Cannes sans dormir Notre film du jour Trois souvenirs de

DAILY 17
CANNES
DIM
mai
Cannes sans dormir
JOUR 4 Par Philippe AZOURY
PHOTOS : JULIEN MIGNOT; DR
O
n en était à compter les variations lumineuses,
le passage franc d’un gris crépusculaire à une
teinte pistache un rien brûlée, là sur la ter­
rasse de l’appartement qui donne sur la plage, le vent
maboul enchâssant les nuages – c’est vous dire si à
oublier trop fréquemment de se coucher, on en vient
à commencer par ressentir quelque chose. Qui n’est
pas exactement la fatigue mais davantage une sorte de
maxi concentration. Bloquer sur un nageur, à moins
que ça ne soit un poulpe géant, on ne sait pas. Bugger
sur un voilier. C’est comment qu’on dit « jonque », en
mandarin ? En allumer une première, puis une secon­
de, regarder depuis le balcon les flics en civils surgir
des palmiers pour tenter de stopper net un début de
bagarre – la scène se reproduit toutes les deux heures
en moyenne, l’année tient son premier record. C’est
quand tout se confond que les premiers cris se font
entendre. Au début, c’est très simple : ça ne ressemble
à rien mais ça monte vite en puissance, pour finir par
ne plus ressembler qu’à la plainte velue d’une mouette
qu’on égorge, ou le genre de son qu’une huître ma­
lade peut pousser en vous vomissant dessus.
C’est que nous sommes à deux pas du Martinez. Les
cris, c’est ça, les huîtres-mouettes, ce sont eux : les
fans. Personne ne sait ce qu’ils attendent. Eux savent
à peine qui ils attendent. Leur son non plus, on ne sait
pas trop. Le chat miaule. Le chien aboie. La mouette
crie. Mais le festivalier ? Il crie des prénoms. Y a pas
de nom pour un truc comme ça. Ça n’existe que là,
devant le Martinez. Et c’est vite recouvert, ce matin,
par le vrombissement de trente Jeep kakis de l’armée
américaine qui paradent, devant des accrédités stres­
sés qui courent d’une projo à une interview et qui s’en
foutent complètement, de la Libération, des alliés,
des forces de l’Axe et de toute la smala. Ils rejouent le
D-Day on the beach pour personne, avec des filles en
jupon so 40’s qui saluent la Croisette dans le vide.
« Tu crois que c’est pour un film, Gérard ? » « Mais
chouchou, tu débarques (ou quoi) ? »
Notre film du jour
Trois souvenirs
de ma jeunesse
Avec ce long-métrage lentement mûri,
Desplechin se rappelle à son adolescence
et se souvient de nous. Par Philippe AZOURY
Au fur et à mesure que le Festival
prend ses marques, l’absence au sein
de la compétition du film d’Arnaud
Desplechin apparaît de plus en plus
comme un mystère. Du style épais.
Du genre que l’on ne s’explique pas.
La chambre jaune, puissance alpha.
Impossible de le dire autrement :
on ne voit pas. On ne voit pas com­
Rencontre
15 minutes
d’effet domino
avec Sienna
Miller
page 3
ment un festival comme Cannes peut
encore passer à côté de ça. Les mul­
tiples raisons supposées – Desplechin
venu bien trop souvent, une sélec­
tion française désireuse de montrer
un visage plus concerné, social –
tombent d’elles-mêmes. Car rien
jusqu’ici n’arrive à la cheville de Trois
souvenirs de ma jeunesse.
Il faudrait presque ironiser sur cette
mise à l’écart de la compétition :
effectivement, ce film est infréquen­
table, puisqu’il ne peut pas faire
autrement que de condenser à dose
dangereuse tout le romanesque
français, toute une histoire du tour­
ment amoureux, et de la fierté bles­
sée. Ce film est malade d’une vieille
maladie qui se nourrit d’elle-même.
Et qui, à force, a fini par dessiner
une ligne. Qui commence avec
Flaubert et court jusqu’à Jean Eus­
tache. Ou Truffaut.
