Test urinaire PCA3, cancer de la prostate et autres pathologies prostatiques

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da Immuno-analyse & Biologie spécialisée
Test urinaire PCA3, cancer de la prostate et autres pathologies
prostatiques
V. Vlaeminck-Guillema,b,*,c
aFaculté de médecine Lyon-Est, Université Claude-Bernard Lyon-1, Lyon, France
bUnité d’oncologie moléculaire et transfert, Service de biochimie biologie moléculaire sud,
Centre hospitalier Lyon-Sud, Chemin du Grand-Revoyet, Pierre-Bénite, France
cUMR CNRS 5534, Centre de génétique et de physiologie moléculaires et cellulaires,
Université Claude-Bernard Lyon-1, Villeurbanne, France
Le test urinaire PCA3 facilite, en association avec le dosage sérique du PSA, le diagnostic
précoce du cancer de la prostate. Les études cliniques ont montré son intérêt dans l’aide à la
décision de biopsies prostatiques dans toutes les situations où le PSA s’avère insuffisant. Il permet en particulier un
gain pour la spécificité d’une démarche d’orientation des patients vers les biopsies prostatiques. Les pathologies
prostatiques non cancéreuses, comme l’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) ou les prostatites, peuvent
s’accompagner d’une augmentation du PSA sérique. Dans ces situations, le score urinaire PCA3 n’apparaît pas
augmenté et conserve ses capacités discriminatives pour le diagnostic du cancer de la prostate. La présence d’une
HBP ou d’une prostatite ne constitue donc pas une contre-indication à la réalisation du test et une augmentation du
score ne peut pas être rattachée à cette seule pathologie, orientant vers la réalisation de biopsies. De même, le score
PCA3 n’est pas influencé par un traitement par inhibiteur de la 5-réductase, habituellement prescrit pour le traitement
d’une HBP ou d’une lésion pré-cancéreuse. Les lésions prostatiques pré-cancéreuses peuvent s’accompagner d’une
élévation du score PCA3, en moyenne plus faible que celle constatée habituellement dans le cancer de la prostate.
RÉSUMÉ
Mots-Clés: Cancer de la prostate; Hypertrophie bénigne de la prostate; Prostatite
Dosaggio urinario del PCA3, cancro della prostata e altre patologie prostatiche. Il dosaggio
urinario del PCA3 facilita, in associazione con il dosaggio del PSA nel siero, la diagnostica
precoce del cancro della prostata. Gli studi clinici hanno evidenziato il suo interesse in aiuto alla decisione di effettuare
biopsie prostatiche in tutte quelle situazioni in cui il PSA risulta inadeguato. In particolare offre una migliore specificità
nell’orientamento del paziente verso la biopsia. Le patologie prostatiche non tumorali, come l’ipertrofia prostatica
benigna (IPB) o le prostatiti possono indurre un aumento del PSA nel siero. In queste situazioni, lo score urinario del
PCA3 non si mostra aumentato e conserva le sue capacità discriminanti come biomarcatore del cancro della prostata.
La presenza di IPB o di una prostatite non costituisce quindi una controindicazione all’esecuzione del test ed un
aumento dello score non può essere ricondotto a questa sola patologia, orientando il clinico alla realizzazione della
biopsia. Inoltre il PCA3 score non è influenzato dal trattamento con inibitore della 5α-reduttasi, prescritto abitualmente
per il trattamento della IPB e delle lesioni pre-cancerose. Le lesioni prostatiche pre-cancerose possono essere
accompagnate da un incremento del PCA3 score, in media più basso di quello rilevato solitamente nel cancro della
prostata.
RIASSUNTO
Parole chiave: Cancro della prostata; Ipertrofia prostatica benigna; Prostatite; Neoplasia intraepiteliale; PCA3
Urinary PCA3 test, prostate cancer and other prostatic diseases. Urinary PCA3 test became
one of the most developed biological examinations to facilitate, in association with blood PSA,
early diagnosis of prostate cancer. Clinical studies demonstrated its interest when deciding prostate biopsies in all
situations in which seric PSA reveals inaccurate. It particularly offers a better specificity when orienting patients to
biopsy. Non-cancerous prostate diseases, such as benign prostate hyperplasia (BPH) and prostatitis, can induce an
increase in seric PSA. In these conditions, urinary PCA3 score doesn’t increase and conserves its discriminative
properties of prostate cancer biomarker. Neither BPH nor prostatitis constitute a contra-indication for the test and an
increase in PCA3 score cannot be explained by one or the other, therefore resulting in prostate biopsy. Likewise,
treatment by 5-reductase inhibitor doesn’t influence PCA3 score. Precancerous lesions can be associated with an
increase in PCA3 score, usually less marked than in case of prostate cancer.
