DAILY 14 JEU CANNES Cannes sans dormir JOUR 1 Par Philippe AZOURY PHOTOS : JULIEN MIGNOT ; DR ; PATRICK SWIRC ; SIPA O n aurait pu faire une fête. A la place, nous avons préféré faire un journal. Un Grazia Daily Cannes, gratuit, précipité et heureux. Un journal, au sens intime du terme. Pour faire tenir sur huit pages toute la contradiction de Cannes : la plus grande cinéphilie, la farandole continue des films les plus exigeants du monde. Ceux (nombreux cette année, il faut croire) qui viennent vers nous sourcil froncé, l’air concerné, à fond dans la grande forme, à fond dans le souci de vouloir dire le monde – on imagine que les nouvelles ne sont pas jojos. Et puis cette petite coterie adorée des beaux bizarres, qui en une seconde entrent en vous pour des mois, murmurant déjà en mai « été, étrange été. On en sortira à la rentrée ». Là, sur le papier, à envisager le programme, on imagine qu’un Apichatpong Weerasethakul ou un Miguel Gomes sauront nous dire des choses comme ça. Et face à ça, souriante (ou dédaigneuse – mais à Cannes c’est pareil), belle à tomber, cette fête, ivre, à l’élégance stupéfiante. Cannes est la fille la plus belle du monde, pas une ne saura lui faire de l’ombre durant dix jours. Il n’existera pas un endroit plus fitzgéraldien sur la planète Terre, non. Cannes, habillée pour tuer. Habillée pour une heure. Défiant tout, au pied des marches, au bord de la piscine, dans des rues piétonnes que rien n’a préparé à cela et qui mettront un an à s’en remettre. On nous dit : « Cannes, c’est bien vulgaire… » Mais la vulgarité, c’est toujours l’autre – nous n’aurons pas la vulgarité de vous le rappeler. Nous sommes cagoles, tous. Moi, je porte une tunisienne et j’aime manger dans la rue. Alors, au lieu de râler (« Aux lions, les râleurs » me souffle Gérard au petit matin), un seul choix : ne pas dormir, abolir le sommeil pour mieux envisager Cannes comme une sorte de Frankenstein électrique. Qui nous attend là, tout de suite, devant la gare, où commencent les embrassades infinies de gens qui habitent Paris à l’année et qui sont ravis de ne se voir qu’ici. Où soudain, on se rappelle qu’on ne se souvient plus : elle est où la mer ?… Notre film du jour L’Ombre des femmes La Quinzaine ouvre avec le nouveau Philippe Garrel. Une comédie cassante. Où les mecs en prennent pour leur grade. Par Philippe AZOURY et Luc CHESSEL A Cannes, les rumeurs ont la résistance du sable. Ainsi, il a vite circulé que L’Ombre des femmes, le dernier film en date de Philippe Garrel, cinéaste réputé poignant, aurait une légèreté, un air de conte Rencontre Un moment sur un canapé avec Catherine Deneuve page 2 qui devrait autant à Eric Rohmer qu’au Coréen Hong Sang-soo. On pourrait tout aussi bien dire l’inverse : Garrel nous fait une farce. Garrel nous joue des tours. Et le plus drôle, c’est que ce film léger est peut-être aussi son plus amer. En surface : un film éclairé, d’un blanc éclaboussant. A l’intérieur, un film blanc cassé, voire blanc cassant. Entourloupe à la légèreté ? Oui, et c’est le génie du film, cette façon complexe et pleine de contradictions de dire la lâcheté des hommes – qui se trouvent toutes les bonnes raisons du monde de tromper leur femme dans l’ombre, mais ne supportent pas une seconde qu’elles leur rendent la pareille. Garrel, depuis quarante ans et autant de film décisifs (citons La Cicatrice intérieure, Les Amants réguliers, La Jalousie) voudrait que les femmes et les hommes se parlent à égalité. Mais ne peut s’empêcher, dès qu’il en filme une, de la sublimer. Or une femme sublimée est toujours privée d’action. Ne bouge pas, merveille, que je te regarde ! La tristesse soudaine du film, c’est celle de ce constat. Le héros, tiens tiens, est cinéaste, documentariste (Stanislas Merhar, broussailleux). Sa femme est son assistante (Clotilde Courau, déma- Qui vient cette année ? Les stars que le tapis rouge attend de pied ferme page 7 mai quillée, vulnérable : redécouverte). Au détour d’une après-midi de travail, il