De quoi se souvient-on quand on
voudrait tout oublier ? De moments
ténus. L’effondrement du mur de
Berlin et le sentiment pour une
génération que l’adolescence s’est
terminée contre ce maudit mur,
écrasée et libre à la fois. Du soleil
trop blanc qu’il faisait lorsque,
bacheliers de province, nous nous
sommes exilés vers une capitale qui
Tapis Rouge
Coucou !
Vous me
reconnaissez ?
C’est Rossy !
page 7
proposait tant et offrait si peu. On
se souvient des crâneries pour lui
plaire. Cette histoire éternelle, le
cinéma la raconte depuis longtemps
et il la raconte de moins en moins
bien. On ne sait pas, il faut se
l’avouer, comment Desplechin s’y
prend, lui, pour restituer les choses
en retrouvant le pouvoir intact de
la première fois. On dira : en filmant
des visages qui n’ont jamais été fil­
més avant ceux, solaires et inquiets,
de Quentin Dolmaire et de l’in­
croyable Lou Roy-Lecollinet ? Si
seulement c’était si simple…
Non, ce film sur des moins de 20 ans
que Desplechin a mis vingt ans à
faire, porte en lui toutes les strates
du temps. Les larmes qui nous
viennent devant lui ont 20 ans elles
aussi. On était trois. On marchait
dans la rue, en manteau de laine
gris, elle devant, et nous deux der­
rière. Plus vraiment new wave, Jules
et Jim retardataires. On aurait dit
Freddy, Sweep et Dina. On croyait
vivre dans un dessin d’Yves Chaland.
On croyait vivre dans un film. Des­
plechin s’est souvenu de nous.
TROIS SOUVENIRS DE MA JEUNESSE,
d’Arnaud Desplechin. Avec Quentin
Dolmaire, Lou Roy-Lecollinet
(Quinzaine).
GRAZIA DAILY CANNES # 4. Gratuit
Retrouvez tous
les numéros du GRAZIA
DAILY CANNES en PDF sur
Notre coverstar #4 : Léa Seydoux, très Callas en Miu Miu et bijoux Chopard, direction la montée des marches pour The Lobster.
DIMANCHE 17.05.2015 - 1
Critique
RECHERCHE GUS
DÉSESPÉRÉMENT
Devant le désastre de The Sea of Trees,
le fan club de Gus Van Sant n’a plus
que les yeux pour pleurer. Par Olivier SÉGURET
Le bataillon critique de la rédaction de Grazia Daily Cannes a
connu le premier mini-débat de
fond de son histoire hier, à la sortie du Gus Van Sant. Les termes
du désaccord pourraient se résumer ainsi : doit-on classer The Sea
of Trees au rayon des échecs complets ou dans la catégorie des
plantages tragiques ? On voit que,
sur le fond, tout le monde est
d’accord pour dire que le film est
raté et même nul. C’est plutôt du
côté des conséquences que chacun en tire que les interprétations
divergent : le grand Gus Van Sant
a-t-il simplement raté une marche
comme il arrive parfois aux meilleurs cinéastes, ou alors, ayant
admi­nistré la preuve d’un gâtisme
incurable avec The Sea of Trees,
doit-on le tenir pour cramé, foutu, irrécupérable ?
Le sujet, pourtant, semblait lui
aller comme un gant : une immersion macabre dans la « forêt des
suicidés », vaste massif boisé tapissant les pieds du mont Fuji, où
les désespérés viennent mettre fin
à leurs jours. Pas seulement les
Japonais : comme de nombreux
Occi­dentaux, l’Américain moyen
Arthur Brennan (Matthew Mc­
Conau­ghey) fait lui aussi le voya­
ge, ayant décidé d’en finir après la
mort de son aimée (Naomi Watts).
4
La forêt d’Aokigahara, qui existe
réellement, est en passe de devenir un mythe moderne et a déjà
suscité à ce titre quantité d’analyses sous l’angle « phénomène de
société ». Le film, lui, ne cherche
pas à en dire quoi que ce soit. Elle
n’est que le décor exotique au
fantasme morbide du héros et elle
permet un certain confort de scénario au cinéaste, qui en fait au
fond un usage utilitaire quand ça
l’arrange. Ce qui est surtout raconté au spectateur, c’est le désespoir d’un veuf.
