WW W. FL EU RI ER .C H MARS 2015 L ’ H EbyU R E F L E U RI E R L e Va l - d e - T r a v e r s p a s s e à l ’ h e u r e d ’ é t é . . . PORTRAIT Ferdinand Berthoud PAGE 4 PATRIMOINE Urbanisme horloger PAGE 5 ENTREPRISE PATRIMOINE Jean-Claude Nicolet partage ses souvenirs Une architecture contemporaine, reflet du développement de Waeber HMS MÉTIER Guillocheuse sur cadran PAGE 6 FOURNISSEUR Easytool à Saint-Sulpice, Belisario Carlo PAGE 7 PAGE 5 PAGES 2-3 PIÈCE HISTORIQUE Rare signature sur la platine d’un mouvement d’horloge PAGE 8 ÉDITORIAL Certains y voient le signe implacable de la vie qui passe. D’autres le battement régulier du cœur qui bat. Tout le monde, ou presque, s’accorde à dire que le sens dans lequel elles tournent est le bon. Pendant les 24 heures que dure The clock, œuvre de Christian Marclay, des milliers d’extraits de films et de séries s’enchaînent, avec pour point com- mun la présence d’horloges et de montres indiquant l’heure réelle. Les aiguilles sont sans nul doute dotées d’un grand pouvoir d’attraction - auquel nous nous soustrayons deux fois par an, en retenant ou en accélérant la course du temps. Frédéric Mairy Conseiller communal - Commune de Val-de-Travers E P RI S De l’importance du détail ENTRE La manufacture d’aiguilles de montres Waeber HMS s’est fait un nom sur un marché concurrentiel L’entreprise familiale fondée par Roger Waeber et ses enfants a bien grandi en moins de quinze ans. Avec une organisation totalement revue, elle fournit des aiguilles à de grandes marques horlogères suisses. Sans visiter la manufacture, impossible de deviner combien il est complexe de fabriquer une aiguille de montre. Si huit étapes suffisent pour les modèles les plus simples, il en faut trente pour d’autres. De la découpe d’un ruban de métal au placement final sur une carte avant l’envoi au client, une aiguille passe dans de nombreuses machines et entre de nombreuses mains. Et les contrôles se répètent durant tout le processus. « Comme nous n’avons pas de légitimité historique, nous devons nous démarquer de nos concurrents qui n’ont plus rien à prouver, explique Richard Leibundgut, directeur général de Waeber HMS (pour heure, minute et seconde). Nous cherchons en permanence à améliorer nos processus de production, à les rationaliser. L’entreprise doit être la source d’approvisionnement principale de gros clients. Nous misons sur le service, en gardant nos trois piliers : la qualité, le délai et le prix ». Avant de créer cette société qui reste aujourd’hui indépendante, Roger Waeber avait travaillé avec Richard Leibundgut. Fin 2010, le géant Universo a annoncé 2 L’HEURE BY FLEURIER MARS 2015 qu’il donnerait la priorité aux marques de Swatch Group. Un tournant pour Waeber HMS qui a vu les commandes affluer. D’entente avec ses enfants, Roger Waeber est alors allé chercher son ancien collègue qui reconnaît : « J’ai hésité, mais j’ai vu un gros potentiel de développement ». Richard Leibundgut ne s’est pas trompé. En trois ans, les effectifs et le chiffre d’affaires ont triplé. « Il a fallu mettre en place une nouvelle structure dans l’entreprise. Le travail est maintenant basé sur la polyvalence du personnel, sur le contrôle à tous les niveaux. Nos clients viennent eux-mêmes le vérifier, nous jouons la transparence ». Une quinzaine de métiers sont représentés au sein du bâtiment à l’architecture contemporaine de la rue du Levant à Fleurier. En assurant à l’interne toutes les phases de production et en s’engageant sur la qualité, Waeber HMS a mis tous les atouts de son côté pour pérenniser son activité. Marylise Saillard Entreprise Waeber HMS Collaborateurs 92 Production 2.5 millions d’aiguilles par an Dates marquantes 2001: Roger Waeber et ses enfants Natacha et Laurent créent la manufacture Waeber HMS, ruelle Rousseau à Fleurier 2009: Installation dans le nouveau bâtiment rue du Levant à Fleurier 2011: Arrivée de Richard Leibundgut, nommé directeur opérationnel 2012: Richard Leibundgut devient directeur général, Natacha Waeber reste directrice des ressources humaines et des finances et Laurent Waeber devient directeur commercial 2015: Roger