séduit une petite nana, rencontrée sur un centre d’archives. Il la revoit, goûte à elle, commence à se prendre les pieds dans son mensonge. Puis s’abîmera dans la détestation de soi, et morflera comme jamais en apprenant que sa femme voit à son tour un amant. Tout s’effondre. Tout peut donc recommencer ? Ce n’est pas spoiler ce film que de raconter quelque chose de sa fin : Le héros a passé une année à filmer le témoignage d’un grand résistant. Mais apprend à la dernière seconde que le mec était un imposteur qui n’a jamais résisté à personne. Un pauvre type comme un autre, tricotant la vérité comme il veut. Garrel a longtemps hésité à filmer cette scène. On peut le comprendre : ce retournement emporte avec lui non seulement une partie du film, comme il démolit entièrement ce goût du premier degré sur lequel a toujours reposé le cinéma de Garrel. Drôle de happy end, donc. Celui d’un film intérieurement fracassé. L’OMBRE DES FEMMES, de Philippe Garrel (Quinzaine des réalisateurs), avec Stanislas Merhar, Clotilde Courau. GRAZIA DAILY CANNES # 1. Gratuit Retrouvez tous les numéros du GRAZIA DAILY CANNES en PDF sur Notre coverstar #1 : Sophie Marceau, très élégante en Haute Couture Chanel, hier, juste avant la montée des marches. JEUDI 14.05.2015 - 1 1 Rencontre « JE NE ME SUIS JAMAIS FAITE AU TAPIS ROUGE » L’impérative Catherine ouvre le bal avec La Tête haute, d’Emmanuelle Bercot. Confidences sur canapé. Par Gérard LEFORT et Olivier SÉGURET P lus de 30 minutes de retard, la faute à un avion capricieux à l’aéroport de Nice. Ce qui permet d’apprécier in situ le luxe de la suite de l’hôtel Majestic où on l’attend. En compagnie de Dominique Desseigne, proprio du groupe Barrière et donc du Majestic, présentement en inspection des locaux. Qu’est-ce donc qu’une suite de cette espèce ? Un truc tout en nuances plus ou moins bleu marine avec posters sérigraphiés citant Mélodie en sous-sol d’Henri Verneuil qui fut tourné à Cannes, et entre autres au Majestic. Dans l’entrée de la suite, une fébrilité soudaine indique qu’elle va bientôt arriver, qu’elle arrive, qu’elle est là. Deneuve, notre Catherine. Super pro pour répondre avec civilité aux compliments d’accueil du taulier et par ailleurs très à l’aise dans un tailleur-pantalon en soie brune d’inspiration orientale. Elle jette un coup d’œil à travers la baie vitrée qui plonge sur la Croisette (« Bon, d’accord, il y a la vue »), s’installe dans un canapé où personne n’a encore pété, prévient qu’elle est à la bourre, la promo de La Tête haute commençant à monter en puissance, et s’enquiert de notre état : « Vous, ça va ? Parce que moi, ça ne va pas du tout. » Elle veut dire qu’elle est un brin épuisée rapport au jet lag entre Cannes et Palm Springs (USA) où, quelques heures auparavant, elle participait à la promo d’une marque de luxe. On la sent un rien en pilotage automatique pour répondre à nos curiosités sur le film d’Emmanuelle Bercot où elle Critique La Tête haute Par Gérard LEFORT L e nouveau film d’Emmanuelle Bercot, La Tête haute, ne lâche pas la rampe. Il faut dire que cette rampe a la solidité de Catherine Deneuve qui fait don de toute son excellence à un personnage de juge pour enfants, confrontée dix ans durant à l’adolescence chaotique puis à la fragile maturité de Malony, un rebelle de toutes les causes. Deneuve nous tient, impérative et souveraine, et elle tient le film, scandé par ses rendez-vous avec Malony dans son bureau de juge. Sa façon notamment d’appeler Malony « jeune homme », qui frise un érotisme pour le coup hors la loi. Une juge qui a le pouvoir exorbitant, voire écrasant, de diriger « jeune homme » sur la voix de garage des centres éducatifs ou de l’expédier 2 - JEUDI 14.05.2015 ne joue pas le rôle principal mais un rôle essentiel. Il est fatal qu’on lui ait déjà demandé de-ci de-là pourquoi elle a tenu à jouer pour la deuxième fois (après Elle s’en va) dans un film de Bercot, comment elle s’est préparée pour « habiter » son personnage de juge pour enfants, etc. Mais