ABSTRACT
Key words: Prostate cancer; Benign prostate hyperplasia; Prostatitis; Prostatic intraepithelial neoplasia; PCA3
Riprodotto da Immunoanal Biol Spéc 2012;27:104-111 con l’autorizzazione del direttore scientifico della rivista, Dott. M. Bogard
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INTRODUCTION
Le test urinaire PCA3 : outil diagnostique du
cancer de la prostate
La recherche de biomarqueurs pour le diagnostic du
cancer de la prostate et en particulier le développement du
test urinaire PCA3, découle des performances médiocres
du dosage sérique du PSA. Si la sensibilité de ce marqueur, devenu incontournable depuis les années 1980, est
excellente, sa spécificité est largement insuffisante. Son
augmentation peut constituer le témoin du développement
d’un cancer prostatique. Elle résulte d’une libération
accrue dans le sang circulant par modification de la polarité des cellules sécrétoires prostatiques et l’altération de
la membrane basale de l’épithélium. L’augmentation de la
concentration sérique de PSA peut également être le reflet
de pathologies prostatiques bénignes, comme l’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) ou la prostatite. De
nombreux patients sont ainsi dirigés vers les biopsies
prostatiques, seules capables à l’heure actuelle d’affirmer,
sous réserve des aléas de l’échantillonnage, la présence
de cellules cancéreuses prostatiques. Dans ce contexte,
jusqu’à deux tiers de ces biopsies se révèlent finalement
négatives et peuvent a posteriori être considérées comme
ayant été inutilement réalisées1. Outre les limites du PSA
sérique, le développement du test urinaire PCA3 résulte
de la conjonction d’autres circonstances comme la facilité
de recueil d’un prélèvement urinaire, la pertinence de ce
recueil au plus près de la glande prostatique et surtout
l’identification d’un gène hautement spécifique du cancer
de la prostate : le gène PCA32. Présent sur le chromosome 9q21-22, ce gène comporte quatre exons, dont le
deuxième est fréquemment ôté par épissage alternatif lors
de la transcription3. L’expression du gène PCA3 est en
effet limitée à la prostate, avec une faible intensité dans la
prostate normale, en particulier quand on la compare à la
surexpression observée dans au moins 95 % des cancers
de la prostate2,4. Ont ainsi été décrits plusieurs transcrits
de tailles différentes, au gré de cet épissage alternatif et
de sites alternatifs de polyadénylation au niveau du quatrième exon. L’exon 4 se trouve ainsi segmenté en trois
régions (4a, 4b, 4c) selon que le premier le deuxième ou
le troisième site de polyadénylation est utilisé3. Le transcrit
le plus fréquent contient les exons 1 et 3 et les parties 4a
et 4b de l’exon 4. La régulation de l’expression du gène
PCA3 n’a été que peu étudiée mais serait positivement
influencée par les androgènes5,6. Aucun des ARN produits
par le gène PCA3 ne semble pouvoir être traduit en protéine, le gène PCA3 rejoignant ainsi la famille des gènes
à ARN non codants7. Il en résulte une relative difficulté lors
du développement d’un test diagnostique utilisant le gène
PCA3: aucune technique basée sur le dosage de la protéine ne peut être envisagée.
La première publication d’une utilisation du test urinaire PCA3 pour le diagnostic du cancer de la prostate
date de 20038. Rapidement, une standardisation méthodologique est apparue, à la fois pour le recueil des urines
et pour la technique de mesure, essentiellement du fait
qu’il est impératif de pouvoir disposer d’un échantillon urinaire fiable, c’est-à-dire suffisamment riche en cellules
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prostatiques porteuses de l’information (présence ou non
d’ARN du gène PCA3). La qualité de l’échantillon est ainsi
évaluée par la mesure du nombre de copies du gène PSA
parce qu’il est spécifique de la prostate : la présence de
copies d’ARN de PSA dans les urines montre que des cellules prostatiques y ont été exfoliées ; leur nombre souligne le fait que cet échantillonnage prostatique est a priori
représentatif de la prostate entière. Concernant les modalités de recueil des urines, il a été démontré qu’un toucher
rectal préalable augmentait la richesse des urines prélevées en cellules prostatiques porteuses de l’information
(augmentation de la proportion d’échantillons informatifs)9
et que ce toucher rectal devait être « appuyé » (trois pressions par lobe prostatique, suffisantes pour déprimer de 1
cm la surface de la prostate, de la base vers l’apex)10.