Cela aurait pu se défendre : Van
Sant est un champion de la
concen­tration intime. Mais pour
nourrir les motivations suicidaires
d’Arthur, le film organise un récit
en flash-back d’une platitude effarante, qui semble là pour nous
rappeler à chaque instant à l’ordre
d’une banalité mélo. La conjugalité médiocre unissant Arthur et
Joan avant le cancer de celle-ci,
puis la rédemption inachevée de
leur couple avant un second coup
fatal jeté par le destin (comme s’il
fallait que le héros soit accablé de
façon vraiment trop injuste) finis­
sent de pousser The Sea of Trees
dans une impasse que l’on pres­
sent avec crainte dès la première
demi-heure. Arthur aurait pu
aussi bien tenter de se pendre
dans un bois près de chez lui, cela
n’aurait pas changé grandchose…
Par indulgence, on pourra garder
le souvenir bienveillant d’une
seule scène, qui cite Dreyer et
« l’homme qui pleure » de Gertrud. Pour le reste, on effacera au
plus vite ce Van Sant de nos mémoires, comme on efface un vieux
fichier USB buggé.
THE SEA OF TREES de Gus Van Sant.
Avec Matthew McConaughey, Naomi
Watts (Compétition).
Qui êtes-vous ?
Ariane Labed
L’actrice française expérimente les amours
chiennes dans le très animal et surprenant The
Lobster, de son compagnon Yorgos Lanthimos.
Par Julien WELTER Photo Julien MIGNOT
D’où vient-elle ?
D’Athènes, où elle est née il y a
trente ans de parents français tombés amoureux de la Grèce. Elle est
l’un des visages du nouveau cinéma grec : « Crise oblige, on est plus
soudés et rock’n’roll qu’en France. »
Où est-elle ?
Dans The Lobster, qui imagine
une dictature obligeant chacun à
vivre en couple. « La première fois
que je suis venue à Cannes, j’animais des soirées Meetic. Le parallèle est réjouissant… »
Où va-t-elle ?
Tourner un film sur les filles à l’armée, et un autre où elle joue un
garçon : « Très physique tout ça,
mais ça me correspond : je gère aussi
une compagnie de danse et théâtre.
Du coup, je peux squatter tous les
types de festivals ! »
2 - DIMANCHE 17.05.2015
THE LOBSTER
de Yorgos
Lanthimos. Avec
Colin Farrell,
Rachel Weisz,
Critique
Comme un ouragan
Une fois encore, l’Acid a repêché une
petite merveille : Pauline s’arrache,
d’Emilie Brisavoine. Documentaire punk
sur une famille pas comme les autres.
Par Luc CHESSEL
« On ne voit plus les grandes histoires d’amour du début de notre vie, ces drames, ces drames, ces tragédies,
ces ouragans qui passaient sur les vies et allez ! qui rasaient, balayaient, maintenant tu regardes, plus rien de
ça, la gentillesse partout, c’est bien, ça, la compréhension, partout… » A sa façon, c’est-à-dire sans façon,
Pauline s’arrache propose un démenti à ces regrets de
Marguerite Duras. Et un démenti docu­mentaire, ce
qui ajoute à son irrévérence.
C’est le film d’une famille : il y a le père, la mère, la
sœur, le frère, et Pauline. C’est aussi un film de famille, vu par la demi-sœur, Emilie Brisavoine. Un
prologue nous présente les uns et les autres sous les
atours niais d’un conte de fées. Et puis ça commence, ça gueule, ça pleure, ça s’aime, ça vit. Ça
balaye grave. Le film tente un équilibre instable
entre la gentillesse (celle, compréhensive, des histoires de princesse) et une sorte de vérité des rapports (celle, tragique, de la vie des adolescentes). La
demi-sœur, cachée derrière son caméscope, est une
demi-présence. Plus ils sont terribles, plus elle est
douce, et comme débordée par la situation. Quand
l’ouragan passe, le point de vue tangue, qui se
cherche une place introuvable – dans le film ou dans
la famille. Elle traque quelque chose qui lui échappe,
et qui nous atteint, indirectement mais en plein dans
la gueule.