elle se prête au rite de l’interview avec une intelligence pratique qui lui fait trouver des réponses inédites à des questions qui ne le sont pas. « Ce que j’aime avec Emmanuelle Bercot, c’est sa volonté inflexible, sa manière de travailler tout le temps, avant, pendant et après le film, sans pour autant être une forcenée. Ça me touche énormément cette maîtrise, et surtout ça me rassure, je peux m’abandonner entièrement. » Première cigarette et zéro cendrier. Elle se lève, tente d’ouvrir quelques portes, toutes verrouillées, et laisse poindre un début d’agacement : « En fait c’est une suite où tout est fermé. » « ON BOIT QUELQUE CHOSE ? » En attendant que l’attaché de presse dégotte ce qui pourrait faire office de cendrier, elle recueille les cendres dans l’emballage de son paquet de clopes. Le cendrier arrive sous forme d’un porte-savon en verre prélevé dans la salle de bain. « Ah ça, c’est idéal. Au fait, on boit quelque chose ? » Eau plate pour elle, café et Coca pour nous. Dunkerque maintenant, où furent tournées toutes les scènes de bureau qui scandent le film : « Vous connaissez ? C’est pas d’une folle gaieté Dunkerque. Mais j’ai appris que sur les réseaux sociaux, on a très mal interprété que j’aie fait part de cette impression. Ce n’est pas du tout mon genre de dire du mal d’une ville ou d’une région, a fortiori quand elles ont été massacrées par la crise. C’est quand même dingue dans le cul-de-sac d’une prison. C’est la part documentaire du film : la Justice ordinaire à l’aune de sa réalité prosaïque, entre taule forcement brutale et tentatives exténuantes de resocialisation. Ainsi d’un long aparté dans une de ces maisons d’éducation surveillée pour le moins isolée où les ados sous pression de tout (du cul au shit) menacent de faire sauter un encadrement fatalement dévoué, forcément débordé. La part fictionnelle du film prend le parti de la table rase : pas de passé, aucun motif psy pour les personnages. Leur vie est celle de leur rôle pendant le temps du film : Séverine, la très jeune maman de Malony, immature et foutraque (Sara Forestier, convaincante) ; Yann, son éducateur entêté (Benoît Magimel, pur bloc de mélancolie). Et soleil noir autour duquel ils gravitent tous, plus ou moins affolés : Malony, boule de nerfs explosive autant que crève-cœur de notre ces histoires de réseaux sociaux et de tweets où la moindre des paroles est instantanément répercutée, commentée et le plus souvent déformée. J’ai passé quelques semaines à Dunkerque et le plus dur, ce n’était pas la ville mais le tournage. Les rendez-vous dans le bureau de la juge avec Malory, le jeune délinquant, sont censés s’étaler sur à peu près dix ans. On les a tournés coup sur coup dans une continuité qui n’a évidement rien à voir avec cette durée. Pour moi, ce rythme, qui en plus est très riche en dialogues, était un peu difficile à soutenir, plus un sprint qu’une course de fond. Le temps qui manque, c’est un des handicaps majeurs des tournages aujourd’hui. Ce qui nécessiterait huit semaines de travail est réduit à sept semaines. » Alors, la préparation du rôle ? « J’ai passé du temps dans le bureau d’un juge pour enfants. J’ai été sidéré par la présence, l’attention et le dévouement de ces fonctionnaires de la Justice. » Certes, mais comment arrivet-on a se faire oublier dans un bureau de juge quand on est Catherine Deneuve ? « La réalité de la justice ordinaire très prosaïque et souvent rude a eu vite fait de subjuguer ma présence et même de l’effacer. Les gens étaient prévenus et avaient donné leur autorisation. Quand vous êtes dans le bureau d’un juge parce que votre gamin a fait une grosse bêtise, vous avez vite en tête d’autres soucis que de savoir ce que Catherine Deneuve fait là. » LA COURBE DU DÉSIR ? Deneuve n’hésite pas, ainsi, à nous parler d’un temps que les moins de 20 ans n’auront jamais connu : celui où, « plus que les auteurs, c’était les producteurs qui concevaient, portaient et accouchaient les films ». On partait d’un