’est la grande sortie : les
neuf s’enfuient dans toutes
les directions et une des
chasses à l’homme les plus
mouvementées qu’ait connue
la métropole débute.
QUATRE HEURES plus tard,
Richard Blass et deux autres
évadés sont retrouvés dans
un logement au 4543, rue
Fabre, près de la rue MontRoyal. C’est le logement
retrouvent à quatre pattes sur
le gazon, les yeux pleins de
larmes : non de regrets, mais
voisin de celui de la femme
de Blass, qui était surveillé
depuis quelque temps. Des
bombes lacrymogènes sont
utilisées, des coups de feu
maîtrise les individus qui se
LE MINISTRE de la Justice a
parlé d’aide de l’intérieur et
de l’extérieur pour qu’une
telle évasion puisse se
produire, car au moins quatre
ou cinq des détenus, dont
Blass, n’avaient pas à se
rendre au Palais de justice ce
jour-là !!!
Voir Allô-Police, 26 octobre
1969.
UN DÉCÈS, SIX BLESSÉS
UNE BOMBE DU FLQ SUR LE PLATEAU
MARIELLE SIGNORI
D
Thérèse Morin, à l’emploi
de l’usine depuis une
quarantaine d’années, meurt
sur le coup — elle tenait le
colis entre ses mains — et six
employés sont blessés autour
d’elle.
1960,
le mouvement du
Front de libération
du Québec entreprend des
actions en appui à la classe
ANS LES ANNÉES
À LA SUITE de l’enquête,
six personnes, membres du
Mouvement de libération
populaire, cellule felquiste
dirigée par Pierre Vallières
et Charles Gagnon, sont
arrêtées. Elles reçoivent des
peines
d’emprisonnement
variant selon l’importance de
leur implication.
travail. Le Plateau MontRoyal n’y échappera pas.
LE FLQ est un mouvement
politique radical qui prône
l’utilisation de la lutte armée
et d’émancipation pour le
Québec. Entre 1963 et 1970,
vols de dynamite, attentats à
la bombe, braquage de banque
font souvent les manchettes :
deux meurtres et au moins
trois crimes provoquant des
morts violentes dues à des
attentats à la bombe ou à des
fusillades sont perpétrés.
LA
MANUFACTURE
de
chaussures H.B. LaGrenade
Ltée, située au 2496, rue
Rachel, coin Iberville, est
La Presse, 6 mai 1966
en grève depuis plus d’un an
en ce jour fatidique du 5 mai
1966. L’avis qu’une bombe
éclaterait à cet endroit a bien
été reçu mais est demeuré
ignoré. Vers midi trente,
une explosion survient alors
qu’un colis piégé a été livré
quelques instants auparavant
par un mystérieux messager.
page 14 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013
LA CRISE du FLQ au Québec
est un des événements qui
ont éventuellement mené à la
création du Service canadien
du renseignement de sécurité,
le SCRS, en 1984.
Source : www.archives.radiocanada.ca
DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU
LA TERREUR DES CRIMINELS
DR WILFRID DEROME
(photo du haut) et 510, rue
Cherrier. (Photos : Marielle
Signori)
MARIELLE SIGNORI
L
DOCTEUR WILFRID
DEROME, dont la
renommée a franchi
bien des frontières, a été
le premier à se battre pour
faire reconnaître l’expertise
médico-légale devant les
tribunaux. Il demeurait sur le
Plateau-Mont-Royal au début
des années 1900, tout d’abord
au 318, carré Saint-Louis
puis au 510, rue Cherrier.
Souvent, les paroissiens
de l’église Saint-Louis-deFrance l’entendaient chanter
E
sont si appréciés qu’en 1908,
du nouveau laboratoire de
pathologie et d’histologie de
l’hôpital, et on lui accorde
même un congé d’un an
pour aller étudier à Paris,
spécialiser en médecine
légale et en psychiatrie.
Il
apprend
d’Alphonse
Bertillon la technique de
mesures anthropométriques,
qui
permet
d’établir
Portrait
DÈS LE DÉBUT de sa carrière, il
s’est intéressé à la médecine
judiciaire, dont il est
rapidement devenu expert :
autopsie, balistique, biologie,
graphologie et photographie
judiciaire n’ont bien vite
plus de secrets pour lui. Ses
expertises sont reconnues
partout au Canada et aux
États-Unis.
SA PLUS GRANDE réalisation
est certainement la création en
1914 du premier laboratoire
de recherches médico-légales
et judiciaires en Amérique
du Nord, dont il devient le
directeur et médecin expert.
Il est important de souligner
ici que le docteur Derome a
reçu à deux reprises le célèbre
J. Edgar Hoover, alors
directeur du Federal Bureau
of Investigation (FBI), qui lui
aux États-Unis le premier
laboratoire
technique
à
Chicago en 1932, 18 ans
après celui de Montréal!
NÉ EN 1877 à Napierville,
Wilfrid Derome se dirige,
dans Wilfrid
expert en
par
après ses études classiques,
vers la faculté de médecine de
l’Université Laval, rue SaintDenis (qui deviendra en 1920
l’Université de Montréal).