Concernant la technique de mesure, après les premiers
essais utilisant la RT-PCR8,11, il a été établi que la proportion d’échantillons informatifs pouvait être augmentée par
une sélection préalable de l’ARN d’intérêt, aboutissant à
un enrichissement de l’échantillon en ARN d’intérêt10.
Cette sélection utilise des billes magnétiques recouvertes
de séquences oligonucléotidiques spécifiquement complémentaires de l’ARN cible. L’amplification de cet ARN
présélectionné repose, dans sa dernière version, sur la
transcription (Transcription-Mediated Amplification [TMA]).
Pour la mesure, l’ARN amplifié est marqué par une sonde
complémentaire luminescente selon la technique d’hybridation protectrice (Hybridization Protection Assay [HPA]).
Le nombre de copies est alors évalué par la mesure de la
chimiluminescence, sur la base d’une courbe de calibration. Toutes ces exigences techniques ont été prises en
compte dans l’élaboration d’une formule commerciale
(ProgensaTM PCA3 Assay, Gen-Probe®), qui permet de
mettre à disposition respective du clinicien et du biologiste, un tube spécifique de recueil et de transport des
échantillons urinaires à température ambiante (contenant
un milieu de lyse des cellules urinaires et un stabilisateur
de l’ARN) ainsi qu’une trousse de dosage qui inclut la présélection de l’ARN, son amplification par TMA et sa détection par HPA10. Un score PCA3 est établi : il correspond au
ratio entre le nombre de copies du PSA, ce dernier reflétant la richesse en cellules prostatiques de l’échantillon et
servant de normalisateur.
La littérature actuelle comprend près de 30 études,
totalisant plus de 7000 patients testés12,13. Les patients
recrutés étaient adressés pour biopsies prostatiques du
fait d’un PSA élevé (seuil à 2,5 ou 3 ng/mL), et/ou toucher
rectal anormal et/ou autres facteurs de risque comme des
antécédents familiaux de cancer de la prostate. Pour évaluer la valeur diagnostique du test, les patients étaient
classés en deux groupes selon le résultat des biopsies
prostatiques (positives ou négatives). Le score PCA3 était
alors comparé entre les deux groupes et les performances
statistiques du test déterminées par la construction de la
courbe Receiver Operator Characteristics (ROC) et le calcul de son aire sous la courbe (AUC). À la lumière de ces
études, il est maintenant acquis que12,13:
- la méthode de mesure proposée dans le kit commercialisé par Gen-Probe est pour l’instant celle qui permet le rendu de résultat chez le plus grand nombre de
patients (au moins 94 % d’échantillons informatifs,
souvent plus de 98 %);
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-
le score PCA3, contrairement au PSA sérique, n’est
pas corrélé au volume prostatique;
- le score PCA3 est en moyenne plus élevé chez les
patients avec biopsies positives que chez les patients
avec biopsies négatives;
- le seuil habituellement retenu dans la littérature pour
considérer le test urinaire PCA3 comme positif ou
négatif est à 35;
- un patient avec un score PCA3 positif (= 35) a plus de
risques d’avoir des biopsies positives qu’un patient
avec un score négatif (odds ratio entre 3 et 8);
- malgré la définition d’un meilleur seuil à 35, le score
PCA3 reste un reflet du risque de positivité des biopsies; il est préférable de le considérer comme une
variable continue dont la valeur est positivement et
étroitement corrélée au risque d’avoir des biopsies
positives;
- pour une sensibilité égale, le test urinaire PCA3 a,
dans toutes les études, démontré une spécificité supérieure au PSA sérique;
- les performances du test urinaire PCA3 restent bonnes
(voire sont meilleures) dans le sous-groupe des
patients dont le PSA sérique est compris dans la zone
grise d’incertitude (entre 4 et 10 ng/mL ; spécificité du
PSA autour de 30 %);
- l’existence de faux-positifs ou de faux-négatifs pour le
test urinaire PCA3 implique de ne pas le considérer
comme l’unique critère de décision pour la réalisation
ou non d’une série de biopsies : d’autres éléments cliniques (histoire familiale, antécédent personnel de
biopsies, résultats du toucher rectal), biologiques (PSA
sérique et ses dérivés : forme libre, cinétique, densité)
ou radiologiques (volume de la prostate à l’échographie, suspicion de lésion sur l’échographie et/ou sur
l’IRM) doivent être pris en considération;
- en revanche, il apparaît intéressant d’ajouter le score
PCA3 à ces critères cliniques, biologiques ou radiologiques, car l’addition du test PCA3 à n’importe quel
autre modèle prédictif de la présence d’un cancer sur
les biopsies a montré de manière constante un gain
diagnostique : le score PCA3 est un prédicteur indépendant de la positivité des biopsies14.