casting, on construisait une affiche. Elle a depuis longtemps emprunté une route différente, moins confortable mais plus contemporaine : « Je m’en remets aux cinéastes. Que ce soient eux qui viennent vers moi ou moi qui aille vers eux ». Justement, serait-elle en mesure de dessiner la courbe du désir des cinéastes à son égard ? Comment, avec le recul, évalue-t-elle l’intensité de l’intérêt qu’on lui porte dans le cinéma français ? « La courbe du désir ? », reprend-elle avec cette malice au débit rapide qui caractérise sa conversation. Deneuve ne souhaite pas se vanter, mais ce que l’on comprend dans les demimots qu’elle enchaîne alors, c’est qu’elle ne manque pas de sollicitations et que si la nature de celui-ci a évolué, le désir que lui manifestent les cinéastes français n’a jamais rétréci ou diminué. Tout est donc pour elle affaire de choix et cette sélection radicale qu’elle opère parmi une offre profuse laisse plutôt admiratif : comme La Tête haute le démontre encore, Deneuve ne penche pas vers les solutions de facilité. Et son propre désir de Cannes, où en est-il ? « Plutôt moyen », concède-t-elle, mais avec une relative indulgence pour le Festival : « C’est facile pour moi qui l’ai connu dans des circonstances exceptionnelles avec Les Parapluies de Cherbourg (palme d’or 1964) de trouver que c’était mieux avant. Mais c’est vrai que les choses ici ont tellement changé. Je ne me suis jamais faite au tapis rouge en plein jour. Je trouve ça absurde et parfois ridicule. Je trouve que le festival devrait revenir aux projections de gala nocturnes, vers 21 heures et minuit comme avant » Cela n’a l’air de rien, mais pour elle, la nuit contribuait à la qualité du glamour mythologique qui nous fascinait tant et que l’on retrouve dans les photos de l’époque… Ces photos que, précisément, la suite du Majestic s’évertue vainement à réanimer. époque (Rod Paradot, trouvaille sidérante) qui trouvera sans doute sa porte de sortie, son issue de secours « tête haute », mais dans un happy end faussement happy : suite à une amourette, il lui vient un bébé, dont rien ne présage, malgré la douceur du plan qui le cadre comme une Vierge à l’enfant, qu’il ne lui fera pas subir les violences qu’il a lui-même endurées. Nous sommes Malony ? La Tête haute chronique avec une froideur idoine bien des déconfitures politiques contemporaines, mais avec un espoir républicain à la clef, sans doute un rien optimiste : la Justice française est certes cabossée, mais elle marche encore, et plutôt bien. LA TÊTE HAUTE, d’Emmanuelle Bercot, avec Catherine Deneuve, Rod Paradot, Benoît Magimel. (Sélection officielle, film d’ouverture). En salles. PHOTO : PATRICK SWIRC/MODDS GR A Z IA DAI LY C A N N E S 15 MINUTES AVEC… STANISLAS MERHAR Il est éblouissant dans L’Ombre des femmes, de Philippe Garrel, en don Juan à la fois heurté et malicieux. Disnous, Stanislas, comment on joue celui qui fuit la vérité ? Par Julien WELTER et Philippe AZOURY Les films de Philippe Garrel sont toujours secrètement autobiographiques. Comment se glisse-t-on dans son univers ? Il ne peut pas faire autrement : ses films parlent de lui. C’est toujours difficile de dire qu’on peut y amener quelque chose à soi. Surtout si le film raconte une histoire d’amour. On joue de façon objective : « Ils se quittent, se trompent et vont peut-être se retrouver », je dois jouer ça et rien d’autre. La méthode Garrel (nombreuses répétitions, séquences tournées en une seule prise) vous a-t-elle déstabilisé ? Philippe est radical. Lorsqu’on se prépare, il vous dénude, comme un fil électrique, il répète beaucoup, donc il n’y a plus de tension. Il vous hypnotise carrément, c’est un anesthésiant puissant, le Garrel, donc vous faites exactement ce qu’il veut. On ne peut pas s’échapper, c’est tant mieux. Car une fois qu’on s’y met, c’est du triphasé ! Diable ! Mais oui, Philippe arrive à ce qu’on ne se pose plus de question. On devient le personnage : ce garçon qui rencontre une autre femme qui lui plaît et trompe