La conduite du changement pour une meilleure

LUNDI 18 MAI 2015
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Éco-Emploi
Management
La conduite du changement pour
une meilleure réussite des projets
Il est un défi qui préoccupe l’entreprise et qui doit être parfaitement réussi, celui de la gestion des transformations et de la conduite du changement. Les outils pour mener à bien cet important chantier ont été présentés mercredi dernier
lors d’un séminaire international organisé par le cabinet iCompétence.
L
e contexte actuel exige bien des
démarches de changement et
une gestion efficace de transformations. En effet, ce qui a fonctionné
il y a des années pourrait être devenu obsolète, d’où l’intérêt de le remettre en question pour arriver à
tracer de nouveaux contours au phénomène du changement et d'en déterminer les points forts ainsi que les
points faibles.
Qu’appelle-t-on d’abord un changement ? Quels outils mettre en place
pour bien réussir la transformation ?
Et enfin qu’entend-on par le changement agile ?
Pour apporter des réponses clés à ces
questions, le cabinet international
iCompetences, a organisé, mercredi
13 mai à Marrakech, un séminaire international sur le thème «Conduite de
changement & gestion des transformations».
Coanimée par Jean-Marie Peretti, professeur à l'ESSEC Business School et
chercheur en ressources humaines,
et David Autissier, consultant en management et maître de conférences,
cette rencontre a permis d’aborder,
d'une manière avant-gardiste, l'état de
l'art de la gestion des transformations.
L’idée est de comprendre les enjeux de
ce processus et de proposer un contenu prospectif sur le changement agile
et l'internalisation de la conduite de ce
concept.
«La conduite du changement est un
véritable métier qui nécessite des
démarches rigoureuses expérientielles qui reposent beaucoup sur
la participation et l’implication de
tout un chacun à travers des ateliers
participatifs», déclare M. Peretti au
«Matin Emploi» en marge de cette rencontre. Et d’ajouter que les échanges
d’aujourd’hui avec des responsables
impliqués dans les programmes de
changement et confrontés à toutes les
difficultés d’adaptation permettront
de bien faire avancer les choses. Selon
cet expert en RH, «il faut que les entreprises renforcent en interne les capacités à conduire le changement, que
le processus de certification de compétences s’accélère pour maîtriser de
mieux en mieux les transformations
de plus en plus rapides».
.../...
Avis de l’expert David Autissier
De la conduite du changement au pilotage
de la transformation
«E
David Autissier,
maître de conférences
et directeur
de la chaire ESSEC
du changement.
n 20 ans, on est passé de la
conduite du changement des
gros projets informatiques (1985) à la
gestion du changement organisationnel en mobilisant les managers (1995) et
en internalisant des équipes (en 2005 :
80% des entreprises du Cac 40 français
se sont dotées d’une équipe interne en
gestion du changement) à la gestion de
la transformation (2015). Avec la gestion
de la transformation, on ne vise pas un
projet, mais l’ensemble des projets de
l’entreprise pour que ceux-ci soient cohérents avec la stratégie de l’entreprise.
Selon Enquête IPsos ESSEC 2012, le
nombre de projets structurants a été
multiplié par 2,5 en 15 ans. Il faut alors
produire et changer en même temps.
Les causes sont de différentes origines :
technologique, législative, commerciale,
mondialisation, concurrence, évolutions sociétales, etc.
Il y a un risque de saturation du changement si on passe plus de temps à opérer
le changement qu’à produire.
On estime que le temps accordé au
changement ne doit pas être supérieur à
1/3 du temps global.
Aujourd’hui, le digital oblige les entreprises à revoir leur technologie,
mais surtout leur organisation et les
comportements de leurs salariés au
travers des usages de la technologie digitale. Il faut repenser des processus
entiers avec la technologie digitale et
celle-ci permet de nouveaux business
modèles à inventer. Le digital agit donc
comme un accélérateur organisationnel.
Dans l’ouvrage “le changement agile”,
coécrit avec Moutot (Dunod, 2015), il est
montré les limites des approches classiques de la conduite du changement
qui visent à expliquer de manière rhétorique le changement.
En recherchant le point de bascule
(moment où les personnes prennent
conscience de l’importance de changer),
l’accompagnement vise à co-construire
le changement avec les bénéficiaires
et à leur faire vivre des expériences du
changement.