Waeber prend sa retraite. Création de Waeber HMS Holding, société détenue par Natacha et Laurent Waeber Une Titreaiguille sousl’article la loupe de 1 CeciCette sera aiguille la zone en de texte acier consacrée l’image ici à gauche. bleui est à une aiguille squeCet sera dédiéqu’une à la marque. lette,espace c’est-à-dire parVoyez ce jeu exquis wallon, de tie a été évidée. Sa couleur agraété phie en kit bref. Ceci est un obtenue par mais traitement thermique. pangramme les lettres accenAu total, 25 sans opérations manuelles tuées. et mécaniques sont nécessaires pour la fabriquer, exigeant dextérité et Ceci sera la zone de texte consacrée soin très poussé lors de la manipulaà l’article. Ceci sera la zone de texte tion. L’aiguille passe dans les mains consacrée à l’article. Voyez ce jeu exd’une soixantaine de collaborateurs quis wallon, de graphie en kit mais et il faut presque deux mois pour bref. Ceci est un pangramme sans la réaliser, du traitement du desles lettres accentuées. Dans cet sin initial à l’emballage final. article, il y a pas moins de 465 Dans cette famille, l’aiguille caractères. des heures ne dépasse pas 10 mm et celle des minutes 14 mm, pour un poids d’environ 10 milligrammes. 2 1 Alignage – encollage d’aiguilles en vue d’un polissage dit « poli-bloqué ». 2 La famille Waeber, deux générations à la tête de l’entreprise et le directeur général Richard Leibundgut. L’HEURE BY FLEURIER MARS 2015 3 AI T PORTR Ferdinand Berthoud Un destin d’absolue exception à l’image de ses créations Reçu maître horloger à Paris en 1753, portant le titre d’« Horloger Mécanicien du Roi et de la Marine » sous les règnes de Louis XV et Louis XVI, membre de l’Institut national, le Vallonnier fut également nommé Chevalier de la Légion d’honneur sous Napoléon. Né le 18 mars 1727 dans le hameau de Plancemont, Ferdinand Berthoud effectue son apprentissage d’horloger-pendulier auprès de son frère aîné Jean-Henry. À l’âge de dix-huit ans il part se perfectionner à Paris. Extrêmement brillant, il soumet en 1752 au jugement de l’Académie Royale des Sciences une pendule à équation et deux ans plus tard un projet d’horloge marine. En 1759 paraît son premier ouvrage, L’Art de conduire et de régler les pendules et les montres, suivi de multiples écrits, traités et mémoires. Il collabore parallèlement à la rédaction de L’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert. Esprit visionnaire, Berthoud se consacre principalement aux recherches sur les horloges marines et à leur réalisation. Dès 1763 il se rend à Londres dans le cadre du vaste débat sur la détermination des longitudes. La production de son important atelier, dirigé successivement par ses neveux Henri et Louis, comprend, entre autres, horloges marines et montres à longitude ; chronomètres de poche et montres ; horloges, régulateurs et pendules ; instruments de mesure et de navigation ainsi que machines et outils. Reconnu par ses pairs, actif jusqu’à ses derniers jours, l’éminent horloger, demeuré sans descendance malgré deux mariages mais ayant formé plusieurs élèves dont son neveu et successeur Louis, s’éteint le 20 juin 1807 dans sa propriété de campagne à Groslay (actuel Val d’Oise). Passionné par Ferdinand Berthoud, son histoire et son œuvre, Karl-Friedrich Scheufele, co-président de Chopard, a annoncé en décembre 2013 son souhait de lancer une nouvelle marque nommée « Ferdinand Berthoud », en hommage au grand maître horloger. Ariane Maradan Sources Portrait de l’horloger décoré de la Légion d’honneur, dessin au crayon par Morel (collection privée). 