la sienne avec elle, il ne se l’interdit pas une seconde. Il ne voit pas où est le problème. Alors que moi, je ne suis pas du tout comme ça dans la vie ! C’est beaucoup plus compliqué… (Sourire.) BITCHY MARIE Photos : AUGUSTIN DETIENNE/iTÉLÉ ; JULIEN MIGNOT « ... En version originale ? » Les gens sont méchants. Comment expliquer, sinon, qu’on exige de moi d’endosser le fourreau à traîne de reine des langues de pute, alors que jamais l’ombre d’une vilaine pensée ne m’a traversé l’esprit ? Mystère. Une chose est sûre, selon la divine Bette Davis, les rôles de salope sont les meilleurs. On s’en parle, de Natalie Portman à la une de M ? Rappelons que cette splendide actrice, oscarisée pour Black Swan, est à Cannes pour présenter, hors compétition, son premier film en tant que réalisatrice, Une histoire d’amour et de ténèbres, adapté d’Amos Oz. Le titre du M est intéressant : « Natalie Portman en version originale ». Originale au sens de « d’origine » ? Au vu de la photo et surtout de photos plus anciennes, on ne retrouve pas clairement cette bouche « d’origine ». On ne lui jette aucune pierre, d’abord parce qu’elle fait ce qu’elle veut, Natalie, et ensuite parce que le cinéma n’est pas toujours sympa avec les femmes. La preuve, s’il n’y avait pas les séries pour ressusciter ici Jane Fonda, là Lily Tomlin ou encore Jessica Lange, elles seraient tombées dans un trou sans fond. Oubliés aussi au passage leur talent, leurs oscars mystérieusement devenus hors sujet. Il suffit pourtant d’une scène d’American Horror Story, vénéneuse série de Ryan Murphy, où l’on découvre Jessica Lange vêtue d’un smoking azur, maquillée telle Marlene Dietrich, interpréter Life on Mars de Bowie, assise sur un nuage de carton-pâte, pour constater et d’une, qu’elle n’a rien perdu du feu qui la définissait, et de deux, que son visage est d’origine, et de trois, qu’elle est belle. Par Marie COLMANT A vous entendre, le tournage paraît presque drôle. Le film l’est aussi, Garrel s’amuse même parfois avec vos cheveux rebelles ! Je fais des films parce que je suis mal coiffé ! Et c’est terrible ! J’ai de vrais problèmes avec ma coiffure. Or, Garrel est très à cheval sur les cheveux propres, pour être le plus naturel possible. Je n’ai jamais osé lui dire la triste vérité : « Je ne peux pas me laver les cheveux et venir ensuite sur le plateau, je suis infilmable comme ça. » Il ne vous a pas choisi que pour vos cheveux, non plus… Il m’a choisi en raison des films que j’ai tournés avec Chantal Akerman. C’est son premier film depuis quinze ans sans son fils Louis… Il m’a dit qu’il n’avait pas très envie de filmer son fils faisant l’amour à des jeunes femmes dans des chambres de bonnes. C’est une bonne raison. Garrel me voulait comme je suis : « Saint-Germain dépressif », un peu hanté, qui ne peut pas oublier sa femme, même s’il la trompe. C’est peut-être ça, le sujet du film : on n’est rien sans l’autre… Oui, quand elle n’est plus là, tout se délite. Ils travaillaient ensemble, faisaient des films à deux, et puis après la séparation : plus rien ! L’OMBRE DES FEMMES, de Philippe Garrel, avec Stanislas Merhar et Clotilde Coureau. ENTENDU « Je fais des films quand ça me brûle, quand ça me consume trop de rester chez moi à me branler devant une photo de Jake Gyllenhaal. » Xavier DOLAN, membre du jury officiel en compagnie de Jake Gyllenhaal (Les Inrocks, 1er octobre 2014). ET AUSSI… La critique en anglais cannois de Mad Max : Fury Road Par Poly GLOTTE C’est décidément l’année RACHEL WEISZ ! En compétition officielle avec deux films pendant la quinzaine (Youth de Paolo Sorrentino et The Lobster de Yorgos Lanthimos), l’actrice jouera dans Snatchback, le thriller de Pete Travis sur le trafic d’enfants. Elle est également à l’origine du projet, et le coproduit. Hier soir, L’Oréal Paris a sorti le grand jeu pour l’ouverture du Festival. En plus de leurs habituées Julianne Moore, Liya Kebede, Doutzen Kroes et Fan Bingbing, deux petites nouvelles ont gravi les marches : NAOMI