L’addition du score PCA3 à ces critères cliniques, biologiques et radiologiques peut s’inscrire dans un nomogramme d’aide à la décision de biopsies prostatiques14-16.
Les études qui ont recherché des corrélations entre le
score PCA3 et la prédiction d’un pronostic ont rapporté
des résultats contradictoires : si la corrélation positive
avec le volume tumoral semble être établie, il reste à
démontrer l’association entre le score PCA3 et le score de
Gleason (déterminé sur la biopsie ou sur la pièce de prostatectomie), le stade pT ou encore le caractère indolent ou
agressif du cancer. Une étude récente suggère que le
score PCA3 est corrélé au nombre de foyers tumoraux au
sein de la glande prostatique17.
Il reste ainsi à déterminer si le score PCA3 peut être
utilisé comme une aide à la décision thérapeutique chez
les patients avec biopsies positives. On ne sait, par exemple, si le test peut être utile pour identifier les patients porteurs d’un cancer indolent et susceptibles de bénéficier
d’une surveillance active, sans traitement radical d’emblée18. Globalement, au vu de ces performances, les indiLigandAssay 17 (1) 2012
cations du test urinaire PCA3 pour le diagnostic du cancer
de la prostate concernent toutes les situations où le
dosage du PSA sérique est, a priori, insuffisant pour aider
le clinicien dans la décision de réaliser des biopsies
prostatiques12,13,19.
Même si une étude récente montre que le bénéfice
apporté par le test PCA3 s’observe aussi pour les patients
adressés pour primo-biopsies20, l’indication la plus évidente concerne les patients avec antécédents de biopsies
négatives : ces biopsies ne renfermant pas de cancer ont
été justement réalisées, pour la quasi-totalité d’entre elles,
du fait d’un PSA augmenté, qui a donc déjà démontré,
chez ces mêmes patients en pratique, ses limites. Une
autre situation théorique est l’existence d’antécédents
familiaux de cancer de la prostate (quand on veut détecter
le cancer le plus tôt possible). Une dernière situation est la
présence d’une pathologie prostatique bénigne connue
pour s’accompagner d’une perturbation du PSA sérique comme l’HBP ou la prostatite (augmentation attendue du
PSA) ou le traitement d’une HBP par un inhibiteur de la 5αréductase (réduction attendue du PSA) - ou la présence
d’une lésion pré-néoplasique qui ne s’accompagne pas
d’une élévation du PSA sérique. Cette revue explore spécifiquement ces états pathologiques bénins de la prostate
et le comportement du test urinaire PCA3 au cours de ces
conditions. En particulier, la réponse à deux questions de
finalités différentes est recherchée:
- la pathologie prostatique bénigne influence-t-elle la
valeur du score PCA3?
- l’existence de cette pathologie prostatique modifie-telle les performances du test urinaire PCA3 ?
Le test urinaire PCA3 dans les états prénéoplasiques de la prostate (HG-PIN et ASAP)
La néoplasie intra-prostatique de haut-grade (HG-PIN)
est caractérisée par une prolifération de cellules épithéliales qui bordent les canaux prostatiques. Les cellules
présentent alors des anomalies cytonucléaires semblables à celles du cancer mais sans la désorganisation
architecturale qui le caractérise. Le terme anglais atypical
small acinar proliferation (ASAP) est utilisé pour des
micro-foyers de prolifération atypique. La discussion reste
entière de savoir si ces lésions correspondent à une entité
anatomopathologique ou s’il s’agit d’un véritable foyer de
cancer trop petit pour être affirmé. Ces deux situations histologiques constituent classiquement les lésions pré-néoplasiques de la prostate.