Médecin à l’hôpital NotreDame en 1902, il constate
très tôt que Montréal possède
l’un des taux de mortalité
infantile les plus élevés du
monde industrialisé. L’est
de Montréal est durement
touché, car les quartiers
ouvriers
francophones
enregistrent aussi des taux
de mortalité deux fois
plus élevés que ceux des
quartiers anglophones. Il se
sent impuissant et croit que
la médecine de laboratoire,
une meilleure hygiène et
la pathologie pourraient
jouer un rôle accru : il veut
contribuer à la médecine
d’une autre façon, il se voit
dans un laboratoire.
APRÈS
il donne sa démission à
l’hôpital et trouve du travail
à la faculté de médecine
en tant que démonstrateur
d’histologie, la branche de la
biologie qui étudie les tissus
des êtres vivants à l’aide du
microscope. Ses services
des délinquants et reconnaître
ainsi les récidivistes. Il
remporte brillamment le
diplôme de médecin légiste et
revient au pays, où il reprend
son travail à l’hôpital.
CEPENDANT, après avoir vu et
travaillé dans les laboratoires
de
Paris,
il
constate
qu’ici les locaux sont très
rudimentaires : il s’engage
alors dans un projet de
réforme du système judiciaire
qui aboutit à la création
du premier laboratoire en
1914, qui est situé alors au
dernier étage de la morgue
de Montréal, au 179, rue
Craig (Saint-Antoine). Le
docteur Derome s’entoure
d’une équipe d’experts,
entre
autres,
Franchère
Pépin, pharmacien-chimiste
spécialiste en toxicologie, qui
deviendra expert en poisons
et en explosifs, ainsi qu’un
d’immortaliser les scènes
de crime pour permettre
aux enquêteurs de réaliser
(Suite à la page 19)
La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 15
DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU
ROCH BEAUDOIN
NOUVELLE
ENQUETE
DANS LE JOURNAL LA PATRIE
EN DATE DU 16 FÉVRIER 1910,
ON PEUT LIRE UN ENTREFILET
CONCERNANT
UN MEMBRE DE LA POLICE :
TOUT LE MONDE prédit à l’hôtel de ville que la
suspension du constable Pelletier, en rapport avec
les scandales de l’élection municipale dans le
quartier Saint-Jean-Baptiste, sera le prélude d’une
enquête générale sur le département de police.
Pelletier, qui fut chargé d’opérer l’arrestation de
Geo. Vandelac dans une maison de débauche, le
19 octobre 1908, est accusé d’avoir conduit des
femmes aux polls pour les faire voter en faveur
sont entre les mains du maire, produits par l’exdétective Guérin et M. Geo. Vandelac lui-même.
LE CHEF CAMPEAU dit qu’il ne connaît rien de ces
plaintes au sujet de la conduite des constables
le jour de l’élection ou durant la campagne
municipale. Il déclare qu’il n’a pas peur d’une
enquête, et qu’il n’est pas alarmé des rumeurs
qui circulent sur son propre compte. Le constable
Pelletier qui est inculpé dans la nouvelle affaire,
est attaché au poste No. 14, Parc Lafontaine. Il
est actuellement malade et sous les soins du Dr
Picotte.
Note : On trouve un Georges Vandelac marié
à Saint-Jean-Baptiste en 1906 et qui se dit
entrepreneur. Est-ce le même? On constate que ce
Vandelac a ses entrées auprès du maire et qu’il n’a
pas aimé se faire arrêter! Et de plus, que le chef ne
sait rien! Rien de nouveau sous le ciel de Montréal.
— Huguette Loubert
(suite de la page 7)
baïonnette plus souvent
qu’à leur tour. Ce n’est que
grâce à la présence d’esprit
constables que la bagarre est
contenue et que 25 militaires
sont amenés au poste central.
LES DANGERS du métier
sont bien présents comme
le prouve le grave incident
qu’il a vécu 18 ans avant
sa retraite : il fait sa ronde
sur la rue Saint-Laurent
lorsqu’il entend un cri dans
la nuit. Accourant pour porter
secours à la désespérée, il
est brutalement assailli par
un apache qui le frappe à
bois. Aveuglé par le sang, il
recule mais son assaillant se
jette sur lui et lui assène 45
coups de couteau. Il réussit
à se protéger d’un coup fatal
et peut voir son assaillant
prendre la fuite en le croyant
mort. Baignant dans son
sang, il est recueilli par un
charretier qui passe par là.
Il a cependant la force de
donner les renseignements
qui mènent à l’arrestation peu
après de Jim McLawrence
et de sa compagne, qui
écoperont
respectivement
de cinq et deux ans de
pénitencier.
IL RESTE plus de trois mois
au lit entre la vie et la mort.
Une fois rétabli, il retourne
au travail, où il exerce la
fonction de tourne-clefs.
Au moment de sa retraite,
le constable Beaudoin est
le plus ancien de la force
policière, avec ses 48 ans
de service et une carrière
modeste mais utile. Il est
cité comme un modèle de
dévouement pour tous.
TRAFIC DE BÉBÉS
(suite de la page 12)
des endroits publics comme
des restaurants, alors que
page 16 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013
leur état bien souvent n’est
même pas encore visible.
Les
informations
les
concernant sont vendues
par des personnes oeuvrant
pour les services sociaux,
et des médecins à qui elles
font appel pour recevoir
de l’assistance. On leur
offre
de
payer
leur
accouchement
en
toute
discrétion dans des maisons
ou de petites cliniques
privées, et de s’occuper de
leur bébé pour le donner
en adoption. Elles ne
reçoivent personnellement
qu’un montant variant de
30 $ à 50 $, et parfois rien.