WATTS et Karlie Kloss. A leur bras, John Legend, qui travaille sur un projet spécial avec la marque. A l’honneur avec Grace de Monaco qui avait ouvert le Festival l’an dernier, NICOLE KIDMAN est en pourparlers pour jouer dans la comédie un peu dingue How to Talk to Girls at Parties, une sorte de Roméo et Juliette version punks contre aliens réalisée par John Cameron Mitchell, qui l’a dirigée dans Rabbit Hole. Annoncé au Marché du Film, SIMON BAKER (aka le Mentalist), va diriger son premier film et y interpréter le rôle principal. Il s’agit d’un thriller dramatique, Breath, adapté du best-seller de Tim Winton. Autre bonne nouvelle : le scénario est signé Gerard Lee (derrière la glaçante série néo-zélandaise Top of The Lake). Flesh ! Flesh ! Flesh ! The new Mad Max movie is all about human beings treated like flesh. People there dont really have a « body » : they are blood reservoirs (men) or egg makers (women). Oh, and the famous Max doesn’t have any importance either : it’s much more a film about Furiosa, a female rebel, and the five hot women she tries to save from a very very bad guy with huge yellow teeth. It’s noisy, too long and very simplistic, the whole story consisting in two gigantic races between funny machines. Please, give us back Mel Gibson ! MAD MAX : FURY ROAD, de George Miller, avec Charlize Theron et Tom Hardy (Hors compétition). JEUDI 14.05.2015 - 3 G R A Z I A DA ILY C A N N ES 1 Illustration Iris HATZFELD Trop pas La chronique de Gérard LEFORT « AUX LIONS LES COUINEURS ! » Mais qu’est-ce qu’ils ont les journalistes, couineurs notoires, à dire des méchancetés sur le 68e Festival international du cinéma de Cannes ? Nota bene : « Tara-dzingboum », façon invasion de la Pologne par les Walkyries, c’est cette alerte symphonique qui se déclenchera automatiquement dans cette chronique à chaque fois que seront mentionnés tous les titres de noblesse du Festival. Il n’est pas interdit non plus de se prosterner, telle Dame Margareth Rutherford dans Passport to Pimlico lorsqu’elle rencontre le dernier descendant des Dukes of Burgundy : « Your Grace ! », dit-elle (comme Kelly ?) Première cible pleine de fléchettes, les membres du jury. A commencer par le président, qui est deux, ce qui, on peut le concéder, est plus troublant qu’une faute de conjugaison. Qui sont qui ? C’est la question existentielle. Les Coen argueront qu’ils sont deux parce qu’ils sont frères. Et qu’ils font toujours tout à deux (du moins pour la confection de leurs films). Mais pourquoi s’indigner de ce dualisme ? Question trouble d’identité, on imagine la quintessence du tollé si la présidence avait échu aux frères Wachowski qui, comme chacun sait, ne le sont plus tout à fait, vu que Larry, le cadet d’Andy, a muté en sister sous le ravissant prénom de Lana (comme Turner ?) Les autres membres du jury sont tout autant discutés. Comme quoi Rossy de Palma aurait un grand nez, même de face. Sophie Marceau (Sophiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiie !!!!). « Quant à Xavier Dolan, sa présence au jury maintient la pression d’un festival de performances capillaires plus ou moins peroxydées » Interview express Albane CLERET Promo des films le jour, fêtes privées la nuit : elle règne sur la Croisette. Par Perrine SABBAT 6 - JEUDI 14.05.2015 1 Sienna Miller, un Q.I. plat. Rokia Traoré (Rokia qui ?). Guillermo del Toro, une compétence certaine à pédaler dans le guacamole. Jake Gyllenhaal, une tendance maniaco-dépressive à se prendre pour une légende. Et Xavier Dolan, un accent joual à décorner les caribous. Comme tout cela est misogyne, raciste, homophobe, voire débile. Con. C’est au contraire tous ces soi-disant défauts qui sont des qualités. Rossy de Palma a du pif, accessoire essentiel quand on est promue dénicheuse de truffes. Sophie Marceau (Sophie !). Sienna Miller prend son temps pour réfléchir, et alors ! Rokia Traoré, chanteuse, est fièrement malienne, alors gaffe au maraboutage des médisants. Guillermo del Toro a repris des