Les données les concernant sont éparses. Seules
deux études ont mesuré l’expression du gène PCA3. Dans
la première21, cette expression a été évaluée par hybridation in situ à partir de 28 échantillons de cancer prostatique avec tissu normal immédiatement adjacent et 20
échantillons de tissu prostatique non cancéreux, bien à
distance d’un cancer. Les lésions d’HG-PIN exprimaient le
gène PCA3 dans 71 à 96 % des cas, selon la technique
d’HIS utilisée (type de marquage de la sonde d’hybridation)21. Dans la deuxième étude, l’expression du gène
PCA3 a été évaluée par RT-PCR sur une carotte spécifiquement prélevée lors d’une série de biopsies prostatiques réalisée chez chacun des 186 patients inclus22. Les
patients ont ensuite été classés en trois groupes selon que
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l’examen histologique de l’ensemble des carottes a permis
de conclure en la présence de cancer (n = 74), d’HBP (n
= 100) ou d’HG-PIN (n = 12). Dans cette étude, l’expression de PCA3 dans le groupe HG-PIN est apparue significativement la plus forte non seulement comparée au
groupe HBP mais aussi au groupe cancer22. Sur la taille
des effectifs, et surtout le design de cette étude, on ne
peut affirmer que la carotte « sacrifiée » pour l’étude d’expression comporte réellement les lésions qui ont été retenues en diagnostic final. Par conséquent, il convient de
prendre ces résultats avec précautions. À notre connaissance, il n’y a pas d’étude ayant mesuré l’expression du
gène PCA3 dans les lésions d’ASAP.
Comme pour l’HBP, les études cliniques évaluant le
test urinaire PCA3 ont a priori inclus des patients présentant des lésions pré-néoplasiques. Certaines le précisent
bien sans distinguer toutefois des résultats spécifiques8,2327. Dans deux études, 26 à 36 % des patients qui ont un
score PCA3 faussement positif (score supérieur au seuil
sans cancer prostatique sur les biopsies), présentaient
des lésions d’HG-PIN ou d’ASAP28,29. Une étude plus
récente30, basée sur l’une des précédentes28 montre bien
que les patients qui ont des biopsies négatives malgré un
score PCA3 supérieur à 35 ont plus souvent des lésions
d’HG-PIN que les patients avec biopsies négatives et
score PCA3 inférieur à 3530. On ne peut bien-sûr éliminer
la possibilité que les biopsies prostatiques aient ignoré un
cancer de la prostate adjacent à ces lésions : la répétition
des biopsies dans ces situations permet de rectifier le
diagnostic en cancer dans environ 50 % des cas d’HG-PIN
et près de 100 % des cas d’ASAP. Il reste qu’il faut considérer que ces lésions peuvent s’accompagner d’une élévation du score PCA3. De fait, de fac¸on plus pragmatique, il a bien été suggéré par plusieurs études que les
patients avec HG-PIN et/ou ASAP ont un score PCA3
moyen plus important que celui des patients avec d’autres
conditions prostatiques bénignes (prostate normale ou
HBP) mais moins important que celui des patients avec
cancer28,31-34. Une étude plus récente, comparant 76
patients cancéreux et 13 patients avec des lésions multifocales d’HG-PIN, ne montre pas de différence entre les
scores PCA3 moyens35. Dans cette étude, la présence
d’une HG-PIN multifocale sur les biopsies constitue même
un déterminant indépendant (en particulier de la présence
ou non d’un cancer) du score PCA335. En conséquence,
même si le test PCA3 garde de bonnes capacités discriminatives entre cancer prostatique et HG-PIN -l’AUC a été
évaluée à 0,629 dans une étude espagnole spécifique33 son efficacité semble moindre que lorsqu’on veut distinguer le cancer d’autres atteintes prostatiques bénignes
(AUC à 0,705).
Globalement, les lésions pré-néoplasiques de la prostate peuvent donc s’accompagner d’une augmentation du
score PCA3. L’intérêt du test dans la décision d’une nouvelle série de biopsies lorsque l’une ou l’autre des lésions
a été reconnue reste à définir.