L’ANNÉE SUIVANTE, le Québec
découvre que de vendre un
bébé ne constitue pas un
crime aux yeux de la loi,
quand Buller est condamné
document à 2000 $ d’amende
et une journée de prison,
tandis que Glazer écopera
d’un peu moins de six mois
de prison. La complexité
des lois des différents états
américains ainsi que les
lacunes des lois provinciales
et fédérales font qu’il est
pratiquement impossible de
faire des poursuites.
PLUS DE 100 000 enfants de
la province ont cependant été
légalement adoptés pendant
des décennies tant aux ÉtatsUnis qu’à travers le monde.
Une enquête d’Alain Gravel
sur les ondes de RadioCanada en janvier 2003 a
montré toute l’ampleur du
phénomène.
Sources : Les journaux La
Presse, Le Devoir et La Patrie du
12 février 1954 au 14 mai 1955,
ainsi que Karen Balcom, The
Adoption and Baby-Selling
Between the United States and
Canada, 1930-1972, University
of Toronto Press, 2011.
DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU
5030, RUE SAINT-DENIS
LA COUR DES JEUNES DÉLINQUANTS
rencontrent dans un bureau, et non dans
une salle de cour comme présentement,
et toujours devant le même juge.
Il n’était pas rare de rencontrer un
adolescent qui en parlait comme étant
déménage à l’endroit actuel sur la rue
Saint-Denis à l’intersection Bellechasse.
EN 1977 au Québec, est adoptée la
Loi sur la protection de la jeunesse.
de théâtre, a déjà hébergé la Cour des jeunes délinquants.
MARIELLE SIGNORI
E
1908, une loi fédérale est
adoptée visant à faire du
traitement
des
délinquants
accusés davantage un exercice d’aide
sociale qu’un processus judiciaire. La
Loi sur les jeunes délinquants était
fondée sur la doctrine de parens patriae,
selon laquelle l’état pouvait intervenir
N
les situations où une famille ne pouvait
pourvoir aux besoins de ses enfants. Le
système judiciaire pour les jeunes était
désormais régi par le principe obligatoire
du meilleur intérêt de l’enfant; par
conséquent, le droit à l’application
régulière de la loi était minimisé en
faveur d’un processus informel et de la
promotion du bien-être des enfants.
ON AVAIT depuis longtemps considéré la
situation particulière des jeunes, et cette
loi n’était pas la première à conférer un
statut particulier aux mineurs accusés ou
déclarés coupables d’infractions : dès
1857, une loi du parlement du CanadaUni posait un premier jalon dans cette
direction (Acte pour accélérer le procès
et la punition des jeunes délinquants,
Statuts du Canada, 1857, chapitre 29).
LA PREMIÈRE cour pour enfants au
Québec est instituée en 1910. Devenue
Cour juvénile en 1932 et Cour du bienêtre social en 1950, pour entendre et
juger les causes de nature pénale et
criminelle impliquant des personnes
mineures (entre 12 ans et 18 ans),
elle avait une approche de protection
davantage que de répression. Cette
dernière cour est remplacée en 1977
par la Chambre de la jeunesse (Cour du
Québec, toujours en vigueur à ce jour).
DÈS LE DÉBUT de l’application de la loi de
1908, les jeunes délinquants devaient se
présenter devant un juge au vieux Palais
de justice situé au 155, Notre-Dame : par
conséquent, ils partageaient les mêmes
locaux et lieux de détention que les
criminels aguerris. De là la nécessité de
la Cour juvénile : Jean-Omer Marchand
en sera l’architecte (voir le texte plus
bas par Gabriel Deschambault).
VERS 1929-1930, la cour s’installe dans
d’un régime particulier. Le jeune ainsi
que ses parents sont suivis par un juge
en présence d’un travailleur social et
d’un procureur de la poursuite. Tous se
la situation de compromission et d’en
prévenir la répétition par des mesures
de contrôle, de surveillance et d’aide.
C’est le signalement qui est l’élément
déclencheur. C’est alors la création de la
Direction de la protection de la jeunesse
(DPJ) qui est chargée d’appliquer cette
loi.
AU FÉDÉRAL en 1984, on remplace
la Loi sur les jeunes délinquants par
la Loi sur les jeunes contrevenants,
destinée à remédier à un grand nombre
de lacunes dans le traitement des jeunes
délinquants. En particulier, elle réglait
la question des droits du contrevenant,
maintenait la distinction entre le crime
commis par un jeune et celui commis par
un adulte et prévoyait une approche très
différente et beaucoup plus indulgente
envers les jeunes.
MALGRÉ les nombreuses critiques dont
Loi sur les jeunes
contrevenants représentait une nette
amélioration par rapport à la Loi sur
les jeunes délinquants, puisqu’elle
établissait un équilibre entre le droit
à l’application régulière de la loi et la
protection de la société d’une part, et
les besoins des jeunes contrevenants
d’autre part.
ÉDIFICE DE LA COUR JUVENILE
Gabriel Deschambault
on pourrait le classer au titre des expérimentations que fait Marchand à cette époque
sait si bien accrocher la lumière. C’est d’ailleurs le travail de maçonnerie très soigné qui
démarque ce bâtiment. Les coins arrondis du corps principal, les médaillons à motifs du
rez-de-chaussée et les hauts pilastres qui séparent les baies de fenêtres lui donnent un
caractère imposant. L’entrée est marquée par une avancée largement vitrée et plus basse,
qui permet d’articuler la façade et d’offrir un ensemble très harmonieux.