C’est ce qui est bien dans les films de famille, ils filment toujours à côté, ne servent qu’à compléter,
quand un jour par hasard on se les repasse, l’intensité du vrai souvenir. Pauline s’arrache, par le truchement du cinéma amateur, nous balance en creux
cette intensité-là, qui nous est refusée et offerte.
Comme ces images de l’enfance de Pauline, où elle
danse avec son père travesti sur Double Je de Christophe Willem : flashback et playback unis dans une
même dinguerie, l’intimité qui reste secrète et le
spectacle absolu, exhib, jouissif. C’est vrai que tous
les costumes lui vont bien.
Celui du père sévère, sur le mode irrationnel des
« allo Papa, ça va ? Arrête de te foutre de ma gueule ! »,
nous donne une des grandes histoires d’amour qui
composent le film, la tendresse trash qui unit la fille
et le père. Lui aime les hommes et une femme, Maud,
la mère, et c’est le deuxième ouragan. Enfin, l’histoire de Pauline et Abel, qui finit mal, dans un torrent de larmes indifférentes à la demi-caméra qui les
recueille. Ces drames, ces drames, se succèdent dans
un désordre apparent, monté comme une imitation
de la vie. Se dessine pourtant une sorte de chemin
dans le film, la recherche par Pauline d’une vérité sur
soi-même, quête adolescente ou universelle. Toute
jeunesse est en elle-même un journal filmé. Il y a ce
grand moment de révélation, un monologue de Pauline qui comprend sa place dans la famille, avec la
sagesse la plus expressive : « Comme si mon crâne
venait de chier une merde constipée depuis des années. » Une épiphanie ordinaire, parmi toutes celles
que le film ménage et provoque. La grande claque
d’un début dans la vie.
Léa Seydoux
et Ariane
PAULINE S’ARRACHE
Labed
d’Emilie Brisavoine. Long-métrage documentaire.
(Compétition).
(Acid).
PHOTO : DR
GR A Z IA DAI LY C A N N E S
15 MINUTES AVEC…
SIENNA MILLER
Membre le plus glam du
jury, l’actrice anglaise nous
parle de sa passion pour
les frères Coen et du
nouveau tournant dans
sa carrière. Par Perrine SABBAT
Photo Julien MIGNOT
Amie de la maison,
Sienna Miller
porte un collier
Atelier Swarovski.
BITCHY MARIE
Photos : DR
« Un petit slim blanc
couvert d’ananas »
Le Festival de Cannes a ses syndromes, genre
Stendhal tu vois, mais dans une version moins éthérée. Cette calamiteuse pathologie qui s’abat sur le festivalier lambda à mi-parcours a un nom : l’achat coup
de cœur. Une pulsion probablement due à l’effet
combiné d’un fading des neurones, et d’une messmerisation générale sous l’effet des strass et des paillettes.
Le diagnostic est sans appel : vous êtes idiote. Et si par
malheur, vos déambulations somnambuliques entre
deux importants meetings vous amenaient rue d’Antibes, le pire est à craindre. Définition du pire :
n’importe quels robes, vestes, sandales, pantalons audessus de 500 €, immettables sinon à Can­nes. Un petit slim blanc couvert d’ananas turquoise géants à
630 € peut subitement se révéler irrésistible. Ce qui se
passe dans la tête de la malade à cet instant est
consternant de mauvaise foi : « Mais bien sûr que tu le
remettras à Paris. » En tant qu’ex-victime qui se
soigne, je témoigne ici de la culpabilité lors du retour
à Paris. Et que dire du moment où le jean blanc réapparaît l’année d’après, toujours avec ses ananas géants
turquoise hélas, exhumé des affaires d’été. Si vous
riez, vous êtes en voie de guérison.