Le test urinaire PCA3 dans l’hypertrophie
bénigne de la prostate
L’HBP correspond à une augmentation du volume de
la prostate de nature bénigne en rapport avec le dévelop64
pement d’un adénome dans la zone glandulaire située
autour de l’urètre. Sa physiopathologie est mal connue
mais il est certain que la sénescence du tissu prostatique
est un élément déterminant, de même que l’imprégnation
androgénique. L’HBP est une affection bénigne qui ne
dégénère pas en cancer. Elle en constitue, en revanche,
le principal diagnostic différentiel dans la mesure où elle
s’accompagne très souvent, du fait de la simple augmentation du nombre de cellules glandulaires, d’une augmentation du PSA sérique. Plusieurs études ont quantitativement évalué, par la technique de RT-PCR, l’expression du
gène PCA3 dans des échantillons d’HBP. L’expression de
PCA3 n’est pas constante : de 0 à 57 % des échantillons
testés36-39. Elle a toujours été mesurée comme inférieure,
de 5 à 66 fois, à celle observée dans les échantillons de
cancer prostatique8,22,38-42. Dans le sang, l’ARN de PCA3
est détectable chez 20 % des patients porteurs d’une
HBP43,44. Dans les urines, les données sont paradoxalement moins détaillées. Toutes les études ayant évalué les
performances du test urinaire PCA3 ont inclus des
patients qui avaient une augmentation du PSA sérique. En
dehors du cancer de la prostate, l’HBP constitue en effet
l’autre cause la plus fréquente d’augmentation du PSA.
L’inclusion de patients porteurs d’une HBP au sein du
groupe de patients témoins (patients dont les biopsies ne
montrent finalement pas de cancer de la prostate) est
donc inéluctable même si la plupart des études ne donnent pas clairement cette information. Elle est également
suggérée par les valeurs extrêmes du volume prostatique
des patients inclus, souvent très évocateurs, à plus de 100
mL, d’HBP14,25,27,45-47. Une explication réside d’ailleurs
dans le fait que l’affirmation d’une HBP reste toujours difficile sur le seul examen histologique de biopsies prostatiques. Certains auteurs ont parfois précisé que des
patients avec HBP avaient été inclus8,10,48 et ont considéré
d’emblée que le score PCA3 dans cette population ne
devait pas être différent de celui du groupe de patients
avec prostate normale31. Ainsi, dans cette étude à gros
effectif (étude nord-américaine portant sur 570 patients),
96 des 364 patients avec biopsies négatives (26 %)
avaient soit une prostate histologiquement normale soit
une HBP et ont été regroupés sous la rubrique no pathology. Le score PCA3 moyen était significativement plus
bas dans ce groupe que chez les 206 patients avec biopsies positives31. Seules trois études ont spécifiquement
étudié, par RT-PCR quantitative, le test urinaire PCA3
chez des patients atteints d’une HBP6,49,50. Dans ces
études, le score PCA3 médian était significativement plus
élevé dans le groupe cancer que dans le groupe HBP. La
capacité du test PCA3 à distinguer les deux groupes de
patients était bonne avec une AUC entre 0,68 et 0,814,
une sensibilité entre 60 et 63 % et une spécificité entre 91
et 100 %6,49,50, des performances au moins similaires à
celles observées dans les autres études portant sur des
patients témoins, globalement regroupés sous le vocable
« non cancéreux » (cf. supra). Finalement, la meilleure
explication d’un score PCA3 aussi bas dans l’HBP est que
la prostate reste parfaitement saine. Cela est conforté par
la démonstration, par plusieurs équipes, de l’absence de
corrélation entre le score PCA3 et le volume prostatique27,28,31,48.