Sources : www.justice.gc.ca, www.erudit.org, www.memoireduquebec.com. Photo :
www.calypso.bib.umontreal.ca. Remerciements à Me Laurent-Claude Laliberté.
La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 17
DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU
DES FAITS DIVERS EN « CRIME » !
(suite de la page 13)
La police fait enquête (très
et de la sournoiserie de ces
attaques), et nous espérons
que le châtiment servira de
leçon avant qu’il ne soit trop
tard, avec des dommages
LE LIEUTENANT...
DE MARBRE
(Semaine du 11 février 1959, p.
3) (DIRECTEMENT DE LA
RUE MONT-ROYAL)
- Se servant de la force du
Règlement No 2129 (article
9), le lieutenant Lucien
Quintal, qui a charge de la
moralité juvénile, a défendu
au bijoutier Simon Aird,
propriétaire de la bijouterie
du même nom, 1233 est,
rue Mont-Royal, d’exposer
dans sa vitrine! On peut voir
Simpson’s dans l’ouest ma
chère. Mais pour ce faire, il
faut s’éloigner passablement
du Plateau Mont-Royal, et
vraiment, ça ne fait pas notre
affaire. Ni celle de M. Simon
Aird...
Notre ami bijoutier a
probablement
commis
l’erreur de ne pas juger à
propos de faire approuver
de la police, et le lieutenant
Quintal, qui a toujours l’œil
ouvert (quelque soit l’heure
du jour ou de la nuit), n’a pas
mis de temps à bondir dans
la vitrine. De sorte que M.
Aird s’est résigné à retourner
toute sa marchandise aux
importateurs.
Ces importateurs ont été
légèrement surpris. ‘Nous
depuis
de
nombreuses
années à Montréal et dans
toute la province, et nous
n’avons jamais rencontré
d’opposition... Nous pensons
donc et nous savons qu’il
n’existe aucune loi qui
défende la vente de ces
Pour ce qui est du lieutenant
Quintal, que nous connaissons
pour un gentilhomme droit,
sincère et de bonne foi
dans l’accomplissement de
son devoir, nous sommes
convaincus...
que
son
enthousiasme ne connaîtra
plus de limites. Il est probable
aussi qu’il voudra s’abonner
au Guide Mont-Royal.
LES VOLS, DES SUSHI
(Semaine du 18 février 1959, p.
3) (SUR LES LIEUX MÊMES
DU CRIME)
- Les voleurs travaillent
‘comme des Japonais’ pour
percer le coffre-fort et
s’enfuir avec un butin de
$2,500.
Dans la nuit de samedi à
dimanche ou de dimanche à
lundi matin, des bandits ont
‘percé’ le coffre-fort de la
est, rue Mont-Royal. Ils ont
‘travaillé’ en paix et l’on
estime le montant du vol à
quelque $2,500 en argent
et en valeurs, dont cinq
appareils ‘stéréophoniques’,
des timbres d’assuranceréservoir de Mme Pagé, qui
est en charge du bureau!
Ils auraient mis au moins
cinq heures avant de réussir
à percer le coffre-fort. Ils
utilisaient une mèche ‘drill’
de très faible diamètre, ‘un
vrai travail de Japonais’.
Depuis quelques temps le
Plateau Mont-Royal est
devenu une véritable ‘mine
d’or’ pour les bandits et ne
serait-il pas opportun de
suggérer que la police exerce
une plus étroite surveillance
dans notre district
L’ADO ET LA BOÎTE
D’ALARME
(Semaine du 29 avril 1959) :
Un jeune chauffard de 17
ans, qui semblait être sous
été appréhendé par la police,
aux petites heures samedi
matin alors qu’il s’enfuyait
après avoir frappé quatre
autos qui étaient stationnées
le long du trottoir rue MontRoyal, en plus d’avoir
sectionné en deux un poteau
d’une boîte de système
d’alarme des incendies de
la cité avec un camion qu’il
aurait apparemment volé.
L’adolescent
n’a
pas
arrêté après ces multiples
collisions. À quelques deux
cents pieds au sud de la rue
Mont-Royal (rue Laval),
il laissait là le camion
endommagé et prenait la
fuite à pied. Il fut cependant
rejoint par deux citoyens
qui s’étaient rendus compte
de la conduite dangereuse.
Quelques instants plus tard,
les constables d’une autopatrouille cueillaient le jeune
chauffard.
HÉROÏSME DANGEREUX
(Semaine du 18 février 1959, p.
9) (RUE PAPINEAU, spécial au
‘Guide’)
- Il risque sa vie pour
s’emparer d’un voleur! Le
jeune homme d’affaires Irving
Bernstein,
copropriétaire
(avec son père) du ‘Papineau
Soda Bar & Delicatessen’, a
fait preuve d’un remarquable
courage, samedi soir, alors
qu’il a poursuivi et capturé,
seul, un bandit qui venait de
dévaliser la caisse ($133) de
la ‘Pâtisserie Éclair’, 4512,
rue Papineau.
page 18 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013
D’ordinaire,
Irving
ne
revient pas à son restaurant,
le samedi soir, mais, ‘chance
de la Providence’, il y revint,
samedi dernier, et le voleur se
demande encore pourquoi, au
juste. Ce fut une permission
du Bon Dieu qu’il fût revenu
ce soir-là.