Le truc qui remonte le moral, c’est que les milliardai­
res ne sont pas épargnés. La preuve encore avec cette
dernière info : Jay-Z aurait dépensé une fortune pour
offrir à Beyoncé un œuf de dragon de Game of
Thrones d’environ 30 kilos. Quelqu’un peut m’expliquer? Idiote, je vous dis. Par Marie COLMANT
C’est votre premier Festival
de Cannes, vous qui n’aviez
pas pu venir l’an dernier pour
Foxcatcher…
Oui, car je tournais American Sniper. Pourtant, c’était la première
fois que j’avais un film en compétition ici ! Mais grâce à Mark Ruffalo qui m’a envoyé un e-mail tout
de suite, j’ai eu l’impression de
vivre avec l’équipe la récompense
de Bennett Miller. Je suis donc
d’autant plus heureuse d’être là
cette année, membre du jury.
Comment avez-vous réagi quand
ils vous ont appelée pour vous en
faire la proposition ?
J’étais émue, et honorée. Savoir
que les frères Coen, qui sont deux
des plus grands réalisateurs au
monde, présideraient le jury, et
avoir l’opportunité de voir tous
ces films, puis d’en discuter avec
les plus grands noms du cinéma,
allait être l’expérience d’une vie.
Saviez-vous déjà qui seraient
vos confrères ?
Non, je crois que j’étais parmi les
premiers membres choisis. Mais
c’était un cadeau de Noël à chaque
fois que j’apprenais qui serait là !
Quel genre de membre du jury
allez-vous être ?
Je pense sincèrement qu’il y a des
gens dans cette pièce dont l’opinion sera plus légitime que la
mienne ! Donc je serai très respectueuse. Je ne prévois pas
d’être belligérante, ou d’avoir
l’esprit de contradiction par principe. Je ne suis pas critique de cinéma. On parle de ce qu’on aime.
Et j’ai le sentiment qu’on est déjà
sur la même longueur d’onde.
Vous avez le temps de faire
la fête ?
Ce n’est pas vraiment la priorité
pour moi cette année ! Il y a évidemment des événements auxquels je dois assister le soir, au
même titre que les projections à
8 h 30. Tout est une question
d’équilibre. Mais je risque d’être
un peu fatiguée à la fin.
Vous enchaînez sur un tournage ?
Pas tout de suite. En août, je pars
sur le prochain James Gray, The
Lost City of Z, avec Charlie Hunnam et Robert Pattinson. Je suis
très excitée : James est un immense réalisateur, ses films ont
été présentés en compétition ici,
il a été membre du jury… Puis en
novembre, je tourne celui de Ben
Affleck, Live by Night, un film de
gangsters à Boston pendant la
Pro­hi­bition.
Sentez-vous une différence
à votre égard depuis American
Sniper ?
Non, pas vraiment. Travailler
avec Clint Eastwood dans le plus
gros film de l’année n’a définitivement pas aidé ma carrière. (Elle
rit.) C’est un effet domino, dans
ce business, vous savez. Mais je
pense surtout que j’ai été meilleure en audition, j’ai enfin appris
mes textes comme il faut. J’étais
éparpillée avant. Avec le temps, je
suis devenue plus sérieuse.
ENTENDU
« Que Dieu me pardonne, j’ai
mangé un morceau d’un vrai cœur
dans Tale of Tales. Un médecin La critique
pourra vous dire qu’il manque vrai­ en grec
ment une artère. » SALMA HAYEK, actrice petit chinois
sans concession, lors de la conférence de presse.
ET AUSSI…
de
The Lobster
Par Poly GLOTTE
NATALIE PORTMAN,
dont le 1er film était présenté hier en séance spéciale hors compétition, va incarner Jackie
Kennedy dans le film de Pablo Larrain,
Jackie, sur les quatre premiers jours qui
ont suivi l’assassinat de John F. Kennedy.
A la production, l’homme qui lui a offert
son oscar sur pointes : Darren Aronofsky.
On l’avait adorée dans Love
Coach et Les Producteurs :
UMA THURMAN renoue
avec le genre comique. Annoncée
à Cannes, elle va jouer dans The BRITs
Are Coming, une comédie excentrique de
J.C. Chandor (All Is Lost, A Most Violent
Year) sur un couple anglais qui part pour
Los Angeles et prévoit un vol de bijoux.