Un autre point à considérer est le retentissement du
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traitement de l’HBP sur les performances du test PCA3 :
le fait d’être ou d’avoir été traité pour une HBP influencet-il les résultats du test PCA3 ? Il n’y a pas d’étude disponible évaluant le test PCA3 chez des patients ayant bénéficié par voie haute ou par voie endoscopique de la résection d’une HBP. Une étude anglaise récente a porté sur 50
patients ayant une augmentation du PSA après vaporisation laser de la prostate51. Les effectifs restent faibles,
nécessitant des études confirmatives, mais le test PCA3
conserve de bonnes performances avec une AUC à 0,773,
une sensibilité à 83 % et une spécificité à 59 %. Les autres
options thérapeutiques de l’HBP sont les médicaments. Il
n’y a aucune raison de penser que la phytothérapie
(Permixon®, Tadenan®) ou les α-bloquants (alfuzosine et
apparentés) puissent avoir un effet sur le test PCA3. En
revanche, le doute existe pour les inhibiteurs de la α5réductase (5ARI, finastéride ou dutastéride). Empêchant
la conversion de la testostérone en sa forme active (dihydrotestostérone), ils diminuent la production locale d’androgènes actifs, inducteurs de la prolifération, et diminuent
ainsi l’importance de l’hypertrophie adénomateuse. Il est
ainsi reconnu qu’un traitement par 5ARI entraîne une diminution du volume prostatique et de l’expression de gènes
androgéno-régulés comme le PSA52. L’interprétation du
dosage sérique du PSA doit tenir compte de cet effet : en
pratique clinique, on double classiquement la valeur obtenue sous traitement pour se rapprocher des conditions
normales. On peut s’interroger sur les modifications
induites par un tel traitement sur le score PCA3 lui-même
ou les performances du test dans la mesure où le gène
PCA3 est lui aussi androgéno-régulé5,6 et que le score
PCA3 est calculé comme un ratio dont le dénominateur
est le nombre de copies d’ARNm du PSA. Une étude clinique hollandaise a porté sur 16 patients porteurs d’une
HBP et neuf patients atteints d’un cancer localisé de la
prostate, tous traités pendant trois mois par du dutastéride53. Du fait de la faiblesse des effectifs, encore accentuée par une randomisation selon la posologie du dutastéride (0,5 ou 3,5 mg/j), cette étude n’a pas apporté d’élément convaincant, les variations du score PCA3 étant individuellement très aléatoires. De plus, du fait du design de
cette étude préliminaire, aucune évaluation du retentissement du traitement sur les performances diagnostiques du
test n’a pu être réalisée53. Plus complète est une étude
toute récente, utilisant la population de plus de 8000
patients. Ces patients ont été recrutés dans le cadre d’un
essai thérapeutique international multicentrique. Le but
étant d’évaluer l’effet du dutastéride administré pendant
quatre ans sur la diminution du risque de cancer de la
prostate54. Le critère de jugement principal de cette étude
n’était donc pas le traitement de l’HBP mais de vérifier que
ce traitement a efficacement contrôlé les symptômes liés
à l’HBP, tout en réduisant le volume prostatique55. Dans la
sousétude spécifique du test PCA352, le test a été disponible chez 930 patients du bras dutastéride et 1072
patients du bras placebo. Le test a été réalisé soit à la
deuxième année de traitement (n = 649), soit à la quatrième (n = 659), soit aux deux (pas d’indication sur le
nombre de patients ayant eu les deux prélèvements), toujours avant une biopsie prostatique et jamais avant l’introduction du traitement. Il n’y a donc pas eu d’évaluation
directe, individu par individu, du devenir du score PCA3
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sous traitement. En moyenne, le traitement par dutastéride a induit une diminution du nombre de copies d’ARNm
du PSA dans les urines (environ deux fois moins de copies
dans le groupe dutastéride). Il en découle une diminution
du nombre d’échantillons informatifs : 78 % à deux ans, 79
% à quatre ans, contre 94 % à deux ans ou à quatre ans
dans le bras placebo52. Le traitement par dutastéride a
aussi induit une diminution du nombre de copies d’ARN du
PCA3, avec le même ordre de grandeur (environ deux fois
moins), aboutissant à l’absence de modification significative du score PCA3. Les performances du test PCA3 ne
semblent pas modifiées avec une AUC à 0,668 à deux ans
ou à 0,628 à quatre ans52. Ces chiffres sont dans la fourchette de ceux des études ayant exclu les patients sous
5ARI. Ils sont proches de celui obtenu chez les 1072
patients du groupe placebo, chez lesquels l’AUC était de
0,69323.
En conclusion, la présence d’une HBP ne modifie pas
le score PCA3 par rapport à une population d’hommes
avec prostate normale. Les performances du test urinaire
pour le diagnostic du cancer de la prostate ne sont pas non
plus altérées. L’influence d’un traitement chirurgical de
l’HBP sur les performances du test reste à évaluer même
si une étude préliminaire n’a pas montré de difficulté particulière après vaporisation par laser endoscopique.
L’existence d’un traitement par 5ARI ne semble pas devoir
constituer une contre-indication à la réalisation du test ni
nécessiter une interprétation particulière (pas d’adaptation
du seuil par exemple). On peut toutefois s’attendre à une
fréquence accrue d’échantillons non informatifs.
Le test urinaire PCA3 dans les prostatites
Parmi les prostatites, on peut distinguer celles qui surviennent de fac¸on aiguë (toujours d’origine infectieuse) et
celles qui se développent sur un mode chronique (Tableau
1). Une élévation du PSA est habituellement observée. À
Tableau 1 Classification des prostatites chroniques selon
le National Institutes of Health (NIH).