4 L’HEURE BY FLEURIER MARS 2015 Sous la direction de Catherine Cardinal - Ferdinand Berthoud, 1727-1807 : Horloger Mécanicien du Roi et de la Marine - Musée international d’horlogerie, La Chauxde-Fonds, 1984. E OI N PATRI M Urbanisme horloger Réalités et libertés sur les boîtes et cartons de fournitures Le bâtiment sur une boîte d’aiguilles Kaufmann (collection du Musée régional du Val-de-Travers). Les boîtes de fournitures sont un bel endroit pour représenter les nouvelles fabriques qui se construisent partout à la fin du 19e siècle. L’ancienne fabrique Kaufmann Frères, à Fleurier, nous offre un exemple de réinterprétation de la réalité sur une boîte d’aiguilles afin de mettre en valeur les deux bâtiments. Les montagnes ont rapetissé en arrièreplan. Les grandes cheminées fument joyeusement, signe d’une activité débordante. Sur la large route devant la fabrique circulent chars et personnes. Belles libertés car il est aujourd’hui difficile de s’y retrouver et de reconnaître dans les ateliers horlogers de Parmigiani Fleurier la fabrique d’aiguilles Kaufmann Frères, devenue Universo N° 5 en 1909 et fermée définitivement en 2002. La longue usine a été reconstruite vers 1950 et la belle et large route n’a jamais existé que dans l’imagination du dessinateur de cette boîte en carton. Benoît Conrath À la bibliothèque Miettes de vie De la visite du roi de Prusse aux Ponts-de-Martel vécue par ses ancêtres en 1842 à son propre bonheur d’être grand-père à La Chauxde-Fonds, l’auteur, horloger, enseignant et constructeur, nous livre un choix de récits et anecdotes pleins de sensibilité et d’humour : vie quotidienne dans les villages et les fabriques d’horlogerie des Montagnes neuchâteloises, apprentissage et enseignement du métier d’horloger, portrait de grandes figures de l’horlogerie, hommage aux régleurs de précision et autres savoureux fragments. Ariane Maradan Jean-Claude Nicolet Miettes de vie : souvenirs d’un maître horloger Editions Mon Village S.A., Sainte-Croix, 2006 191 pages, quelques illustrations L’HEURE BY FLEURIER MARS 2015 5 IER MÉ T La mécanique artistique d’une guillocheuse Tracer avec régularité un beau guilloché sur des cadrans, jouer avec les différents aspects de leur surface, c’est l’art de Carmen Zaugg Elle a appris le métier de couturière à La Chauxde-Fonds. Très vite, tous lui disaient qu’elle n’était pas faite pour cela, trop lente et trop appliquée, et qu’elle ne pourrait donc pas en vivre. Peu importe, quand Carmen Zaugg commence quelque chose, elle le finit, dit-elle comme une évidence. Son CFC obtenu, et forte de sa formation manuelle, habituée à manier l’aiguille, elle commence le guillochage des cadrans. Sans aucune connaissance mécanique, elle se penche sur des machines de 60 ans ou plus. Elle apprend patiemment à travailler des matières comme le laiton puis l’argent, l’or, voire la nacre. Elle manie le tour à guillocher et cette machine étonnamment nommée « ligne droite » qui sert, entre autres, à faire des lignes ondulées. Autodidacte, ce métier ne s’enseignant plus depuis longtemps, avec l’aide des mécaniciens elle apprend comment affûter les burins, comment faire parler les cames, les chariots et les outils. Ces antiques machines sont encore pleines de mystères pour elle. Toujours en éveil, elle cherche à comprendre ce que peuvent dessiner sur du laiton les différentes cames. Tout l’inspire, elle s’essaie même à reproduire des effets 6 L’HEURE BY FLEURIER MARS 2015 de lumière comme ceux traversant les portes vitrées de l’atelier Voutilainen, son lieu de travail. Elle jongle avec des motifs aux noms imagés comme Grain d’orge, Clous de Paris, Soleil, Tissu et même Grille d’égout vite renommé Panier. Avec une belle passion, elle montre l’infinie variété de ces décors et l’implacable rigueur dont elle doit faire preuve apparaît vite. Chaque modification de réglage ou d’outils trouble presque irrémédiablement la régularité des entrelacs qu’elle construit soigneusement. En la voyant assise face à sa machine, ne lâchant pas des yeux le copeau de métal qu’elle découpe à la surface du cadran d’un délicat mouvement de manivelle, on peut se dire que Carmen est loin de mettre en pratique la phrase articulée peu avant : « Si on n’aime plus son métier, on en change ». Dans l’atelier Voutilainen, Carmen Zaugg actionnant l’imposant tour à guillocher. Benoît Conrath FOURNI SSEU R Indépendance et flexibilité La petite entreprise Easytool, à Saint-Sulpice, est au service de ses clients Aiguilles, cadrans, ponts, Belisario Carlo a créé son atelier d’usinage micromécanique et de prototypage. Entreprise Easytool Sàrl Collaborateurs 1 Activités Fabrication de pièces pour l’horlogerie haut de gamme Étapes