Il l’avait déjà choisie pour
être sa Marilyn. MICHELLE
WILLIAMS rejoint le
casting de la nouvelle production sur
les mines d’or d’Harvey Weinstein, Gold,
réalisée par Stephen Gaghan. Elle jouera
l’épouse de Matthew McConaughey, qui
présentait hier le film de Gus Van Sant,
The Sea of Trees, en compétition.
Les fans de Twin Peaks
étaient en deuil depuis
un mois. Dernier rebondissement : c’est bien DAVID LYNCH qui
dirigera le remake de la série culte.
C’est le maître qui l’a annoncé lui-même
vendredi sur Twitter. Showtime produira
même plus que les neuf épisodes
commandés à l’origine. Résultat en 2016.
O Kotsos (The Lobster), philmos
ellènos de Yorgos Lanthimos, diégomme istoria erotika de andropos
kai phamas. En phutura, oi protagonistos, alla gar (mais pas trop),
deviennaï Dzoos. Gar moira s’en
melétis, kai logos infinitos (bla-blathènes). E beautiffoula alla poèma
antikita de Illiada de Homère, gendra aurora os dactylos pinkos. Nè
Colin Farrell, ô bandanto !, è néo
Aquile, kai Rachel Weisz, è proto
Ellena troya niké.
THE LOBSTER, de Yorgos Lanthimos
(Compétition).
DIMANCHE 17.05.2015 - 3
GR A Z I A DAI LY C A N N E S
Illustration Iris HATZFELD
4
GR A Z IA DAI LY C A N N E S
Trop pas
La chronique de Gérard LEFORT
PRÊTES À TOUT
Il y a des notions dont on n’a pas
conscience le reste de l’année et
qui, à Cannes, prennent une
consistance certaine. Par exemple
le concept de « personal assistant ». Qu’est-ce à dire ? Pas sim­
ple, car il ne faut pas confondre le
personal assistant avec plein d’au­
tres choses qui assistent aussi : par
exemple, le coach sportif dont la
mission impossible, que, hélas, il
a acceptée, sera de vous tordre la
jambe derrière le cou tout en faisant travailler des muscles que
vous saviez même pas qu’ils existaient. Et en plus, il sourit, ce
con ! Ne pas confondre non plus
le personal assistant avec une
simple secrétaire (même la jolie
rousse qui ébouriffe son chignon
pour révéler à son boss que depuis plus de dix ans il côtoie la
queen des bombasses), ni avec
l’assistant shopper, chargé de
tout acheter à votre place (et je
dit bien tout, à plus ou moins
70 € le gramme), ni enfin avec le
personal blow job (en français,
boy ou girl, une pute).
Cela dit, et c’est ça le must, le personal assistant, telle une salade
folle, tambouille toutes ces fonctions. A prix big bisou (comptez
quand même un grand cabas de
pétrodollars), le personal assistant (pas moins de vingt agences
sur la Frencq Riviera), est là pour
vous accompagner dans toutes
les tâches ridicules et épuisantes
qui, dès potron-minet, vous pour­
rissent le planning : se lever, boire
un café, regarder Bitchy Marie
sur i-Télé, prendre une douche,
avaler un grand verre de ce jus de
pruneaux qui fait aller, retourner
se coucher. Autrement dit : le personal assistant se réveille à votre
place, regarde la télé à votre
place, boit à votre place (surtout
ce putain de jus de pruneaux !) et
se rendort à votre place (include
le détour par les woua-woua).
STRING PANTHÈRE
Pendant ce temps-là, vous voilà
enfin concentré sur les questions
importantes : string panthère pour
la soirée des Cocks d’or ? Troi-
4
sième étage de lunettes de soleil
greffées à même le brushing ?
C’est quoi déjà, le nom de ce
cocktail que tu en bois une gorgée et tu remontes la Croisette
par les palmiers ?
Pour les demandes particulières,
ne soyez pas timide, le personal
assistant est prêt à tout pour vous
satisfaire. Jean-Rictus, votre aîné,
veut reconstituer Pirates des Caraïbes dans la baie de Cannes ?
Donald-Velib’, votre cadet, veut
faire du ski nautique derrière le
porte-avions Charles-de-Gaulle ?