Irving sent que quelque chose
de louche se passe, il entre
dans la pâtisserie et Mme
Hamel lui annonce à grands
renforts de tremblements :
‘Il... vient de nous voler...
il est... parti par là!’ Notre
ami ne perd pas de temps.
Il s’élance au dehors, tourne
sur Mont-Royal, vers l’ouest,
rejoint l’apache, lui saute au
collet, et le ramène comme
un beigne à la pâtisserie... et
l’a collé comme un moka, au
plancher.
‘Maintenant, dit-il au bandit
plus que moins feuilleté,
assieds-toi tranquille, et nous
allons attendre la police!’
Mlle Hamel se rappellera
toujours ce samedi 14 février.
SUR NOTRE BELLE
RUE... !
(Semaine du 19 août 1959, p. 7)
Six postes de radio de
Montréal
ont
fait
la
propagande
du
Plateau
Mont-Royal, lundi. Et il ne
s’agissait pas de travaux de la
rue Mont-Royal! Les ondes
radiophoniques
portaient
la nouvelle que le magasin
André Benoît, 1301 est,
rue Mont-Royal, avait reçu
la visite d’un malvenu. Le
voleur, muni d’une arme à
feu, pénétrait dans le magasin
et sommait le propriétaire,
M. André Benoît, de lui
rendre tout l’argent qu’il
avait. La police du poste
no 16 déclare que le bandit
mena M. Benoît dans la cave
à la pointe du revolver pour
pouvoir s’enfuir.
(Suite à la page 20)
DOSSIER HISTOIRE DES CRIMES DU PLATEAU
DR WILFRID DEROME
(suite de la page 15)
une reconstitution juste des
événements à partir de la
position des corps et des
objets environnants.
LE LABORATOIRE contribue
à améliorer les méthodes
d’aider les enquêteurs de la
police. En 1924 il déménage
au 443, rue Saint-Vincent.
On fait appel à ses services
un peu partout au Canada et
plusieurs villes américaines
souhaitent
les
obtenir.
L’expertise du laboratoire et
du docteur Derome sera mise
à contribution dans plusieurs
affaires judiciaires qui ont
fait grand bruit à l’époque.
UN CANCER l’emporte à
l’âge de cinquante-quatre
ans, le 24 novembre 1931.
Dans les heures qui suivent
sa mort, la presse écrite lui
rend hommage, tant dans
les journaux francophones
qu’anglophones,
et
les
drapeaux de l’Université de
Montréal sont mis en berne.
Il est inhumé au cimetière de
la Côte-des-Neiges.
LE DOCTEUR DEROME reçoit
aussi un vibrant hommage
de ses collègues américains
dans l’American Journal
of Police Science, où on
insiste sur l’importance de
dont son Précis de médecine
légale publié en 1920 ainsi
que le premier traité canadien
d’expertise balistique publié
en 1929.
DEPUIS 2001,
la Sûreté du Québec, rue
Parthenais
à
Montréal,
qui loge le Laboratoire de
sciences judiciaires et de
médecine légale, porte en
COMMENT LES POLICIERS ARRONDISSAIENT LEUR FIN DE MOIS
VOL AU DÉPANNEUR, RUE GAUTHIER!
(Illustration du livre
Marielle Signori
D
ANS
LES
ANNÉES
CINQUANTE,
la
famille de Jacques
Duchesneau, ancien chef
de police de Montréal,
demeurait sur le Plateau
Mont-Royal. Elle a habité
plusieurs logements autour
du parc La Fontaine et
déménageait souvent. Le
père, André Duchesneau,
travaillait très fort pour faire
vivre sa famille de quatre
enfants : il avait une « run
tôt le matin et, en soirée, il
était guichetier aux pistes
de course Richelieu et Blue
Bonnets, en alternance.
Wilfrid-Derome.
Source : Wilfrid Derome, expert
en homicides par Jacques Côté,
Boréal, 2003
EN 1953, étant un jeune
père de famille, il apprend
qu’un commerce peut lui
appartenir
sans
capital
)
d’achat, en prenant en
charge les paiements — une
chance qu’il ne veut pas
laisser passer —, et il se
lance dans l’aventure. Ce
dépanneur est situé au 2001,
rue Gauthier, à l’intersection
de la rue Bordeaux. Il voit à
approvisionner le magasin,
remplissant les rayons tandis
que son épouse Huguette est
au comptoir et sert des repas
légers à l’heure du midi.
les livraisons et plus tard,
tâches.
TOUT ALLAIT BIEN jusqu’au
jour où le commerce est
dévalisé en pleine nuit par
des voleurs qui s’emparent
de la totalité des cigarettes
d’une valeur de 500 $, une
fortune à l’époque. Deuxième
malheur : le père ne détenait
aucune assurance. Le vol
est signalé aux policiers
qui retrouvent les voleurs
et la marchandise. Et voici
qu’un troisième malheur
se dessine : les policiers
exigeaient le versement
retour des cigarettes. Dans
l’impossibilité de racheter
ses cigarettes, scandalisé de
s’être fait voler deux fois,
par des voyous puis par des
policiers, André Duchesneau
ne s’en remettra pas. Alors
que la famille croyait se sortir
de la misère en acquérant le
dépanneur, elle se retrouve
plus misérable qu’avant
et des années de misère
suivront.