Pour convaincre une personne des bienfaits du chocolat, mieux vaut le lui faire
gouter que lui expliquer la culture ou la
matière de ce dernier. D’où l’importance
de l’expérientiel.»
N.M.
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Éco-Emploi
LUNDI 18 MAI 2015
.../...
Changer, pourquoi
et comment ?
«La mondialisation,
la concurrence, les
exigences des
clients, les
contraintes
du marché…
autant de
facteurs qui
incitent
aujourd’hui les
entreprises au
changement.»
La mondialisation, la concurrence, les
exigences des clients, les contraintes
du marché… autant de facteurs qui
incitent aujourd’hui les entreprises au
changement.
Objectif, gagner en compétitivité et
s’adapter à un marché qui ne cesse
d’évoluer.
Pour atteindre cet objectif, il convient,
selon les analystes économiques,
d’identifier les solutions possibles au
regard de de l'évolution rapide que
connaît actuellement le marché.
«Les outils, les méthodes et les approches permettent de réduire le coût
des actions de changement, le coût des
projets, de gagner en rapidité en efficacité et en agilité», approuve Jean-Marie
Peretti.
Pour éviter l’échec, l’initiateur du changement doit respecter certaines étapes.
il s’agit, selon David Autissier, de six importantes phases :
• Les diagnostics pour comprendre le
contexte et évaluer l’importance d’un
changement.
• Les ateliers participatifs pour expliquer et faire participer dans une logique
de co-construction.
• La communication pour sensibiliser
les bénéficiaires et capter leur attention.
• La formation pour donner les clés
d’utilisation et d’évolution de l’objet du
changement.
• L’accompagnement des bénéficiaires
dans la phase de déploiement d’un
changement.
• Le pilotage du changement pour s’assurer de la réalisation du changement et
ses conséquences humaines et opérationnelles.
Entretien avec Jean-Marie Peretti,
Vue des travaux du séminaire international organisé par iCompétences sur le thème «Conduite de Changement & Gestion des Transformations».
Choisir l'agilité pour obtenir
de meilleurs résultats
La conduite du changement devient
aujourd’hui un métier et/ou un ensemble de compétences à constituer
dans les entreprises, c’est un outil que
chaque entité doit utiliser en fonction
de son environnement et de ses enjeux.
Selon M. Autissier, «Le changement et la
transformation sont devenus des objets
gestionnaires parce qu’ils conditionnent
la performance de l’entreprise.
La gestion du changement a ses théories, ses méthodologies et ses outils.
Cela devient un métier d’expert et une
compétence pour tous les managers».
Aujourd’hui, la rapidité est fort recommandée comme le précise le conférencier dans sa présentation : une entreprise
doit savoir se transformer, mais de manière rapide.
Le temps pour opérer les changements a
été divisé par 2 en 15 ans en passant de 24
à 12 mois. «Agile» résume la capacité à se
transformer et de manière rapide. Pour
ce faire, M. Autissier privilégie les ateliers
participatifs. À travers cette méthode, les
participants vont interagir entre eux et
s’exprimer de manière plus libre, mais
aussi plus vraie. Ce qui donne plus de légitimité au processus. n
Najat Mouhssine
L’enjeu de la capacité
à changer
Il faut développer la capacité
des organisations à changer :
• Au niveau des individus par la culture
du «delivery» (de l’action et du résultat).
• Au niveau organisationnel en ayant
des experts internes (intérêt des certifications en conduite du changement
comme la certification C2C proposée
par l’ESSEC).
• Au niveau stratégique en ayant
des directions de la transformation.
professeur à l’ESSEC Business School
«Il y a des méthodes de coconstruction du changement qui améliorent considérablement les résultats»
Jean-Marie Peretti.
Éco-Emploi : On parle beaucoup de
gestion de transformation dans le
secteur RH. Qu’est-ce que cela vous
évoque concrètement ?
Jean-Marie Peretti : La fonction RH est
doublement engagée dans la conduite
du changement. D’une part, elle doit
réussir sa propre transformation.