tacos, et moi-même, je viens de me resservir un litre de mojito. Jake Gyllenhaal a toujours 11 ans et demi dedans sa tête, ce qui tombe bien puisque son premier rôle en 1991 dans La Vie, l’amour, les vaches de Ron Underwood reste à ce jour sa meilleure performance. Quant à Xavier Dolan, sa présence au jury maintient la pression d’un festival de performances capillaires plus ou moins peroxydées (cf. le plat de spaghettis sur sa tête dans Tom à la ferme). Bref (et tabernacle) : aux lions les crétins ! Un cliché qui est vrai sur vous-même ? Je suis un peu une hystérique du détail. La chanson qui vous transporte sur le dancefloor à Cannes ? I Wanna Be Your Lover de Prince. J’adore ce titre, il me met instantanément de bonne humeur. Le disque que vous écoutez trop ? Keith Jarret, The Köln Concert. Je l’écoute depuis plus de quinze ans, ce solo de piano arrive toujours à me détendre. Votre héros dans la fiction cannoise ? Guido, interprété par Roberto Benigni dans le film La Vie est Belle, Grand Prix du Jury en 1998. Votre style à Cannes en trois mots ? Petite robe noire. Ce qui inspire votre style ? Mon humeur ! Votre drogue légale favorite ? L’adrénaline. Quand je reçois un coup de fil m’annonçant que Leonardo DiCaprio débarque dans dix minutes, en plein milieu de la soirée du film Blood Ties de Guillaume Canet, ce qui pourrait être un énorme stress me stimule encore plus. Votre geste beauté cannois quotidien ? La pommade d’Herve Herau (le thérapeute de la peau chouchou des stars, NDLR) Le lieu idéal pour un RDV ? Dans la baie de Cannes, sur un bateau, loin de tout… Le détail qui tue tout ? La pluie ! Terrasse By Albane, de 10 à 19 heures et Club By Albane de minuit à 4 heures. Rooftop du JW Marriott. DEMANDEZ LE PROGRAMME Jeudi 14 Compétition Umimachi Diary (Notre petite sœur) de Kore-Eda Hirokazu (16 h 00. Grand Théâtre Lumière). Il racconto dei racconti (Tale of Tales) de Matteo Garrone (11 h 30 + 22 h 30. Grand Théâtre Lumière). Hors compétition Mad Max : Fury Road de George Miller (8 h 30 + 19 h 30. Grand Théâtre Lumière). Un certain regard An de Naomi Kawase (11 h 00 + 19 h 15. Salle Debussy). Un etaj mai jos (L’Étage du dessous) de Radu Muntean (14 h 30 + 22 h 00. Salle Debussy). Quinzaine L’Ombre des femmes de Philippe Garrel (9 h 00 + 19 h 30. JW Marriot). Master class de Jia Zhangke (17 h 00. JW Marriot). Semaine de la critique Les Anarchistes d’Elie Wajeman (8 h 30 + 20 h 00. Miramar). Sleeping Giant d’Andrew Cividino (11 h 30 + 17 h 00 + 22 h 30. Miramar) Cannes labo Par Olivier SÉGURET Un concept téméraire soutient cette chronique : le Festival de Cannes préfigure toujours quel que chose. La difficulté consiste à deviner quoi. Souvent, on ne s’en rend compte qu’après coup : la vague bling-bling des années 2000 trouve sans doute une origine solide ici, elle s’est mûrie sur la Croisette à la fin du siècle dernier avant de devenir une norme internationale. Idem pour le partage du globe en quartiers médiatiques auquel se sont livrés les grands groupes de communication : c’est à Cannes qu’ils ont expérimenté une bonne part de leur stratégie. Pareil pour la mythologie, devenue universelle, du tapis rouge. Bien sûr, il existait avant et ailleurs d’autres red carpets, mais c’est le festival qui en a élaboré les codes, servant de banc d’essai et de plateforme de lancement aux grandes marques de la mode et de la cosmétique. Dans un pays peu enclin au mécénat industriel, c’est encore UP SALON DE L’AUTO Cannes ressemble toujours à Cannes. Les looks sont toujours les mêmes, la Croisette et la rue d’Antibes aussi. On a compté 8 Porsche et 9 Lamborghini en 1 heure. Immuable. Rassurant. LE PETIT MAJESTIC Le seul vrai bar de Cannes, avec ses bières chaudes et ses pastis. Le spot parfait pour commencer les hostilités. Toujours ouvert très tard. Fréquenté par les Anglais, les critiques, les producteurs, les travailleurs du festival, les fêtards. ARRIVÉE EN TRAIN La SNCF anticipe toujours aussi bien le festival. Compter minimum une heure