Source : Jacques Duchesneau
sur le qui-vive. L’audace dans
l’action par Jacqueline Cardinal
et Laurent Lapierre, Les Éditions
Logiques, Outremont, 2006
La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 19
EXPOSITION
SUR LE PLATEAU-MONT-ROYAL
RECHERCHÉ :
OBJETS SOUVENIRS
D
LA FOULÉE des expositions temporaires réalisées
sur les grandes thématiques
montréalaises, Pointe-à- Callière
prépare une exposition sur le
Plateau-Mont-Royal, véritable quartier emblématique de Montréal, et
souhaite emprunter des objets que le
public a précieusement conservés.
Avez-vous des objets ou des œuvres
Marche à suivre
divers aspects de la vie quotidienne
ANS
1.
Avoir un ou des objets ou des
œuvres en lien avec l’histoire du
Plateau-Mont-Royal (avant 1980),
à l’exception des témoignages
écrits et des albums de photos de
famille;
2.
Accepter que vos objets soient
présentés dans l’exposition;
3.
Être disposé à les prêter pour la
durée suivante : de septembre
4.
Écrire un court message décrivant
votre ou vos objets et ses
particularités et joindre une photo
à l’adresse courriel suivante :
5.
Si vous n’avez pas accès à un
ordinateur, contacter la réception
de Pointe-à-Callière au 514 8729150, du lundi au vendredi, entre
9 h et 17 h.
partager durant cette exposition?
COMME PAR EXEMPLE : des éléments
architecturaux, des objets industriels
(outils des carrières ou des tanneries),
des enseignes de commerce, des
objets religieux témoignant de la vie
paroissiale ou des activités de l’École
Le Plateau, des objets ou des œuvres
liés à des artistes ou des personnalités
connus du quartier, des éléments de
FAITS DIVERS EN « CRIME » !
(suite de la page 18)
Le bandit, un homme d’une quarantaine
d’années, s’est sauvé avec $125.00 en
argent et un chèque de $50.00. La sûreté
municipale poursuit l’enquête. M.
extraordinaire. Une vache, dit-il, toute
blanche, court comme une folle sur la
Papineau, et se dirige vers la rue Saint-
sous les yeux les photos de criminels que
que nous annoncerons sa capture dans
notre prochain numéro mais d’ici là,
restons tous sur nos gardes...
VACHE … AU LARGE
(Semaine du 29 octobre 1959)
Un piéton qui marchait sur la rue MontRoyal, lundi avant-midi, vers onze
heures, nous téléphonait aussitôt pour
nous dire qu’il était témoin d’une scène
C’EST LA FÊTE À MICHON
(Semaine du 20 décembre 1959, p. 12)
Le Plateau Mont-Royal, qui est en pleine
période des fêtes, a été le siège d’un
crime la semaine dernière. Des voyous
ont défoncé la vitrine de la pharmacie
Michon, située au 1361 est, rue MontRoyal, pour s’emparer de trois caméras,
évaluées à plus de deux cents dollars.
L’APPEL au public se termine le
lundi 13 mai 2013. Une sélection
des objets retenus sera effectuée par
Pointe-à-Callière et les détenteurs
seront avisés. Une invitation à la
pré-ouverture et un laissez-passer
pour deux personnes seront remis à
chaque prêteur dont le ou les objets
ou œuvres auront été retenus. À noter
que Pointe-à-Callière se réserve le
droit de refuser toute offre de prêt
d’objets même si celle-ci rencontre
les critères de sélection.
Source : Direction des expositions et des
technologies, Pointe-à-Callière
Le vol à la pharmacie Michon entache
l’atmosphère de gaieté qui règne dans
le quartier depuis la réouverture de
la rue Mont-Royal. La nouvelle rue
qui accueille des gens de tous les
quartiers de la métropole, ne peut pas
remarquer ceux qui y viennent dans un
dessin malhonnête et l’on ne doit pas
se surprendre que la foule contiennent
aussi des malvenus. Toutefois, une
surveillance plus soutenue de la police,
tout le temps que durera la promotion
des nigauds qui ne savent rien d’autre
que de tout détériorer sur leur passage.
Les dommages matériels à la Pharmacie
Michon s’élèvent à près de $500.00.
Les archives du Guide Mont-Royal sont
disponibles pour consultation au Centre de
documentation de la Société d’histoire.
page 20 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013
CONFÉRENCE À LA SHGP
DÉCOUVERTE D’UNE
INSOUMISE
E
DU XIX SIÈCLE
elle a accueilli de nombreuses artistes et
personnalités pendant plusieurs années.
Amie de longue date d’Émilie Hudon,
la mère d’Émile Nelligan, elle est
devenue, à sa demande, la protectrice du
Huguette Loubert
L
6 MARS DERNIER, la Société a
eu le grand plaisir d’accueillir
Sergine Desjardins, qui nous
a fait découvrir Robertine Barry,
journaliste à Montréal de 1891 à 1910.
L’histoire de cette femme audacieuse,
qui, tout au long de sa vie, a combattu
dans ses écrits les préjugés envers
les femmes et les démunis, a étonné
l’audience d’une trentaine de personnes
qui, sauf exception, ne la connaissaient
pas.