D’autre part, elle est tenue d’accompagner l’ensemble des changements de
l’entreprise. Toutes les politiques et pratiques RH doivent prendre en compte
les changements technologiques (la digitalisation transforme profondément
les processus RH), les changements liés
aux salariés (les attentes et spécificités
des générations Y et Z nécessitent un
changement des pratiques RH) et enfin
les changements de la règlementation.
Les DRH doivent être exemplaires dans
la conduite des actions de changement
au sein de la fonction. Ils sont donc
amenés à maîtriser toutes les compétences de la conduite du changement.
La DRH doit également être capable de
conduire et accompagner tous les projets
de changement de l’organisation. Son
implication dans toutes les étapes de ce
processus est essentielle pour la réussite
du changement. De plus en plus, la DRH
devient DRHT (Direction des ressources
humaines et de la transformation)
Quelles sont les attentes des organisations par rapport à la conduite
du changement ?
Aujourd’hui, les organisations sont tenues de réussir de nombreux changements pour s’adapter aux transformations du contexte, des marchés et des
techniques.
Or tous les projets de changement ne
sont pas rentables. Ils se heurtent à des
résistances et à des freins qui retardent
leur mise en œuvre et alourdissent leurs
coûts. Elles découvrent que la réussite
du changement repose sur la capacité de
faire adhérer tous les salariés concernés
au projet. Cette adhésion ne peut être
obtenue que si la cellule «Conduite du
changement» s’implique tout au long
du processus en adoptant les démarches
et outils appropriés. Il y a des méthodes
de coconstruction du changement qui
améliorent considérablement les résultats des actions de changement. Les
organisations souhaitent qu’elles soient
mises en œuvre.
Comment impliquer les collaborateurs
et les managers dans ce processus ?
Dès l’élaboration d’un projet de changement, il faut s’interroger sur ses conséquences au niveau de chacun des collaborateurs et des managers.
La création d’ateliers participatifs favorise la prise en compte de tous les impacts humains du projet, l’identification
des résistances possibles et des solutions
possibles. Il existe des outils pour impliquer les salariés et les managers.
Il faut les connaître et les utiliser à bon
escient. Il est nécessaire de suivre attentivement les résultats en termes d’information, de compréhension, d’ad-
Caravane Emploi et Métiers
Dernière escale à Casablanca les 28, 29 et 30 mai
L
Pour pouvoir accueillir les visiteurs, l’escale de Casablanca a été prolongée d’une journée.
ancée le 5 mars dernier à Agadir, la
quatrième édition de la Caravane
«Emploi et Métiers», organisée
par AmalJob sous le Haut Patronage de
Sa Majesté le Roi Mohammed VI, arrive
à son terme les 28, 29 et 30 mai à Casablanca pour sa sixième et dernière étape.
Après avoir sillonné 5 villes (Agadir, Marrakech, Fès, Tanger et Rabat), accueilli
près de 20.000 visiteurs, l’escale de Casablanca clôturera cette édition riche
en recrutements, conseils et rencontres
en tout genre.
D’ailleurs, pour cette dernière étape, les
organisateurs s’attendent à atteindre un
chiffre record de visites, «plus de 8.000
visiteurs sont attendus pour venir se renseigner sur le marché de l’emploi, rencontrer leur futur employeur ou se faire
conseiller et assister dans leur vie professionnelle», précisent les organisateurs.
C’est d’ailleurs pour pouvoir accueillir
ces visiteurs que l’escale de Casablanca a
été prolongée d’une journée, soit 3 jours
de proximité entre les recruteurs et les
demandeurs d’emploi désormais fidèles
au rendez-vous. n
Souad Badri
hésion et de participation des salariés
concernés.
Quelles sont vos recommandations
aux décideurs ?
«Il vaut mieux penser le changement
que de changer le pansement», disait
Francis Blanche. Ce conseil reste d’actualité. Tout changement présente des
risques humains, peut être source de
stress et d’inquiétude qui suscitent des
résistances et des coûts. Il faut donc
adopter une démarche rigoureuse de
conduite du changement qui prenne
en compte tous les impacts humains
du changement et trouve des solutions
optimales. Trouver ces solutions implique la participation de chacun des
acteurs concernés. Pour y parvenir, il
faut disposer en interne de personnes
qui maîtrisent les méthodes de conduite
du changement. Il existe aujourd’hui des
référentiels en la matière qui permettent
d’être certifié. n
Propos recueillis par N.M.