Et tous les deux veulent finir la
nuit à la table de Miss Coca ? No
problem at all (le personal assistant, même s’il est natif de La
Napoule, ne parle qu’anglais, enfin… qu’il croit). Et voilà, über
damned !, que vous avez oublié
d’emmener promener le quatuor
de lévriers barzoï qui vous précède dans les soirées lancées. No
problem (etc.), le personal assistant, équipé d’un sac à caca canin
(siglé au nom d’un fleuron de
prêt-à-porter international), pour­
voi­ra à cet affreux souci, il faut le
dire, un rien mouisant.
Et le soir venu, quand il vous
monte des envies, moyennant un
misérable supplément (attention
on accepte plus les chèques !), le
personal assistant se penchera
avec enthousiasme sur le problème (as cyber turlutte or virtual
minette).
DEMANDEZ
LE PROGRAMME
Dimanche 17
UP
HARO SUR LA COCA
Compétition
Mon roi de Maïwenn
(8 h 30 + 22 h 15. Grand Théâtre
Lumière).
Carol de Todd Haynes
(12 h 00 + 19 h 00.
Grand Théâtre Lumière).
Hors compétition
Asphalte de Samuel Benchetrit
(19 h 15. Salle du Soixantième).
Un certain regard
Zvizdan (Soleil de plomb)
de Dalibor Matanic
(11 h 00+16 h 30. Salle Debussy).
Kishibe no tabi (Vers l’autre rive)
de Kiyoshi Kurosawa
(14 h 00+21 h 45. Salle Debussy).
Quinzaine
Allende, mi abuelo Allende
de Marcia Tambutti Allende
(9 h 00+17 h 00. JW Marriot).
Le Tout Nouveau Testament
de Jaco Van Dormael
(11 h 30+19 h 30 JW Marriot).
Green Room de Jeremy Saulnier
(14 h 30+22 h 15. JW Marriot).
Semaine de la critique
Ni le ciel ni la terre de Clément
Cogitore (8 h 30. Miramar).
Dégradé de Tarzan et Arab Nasser
(11 h 30+17 h 15+22 h 00. Miramar).
Coin Locker Girl de Han Jun-hee
(14 h 30. Miramar).
Programme courts métrages 1
(20 h 00. Miramar).
Acid
Gaz de France de Benoît Forgeard
(11 h 00 : Studio 13 + 20 h : Arcades).
La fête Pauline s’arrache
au Vertigo, cabaret
transformiste bien connu
des aficionados cannois
sous le nom du « 7 », ou
encore « Chez Miss Coca ».
Et la Coca, qui a renouvelé
la quasi-totalité de son
show, est plus dingue que
jamais. Ça nous a rappelé
d’autres fêtes à Séoul
CHERCHEZ LA PALME
Le sentiment pour l’instant
que la compétition cherche
encore son choc, sa
surprise. Certains l’ont déjà
eue avec Le Fils de Saul,
mais le film divise trop
pour créer l’élan
nécessaire. Allez, vite
un film qui renverse
tout le monde.
POST-APOCALYPSE
Les interviews sur des
plages traumatisées
par un vent de dingue :
on n’entend plus rien sur
la bande, et si jamais on
se lève pour aller chercher
une orangeade, il faut
éviter les parasols volants.
Cannes, vendredi et
samedi, c’était Twister.
DOWN
Duel sur red carpet
RACHEL WEISZ VS ANNE BEREST Par Perrine SABBAT
Par Olivier SÉGURET
Robe,
Louis Vuitton.
6 - DIMANCHE 17.05.2015
Robe, Chanel
Haute Couture.
Dans Sans soleil (1982), Chris
Mar­ker annonçait le programme :
« Le plan d’assistance des machines
à l’espèce humaine est le seul qui
offre un avenir à l’intelligence. » Et
dans ce diabolique projet, Cannes
a encore, toujours, été pionnier.
Le code-barres identifiant chaque
accrédité, scanné à l’entrée des
projections du Palais, a par exem­
ple été introduit ici il y a belle lurette, scellant dès les années 90 le
devenir-paquet de lessive du journaliste festivalier. Mais aujour­
d’hui, alors que nous som­mes désormais tous conscients de
tra­vailler nuit et jour pour la NSA,
alors que nos mails et nos smartphones sont profanés à chaque
minute, alors que la moindre de
nos activités est susceptible de finir dans le rapport déposé chaque
matin sur le bureau de Barack
Obama (lequel ne doit pas être
déçu), à quoi rime exactement le
flicage archaïque auquel se livrent
les escouades de vigiles cannois ?