E
Leur séparation inexpliquée a fait
l’objet de plusieurs poèmes de Nelligan,
admirablement dits et chantés plus tard
par Monique Leyrac et Renée Claude.
TOUS NOS REMERCIEMENTS à notre
conférencière.
Prochaines conférences : Voir la page
2 du présent bulletin.
Voir Sergine Desjardins, Robertine
Barry, tome 1, La femme nouvelle, et
tome 2, On l’appelait Monsieur, Éditions
Trois-Pistoles, 2011.
SERGINE DESJARDINS, qui connaît bien
l’héroïne du jour pour avoir écrit une
biographie très documentée en deux
tomes sur elle, nous l’a racontée avec
vivacité et humour. Et de plus, elle
ne s’est pas laissée démonter par un
problème technique qui l’a empêchée
de projeter les photos qui devaient
accompagner ses propos.
ROBERTINE BARRY est née en 1863,
dans le Bas-du-Fleuve, d’une famille
bourgeoise où la lecture et la musique
sont très valorisées. Jeune, elle n’hésite
pas à sortir des sentiers battus. Son
besoin d’écrire se fait de plus en plus
pressant et, en 1891, elle est engagée
comme journaliste au journal La Patrie
à Montréal. Elle prend le pseudonyme
de Françoise, dont elle signera ses
articles et qui servira aussi à baptiser Le
Journal de Françoise, qu’elle fondera
en 1902. À La Patrie, elle va sur les
s’est enrichie, au cours
du dernier mois, de deux fonds
Robertine Barry signe ce portrait
d’elle de son nom de plume de
« Françoise ».
d’abord du fonds
lieux de reportages, écrit et corrige les
copies, tout comme ses compagnons,
qui admirent sa vivacité d’esprit, son
intelligence et son humour.
JOURNALISTE d’avant-garde, elle a
revendiqué sur tous les aspects de la
vie d’alors, et n’a pas hésité à s’attaquer
à Henri Bourassa, misogyne notoire,
et à l’église montréalaise. Elle a ainsi
ouvert la voie à d’autres journalistes
venues une décennie plus tard, comme
Éva Circé-Côté, Joséphine MarchandDandurand et Marie Gérin-Lajoie.
MAIS CE QUI l’a vraiment démarquée,
c’est son écriture drôle, imagée et acérée,
chercheuse actuelle, Sophie Doucet, n’a
pas hésité à la comparer à celle de Pierre
Foglia, ce qui n’est pas peu dire!
Huguette Loubert (gauche) avec
l’auteure et conférencière Sergine
Desjardins (Photo : K. Cohalan)
SA REMARQUABLE culture et sa grande
curiosité l’ont amenée à voyager,
souvent seule, et à entretenir des relations
épistolaires dans plusieurs pays. Elle a
tenu salon chez elle, rue Saint-Denis, où
La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 21
GUIBORD OU GILFORD?
LE PLAN BOYER RETROUVÉ
Justin Bur
Membre de la SHGP
D
ANS
LE
BULLETIN
du
printemps
2012, j’ai rapporté
l’histoire
qui
circule
depuis 1937 selon laquelle la rue
Gilford devait à l’origine s’appeler
Guibord. Il manquait à cette enquête la
pièce maitresse : un plan de lotissement
de mars 1876 sur lequel la succession
fois, quelque quinze ans avant sa
construction.
CE
PLAN
était caché en pleine vue. En
le plan avait été déposé au Bureau
provincial d’enregistrement le 17 mars
1876, selon un document de Conrad
Archambault, archiviste de la Ville de
Montréal, écrit en 1937. Ce système
d’enregistrement des terrains s’appelle
aujourd’hui le Registre foncier du
Québec. Tous les documents du registre
depuis ses origines ont été numérisés et
peuvent être consultés par Internet (voir
.
LA FAMILLE BOYER possédait
le lot 328 du cadastre du
village de Côte Saint-Louis. Si
on cherche l’un des sous-lots
(328-1, par exemple) dans le
Registre foncier, on retrouve
le plan de lotissement de 1876.
Il est signé au coin inférieur
droit par l’arpenteur Joseph
Rielle (1833–1915), qui a
occupé plus tard le poste de
maire de Verdun (1904–05).
CE DÉTAIL du plan de lotissement du 17 mars 1876, déposé par la famille Boyer
au Bureau provincial d’enregistrement, indique clairement une nouvelle rue, à
mi-chemin entre les avenues Laurier et Mont-Royal, qui se nommerait « Guibord
Street ». Les deux rues perpendiculaires sont Boyer, à gauche, et Amherst,
aujourd’hui Christophe-Colomb.
LEURS VOISINS vers l’est avaient déposé
leurs plans de lotissement auparavant,
indiquant la rue en question
sans lui donner de nom. Le
terrain à l’ouest des Boyer a
été loti quelques années plus
tard, après le changement de
nom pour Gilford.
IL
ÉTAIT
également
question dans le document
de Conrad Archambault d’un
atlas de Blaiklock et Leclair.