de retard par TGV. As usual. Et les zones d’arrivée de la gare de Cannes sont encore en travaux. DOWN Cannes qui a savamment imposé le modèle du sponsoring, construisant un modèle économique très particulier, où se mélangent l’apparat républicain et la haute joaillerie, le prestige avant-gardiste et les capsules à café, les empoignades critiques et le rouge à lèvres dernier cri, la célébration de l’art et la consécration du commerce… Il y a une leçon à tirer de cette capacité du festival à offrir une anticipation de notre monde : Cannes existe aussi fort en tant que scène qu’en tant qu’écran, et c’est sans doute là le secret de sa puissance et de sa pérennité. La gigantesque estrade de la ville n’est pas que l’écrin des meilleurs films du monde, elle leur tient tête. C’est elle que les festivaliers affrontent dès la projection finie, elle sur laquelle ils sont priés de défiler, elle dans laquelle ils n’ont d’autre choix que de s’immerger. Mais alors, 2015 ? Que peut-on flairer dans l’air festivalier qui pourrait se comprendre comme un message du futur proche ? C’est ce qu’on va voir… PHOTOS : THEODORA RICHTER ; DR GR A Z IA DAI LY C A N N E S Umimachi Diary (Notre petite sœur) ET PENDANT CE TEMPS-LÀ... Par Perrine SABBAT PHOTOS : E-PRESS ; SIPA (1) Rachel Weisz squatte la compétition officielle avec deux films : The Lobster et Youth. Rédaction : 8, rue François-Ory, 92 543 Montrouge Cedex Tél. : 01 41 33 50 00. Fax : 01 41 86 16 75. Directeur de la rédaction : Joseph Ghosn Rédactrice en chef Print-Digital : Sabine Maida Rédactrice en chef technique : Elena Fèvre Directeur artistique : Adrien Pelletier Administrateur de la rédaction : Véronique Chaubin Directrice casting : Sarah J. Di Bona Chef de service photo : Zohra Mokhtari. Rédacteur en chef Grazia Daily Cannes : Philippe Azoury Journalistes : Luc Chessel, Gérard Lefort, Perrine Sabbat, Olivier Séguret, Julien Welter Photographe : Julien Mignot Rédacteur en chef digital : Patrick Thévenin Journalistes grazia.fr : Anais Delcroix, Pauline Pellissier. 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Louise Bourgoin, dans Je suis un soldat (Un certain regard). Maïwenn, l’une des deux réalisatrices en compétition officielle avec Mon roi. ELLES VONT ENFLAMMER CANNES Diane Kruger, dans Maryland (Un certain regard). Ceci n’est pas un moodboard fantasmé, mais le casting rêvé du 68e Festival de Cannes. Pendant onze jours, toutes ces actrices ont rendez-vous sur la Croisette. Elles viennent pour défendre un film en compétition, monter les marches, assister à des soirées. De tout cela, on ne perdra rien chaque jour dans cette page. A demain pour le début des festivités ! Emma Stone, Woody Allenisée pour la seconde fois dans Irrationnal Man (L’Homme irrationnel) (Hors compétition). Natalie Portman, avec son premier film, A Tale of Love and Darkness (Une histoire d’amour et de ténèbres) (Séance spéciale). Emily Blunt, dans Sicario (Compétition officielle). Golshifteh Farahani, dans Les Deux Amis de Louis Garrel (Semaine de la critique). Cette nuit à cannes Soirée Swarovski x The Hollywood Reporter au Carlton : cocktail au bar Madame Monsieur à 21 h 30 suivi d’un dîner dans le Grand Salon à 22 h 30. Guest d’honneur : Sienna Miller, membre du jury. 2 Soirée L’Oréal uniFrance dans La Suite L’Oréal au Martinez à 21 h. On y croisera Naomi Watts, Julianne Moore, Leïla Bekhti, Liya Kebede… 3 Soirée « Pink and Black » avec Miranda Kerr et DJ Set de 2 MANY DJ’S à 20 h sur La Plage Magnum. 4 Showcase de Beau de 19 h à 21 h 30 à La Chambre Noire by Belvedere, au premier étage du JW Marriott. 5 Set de Thylacine à La Villa Schweppes, aux Marches. 1 Naomi Watts, dans The Sea of Trees (La Forêt des songes) (Compétition officielle). Rooney Mara dans Carol, de Todd Haynes (Compétition officielle). JEUDI 14.05.2015 - 7 CHANEL.COM # THEONETHATIWANT *CE QUE JE VEUX La Ligne de CHANEL - Tél. 0 800 255 005 (appel gratuit depuis un poste fixe).
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