Le Festival est respectueux du
Droit et toutes ses procédures informatiques sont conformes au
règle­ment de la Cnil. Impossible,
en théorie, de tracer nominalement un journaliste.
LA CROISETTE PARANO
Interdit, en principe, de refiler à
un attaché de presse la liste des
critiques ayant montré patte blan­
che à l’entrée, ou la sortie d’une
projo… Mais il n’est nul besoin de
développer une paranoïa pour
songer qu’à Cannes, on est probablement bien plus surveillé qu’on
ne l’imagine. La traçabilité du critique est un fantasme en voie de
concrétisation. Son Apple Watch
signalera bientôt en temps réel les
moments où son cœur s’emballe,
ceux où il s’émeut, ceux où il
s’échauffe, puis ceux où il s’endort
et rêve enfin d’un monde où les
drones, les IMSI-catchers et les
lois sur la surveillance et le renseignement n’existaient pas…
PHOTOS : GETTY/VUITTON ; CHANEL ; JULIEN MIGNOT
Cannes Labo
ET PENDANT CE TEMPS-LÀ...
Par Perrine SABBAT
Photos Julien MIGNOT
PHOTOS : MAXIME BRUNO/CANAL+ ; VISUAL
Xavier Dolan, un membre
du jury qui prend son rôle
très au sérieux.
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Riccobono à Le Muy
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Arto, Taverny (95)
N° ISSN : en cours
Joséphine de La Baume
a bravé le vent sur la terrasse
de La Chambre Noire by
Belvedere pour assurer le
showcase de son groupe Singtank.
L’extravagante
Rossy de Palma
contient son tempérament
de feu chez Chopard.
Juste le temps d’une photo.
LE VENT
SE LÈVE
Adorable Rachel Weisz,
en pleine conversation avec
un ami, qu’elle est elle-même
allée chercher à l’entrée.
Un courant d’air. Puis une
rafale qui balaye la Croisette,
rendant impossible une photo
sur un rooftop, une interview
sur une terrasse,
l’atterrissage d’un avion
à Nice. Mais la vie cannoise
continue : Naomi Watts
inaugure une boutique,
Julianne Moore remet
le Trophée Chopard, Rachel
Weisz s’extirpe du carré VIP,
laissant l’air s’engouffrer.
Et Cannes respirer.
Emma Stone s’inquiète :
avec son smoking,
Woody Allen fait de l’ombre
à sa traîne Dior.
Cette nuit
à cannes
… Meanwhile au Grand Journal
Antoine de Caunes jouait les princes charmants
hier, devant Diane Kruger, venue présenter
Maryland, et Salma Hayek, à l’affiche du film
Tale of Tales.
Yelle de 19 h à 21 h 30 à la Chambre
Noire by Belvedere, au premier étage
du JW Marriott.
1
Soirée Le Tout Nouveau Testament
de Jaco Van Dormael (avec Catherine
Deneuve, Benoît Poelvoorde, Yolande
Moreau et François Damiens),
à la plage Magnum.
2
3 After party du dîner Kering
au A Club by Albane, sur le rooftop
du JW Marriott.
Soirée du film Mon roi de Maïwenn
(avec Vincent Cassel, Louis Garrel et
Emmanuelle Bercot) au A Club by Albane
sur le rooftop du JW Marriott,
à partir de 0 h30.
4
Bain de fans mûres
pour Colin Farrell,
et selfies obligatoires.
5
Soirée du Film Carol de Todd Haynes,
avec Cate Blanchett et Rooney Mara
à partir de 21 h. Lieu tenu secret.
6
Jennifer Cardini à la Villa Schweppes,
aux Marches.
DIMANCHE 17.05.2015 - 7
1
PHOTOS : XXXXXX XXXXXXXXX
GR A Z IA DAI LY C A N N E S
8 - VENDREDI 15.05.2015