Le volume de cet atlas pour
la paroisse de Montréal (hors
Joseph Rielle
limites de la ville) est daté de
RÉDIGÉ en anglais, le plan
1878. Il a été conçu cependant
indique très clairement une
nouvelle rue à mi-chemin entre «St pour accompagner la publication du
cadastre; celui du village de Côte SaintLouis a été élaboré en 1872. C’est pour
Rappelons que l’affaire Guibord venait ça que le plan Boyer ne s’y trouve pas.
juste de se terminer par la sépulture sous Peut-être que l’exemplaire consulté par
escorte militaire de Joseph Guibord M. Archambault avait été mis à jour pour
dans le cimetière Notre-Dame-desNeiges, le 16 novembre 1875. Même cadastre : dans ce cas-ci, une copie du
si les Boyer avaient eu l’intention plan Boyer y aurait été insérée.
d’honorer quelqu’un d’autre, dans le
contexte leur choix allait sûrement être ON SAIT que le nom Gilford apparait sur
interprété comme un geste de soutien une planche de l’atlas Hopkins en 1879.
On ne sait toujours pas si le nom a été
aux partisans de l’Institut Canadien.
ou volontairement. Joseph Guibord a
montréalaise le 29 octobre 1987 par la
dénomination d’une nouvelle rue dans
le secteur Saint-Michel.
C’EST LA PARTIE orthogonale de la rue
Gilford qui devait être appelée Guibord.
La partie diagonale à l’ouest de Berri,
quant à elle, appartient plutôt à la rue
des Carrières, un tracé fondateur de
Côte Saint-Louis présent depuis le 18e
siècle. C’est seulement le 30 novembre
1935 que son tronçon au sud de la voie
ferrée a été divisé en deux et affecté aux
rues Berri et Gilford pour le forcer à
rentrer dans la grille moderne de rues.
Références :
Registre foncier du Québec :
http://www.mrn.gouv.qc.ca/foncier/registre/
registre-systeme.jsp.
Portrait de Joseph Rielle :
http://ville.montreal.qc.ca/pls/portal/url/
page/arrond_ver_fr/rep_a_propos/rep_aa_
histoire/his_histroire_maires
page 22 - La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013
LE JEUDI 9 MAI 2013 À 14 H
ASSEMBLÉE GÉNÉRALE
ANNUELLE
La Société d’histoire et de généalogie du
Plateau-Mont-Royal
TOUS LES MEMBRES de la Société
d’histoire et de généalogie du PlateauMont-Royal sont invités à l’assemblée
générale annuelle qui aura lieu le jeudi 9
mai 2013 à 14 h, suivie d’une conférence
(à déterminer).
NOTEZ que seuls les membres en règle
de la SHGP auront droit de vote. Chacun
peut aussi faire parvenir sa candidature
au moins une semaine avant l’assemblée
aux bons soins du trésorier à l’adresse
suivante : M. Robert Ascah, trésorier,
Société d’histoire et de généalogie du
Plateau-Mont-Royal, 4450, rue SaintHubert, local 323, Montréal H2J 2W9
(téléphone : 514 523-9159). Le texte
intégral de nos règlements est disponible
sur notre site Internet à l’adresse www.
histoireplateau.org ou en s’adressant au
trésorier.
DES POSTES au conseil d’administration
sont encore vacants : invitation
à tous nos membres à poser leur
candidature. Le CA est composé de neuf
administrateurs, dont quatre, MarieJosée Hudon, Huguette Loubert, Ange
Pasquini et Marielle Signori, ont été
élus en mai 2012 pour un mandat de
deux ans, soit jusqu’en mai 2014. Alors
cinq postes sont à combler cette année
pour une période de deux ans (mai 2013
à mai 2015).
Ordre du jour de
l’assemblée générale
annuelle
1
Ouverture de l’assemblée
2
Adoption de l’ordre du jour
3
Adoption du procès-verbal de
l’assemblée générale 2012
4
Rapport du président
5
Rapport du trésorier
comptes ou renonciation à une telle
nomination
7
Élection des administrateurs
7.1 Élection d’un président et d’un
secrétaire d’élection
LIEU : Centre de services communautaires du Monastère
7.2 Rappel des candidatures reçues
dans les délais prescrits
ADRESSE : 4449, rue Berri, Montréal
(Salle Hilda-Ramacière, 3e étage)
7.3 Détermination de la procédure
d’élection
AU PLAISIR de vous y rencontrer.
RICHARD OUELLET, président de la
SHGP
7.4 Élections
8
Période de questions et clôture de
l’assemblée générale annuelle
Portrait d’André Dédé Fortin par
Marie-Josée Hudon
L’Assemblée annuelle
sera suivie d’une
conférence de l’artistepeintre Marie-Josée
Hudon, membre du CA
de la SHGP, sur les toiles
géantes des personnages
historiques du Plateau et
de Montréal.
La Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal - Printemps 2013 - page 23
La Société d’histoire et de
généalogie du Plateau-Mont-Royal
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Une excellente façon d’encourager votre
société d’histoire à continuer son travail
bénévole est de faire un don testamentaire.
Information : 514 524-7201
ou [email protected]
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en plus d’avoir la chance d’assister à nos activités et conférences. La SHGP étant reconnue organisme de charité, nous émettons des
Remplissez le formulaire ci-dessous et faites-le parvenir avec votre cotisation à l’adresse suivante :
Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal
Centre de services communautaires du Monastère, 4450, rue Saint-Hubert, local 323, Montréal H2J 2W9
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Champs d’intérêt :
Centre de documentation
Témoignages des aînés
Photos anciennes
Toponymie
Autre :
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