clés 2010: Création de l’entreprise à Fleurier 2012 : Déménagement dans des locaux de la zone industrielle de Saint-Sulpice 2013 : Installation dans le quartier du Pâquier à Saint-Sulpice Une seule machine à commande numérique programmée pour l’usinage des pièces. « Je suis un artisan, je n’aime pas le terme de chef d’entreprise. En fait, je suis une entreprise à moi seul. Je fais toutes les tâches, secrétariat compris ». Avec sa formation de mécanicien de précision et son expérience acquise au sein de plusieurs entreprises, Belisario Carlo a choisi de devenir indépendant en 2010. Il exerce désormais son activité professionnelle là où il vit, dans de modestes locaux aménagés. « C’est plus pratique. Depuis ma cuisine, quand je dîne, je peux voir ma machine par la fenêtre. Si elle clignote, je sais que le travail est fini ». Sa machine à commande numérique et son ordinateur sont en quelque sorte ses collègues. Ses clients, des marques horlogères installées pour l’essentiel dans le canton de Neuchâtel, lui fournissent un dessin. Un logiciel reconnaît le volume de la pièce. À lui, ensuite, de programmer l’usinage en déterminant les différentes opérations que la machine CNC devra réaliser. « J’utilise certains outils qui existent et j’en fabrique d’autres. Mon atout principal, c’est ma réactivité. Il m’arrive de faire une pièce dans la journée si nécessaire. Et parfois, on me commande plusieurs centaines de pièces, que ce soit des aiguilles, des cadrans, des ponts. Moi je fais en sorte qu’une pièce soit bonne, aux entreprises de la rendre belle par la suite ». Marylise Saillard L’HEURE BY FLEURIER MARS 2015 7 PIÈCE HISTO RIQU E Pierre, talent dans l’ombre du grand Ferdinand Une longue-ligne signée d’un prestigieux patronyme Réalisée au début des années 1740 pour une demeure bourgeoise, cette horloge de parquet neuchâteloise, dite longue-ligne, est l’une des rares pièces qui nous soient parvenues portant la signature de Pierre Berthoud. Figurant parmi les cinq frères aînés de Ferdinand Berthoud, cet artisan vit le jour à Plancemont en 1717 et exerça les métiers de laboureur, coutelier, horloger et pendulier ainsi que les fonctions de justicier et de conseiller de commune à Couvet. Ses fils Henri et Louis, horlogers mécaniciens, seront les collaborateurs de leur oncle Ferdinand à Paris. De style Louis XIII, sobre et élégant, le cabinet de bois laqué noir, d’une hauteur de 2,43 m, présente un corps central d’une finesse exceptionnelle, tant en largeur qu’en profondeur. Muni d’aiguilles en acier bleui, le cadran argenté se détache sur une plaque de laiton remarquablement gravée de rinceaux de feuilles d’acanthe et d’un cartouche portant la signature recherchée « Pierre Berthoud à Couvet ». L’horloge de parquet et son élégante plaque de cadran ouvragée (collection privée). Deux portes vitrées latérales permettent d’admirer le mouvement, d’une qualité d’exécution magistrale. Animé par un échappement de type Chevalier de Béthune et muni de poids, il offre, outre la sonnerie des heures et des demies, l’utile fonction de réveil ainsi qu’une réserve de marche de huit jours. Ariane Maradan Impressum Editeur Fondation pour la sauvegarde de la tradition et du patrimoine horlogers de Fleurier et du Val-de-Travers. Comité de rédaction Ariane Maradan, chercheuse indépendante Marylise Saillard, journaliste à RTN et indépendante Benoît Conrath, horloger chez Parmigiani Fleurier Coordination Laurence Vaucher, conservatrice, présidente de la Fondation 8 L’HEURE BY FLEURIER OCTOBRE 2012 Ligne graphique Cyril Schindelholz - Caroline Karakash Crédits photographiques p. 1, 6, 7, 8: ©François Charrière; p. 1, 3: ©Waeber HMS ; p. 1, 5: ©Ariane Maradan; p. 5: ©Musée régional du Val-de-Travers. Remerciements Le Conseil de Fondation tient à remercier pour leur soutien et leur aide, la commune de Val-de-Travers ainsi que la Banque Cantonale Neuchâteloise. Mise en page et impression Imprimerie Montandon & Cie, 2114 Fleurier Achevé d’imprimer - mars 2015 - 9000 exemplaires être proche, c’est soutenir le savoir-faire neuchâtelois »
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