Classe de prostatite
Description
I
Infection aiguë de la
prostate
Infection récidivante de
la prostate
II
III
IIIa
IIIb
IV
Prostatite aiguë
bactérienne
Prostatite
chronique
bactérienne
Syndrome
douloureux
pelvien chronique
Inflammatoire
(prostatite
chronique
abactérienne)
Non
inflammatoire
(prostatodynie)
Prostatite
asymptomatique
Pas d’infection décelable
Leucocytes dans les
sécrétions prostatiques
ou le sperme
Pas de leucocytes dans
les sécrétions
prostatiques ou le
sperme
Découverte fortuite
(histologique ou
urinaire) de leucocytes
65
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da Immuno-analyse & Biologie spécialisée
notre connaissance, il n’y a pas d’étude disponible sur
l’expression du gène PCA3 dans des lésions d’inflammation aiguë ou chronique de la prostate. Comme pour l’HBP
ou les lésions pré-néoplasiques, les études cliniques
ayant évalué les performances diagnostiques du test urinaire PCA3 ont probablement inclus des patients avec
diagnostic final d’inflammation dans le groupe des patients
sans cancer. Le plus souvent, les quelques études qui le
précisent8,10,29 ne donnent pas pour autant de données
spécifiques sur cette sous-catégorie de patients, même si
la lecture des données brutes8 ou un commentaire de la
discussion29 fournit l’information qu’un score PCA3 élevé
peut être observé chez des patients avec diagnostic final
d’inflammation chronique. Une seule étude a rapporté des
résultats spécifiques chez les patients avec « inflammation
de la prostate»31. Dans cette étude américaine, 114 des
364 patients sans cancer (31 %) avaient ce diagnostic
générique. Leur score PCA3 moyen n’apparaissait pas différent de celui des patients ayant une prostate histologiquement normale ou une HBP31. La principale limite de
cette étude est l’absence de précision sur la nature de la
prostatite. Une étude récente a de fait évalué le score
PCA3 chez 34 patients avec prostatite chronique documentée56. Le diagnostic de prostatite chronique, basé sur
des éléments cliniques, a été affiné par la réalisation d’une
version simplifiée du test des quatre verres de MearesStamey. Ce test comprend un massage prostatique qui
peut être assimilé au toucher rectal standardisé nécessaire avant le prélèvement urinaire destiné au test
PCA310. Dans l’étude, que les patients aient une prostatite
chronique bactérienne (prostatite de type II), une prostatite
chronique abactérienne (prostatite de type IIIa) ou une
prostatodynie non inflammatoire (stade IIIb), le score urinaire PCA3 était toujours négatif (≤ 28, en moyenne à 9 ±
7, extrêmes: 1 à 28)56. Dans la prostatite aiguë, peu de
données sont disponibles. En montrant un exemple d’élévation du PSA sérique sans élévation du score urinaire
PCA3 chez un patient avec prostatite aiguë, Marks et
Bostwick19 soulignent que ce dernier test permet a priori
d’expliquer, par sa valeur prédictive négative, l’élévation
du PSA. Ainsi à distance de l’épisode infectieux aigu (alors
que le PSA est bien souvent encore augmenté), peuvent
être évitées des biopsies prostatiques inutiles voire même
dangereuses dans le cas d’une infection glandulaire installée secondairement sur un mode subaigu ou chronique.
Le corollaire est qu’une élévation du score PCA3 chez un
patient porteur d’une inflammation de la prostate ne peut
être expliquée par cette atteinte et que des biopsies sont
alors recommandées.
semble se préciser au gré des publications. Les lésions
précancéreuses de la prostate comme l’HG-PIN et l’ASAP
peuvent s’accompagner d’une élévation du score PCA3 et
peuvent donc interférer avec le diagnostic du cancer de la
prostate, ce d’autant qu’elles l’accompagnent souvent au
sein de la glande prostatique. L’HBP et la prostatite (aiguë
ou chronique) ne semblent pas induire d’augmentation du
score urinaire PCA3 et n’influenceraient pas sa capacité à
identifier les patients qui doivent bénéficier des biopsies
prostatiques. Les traitements de l’HBP, en particulier les
inhibiteurs de la 5a-réductase, n’empêchent pas la réalisation du test et ne nécessitent pas, comme ils le font
pour le PSA sérique, d’adaptation particulière pour d’interprétation.
DÉCLARATION D’INTÉRÊTS
L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en
relation avec cet article.
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CONCLUSION
Le test urinaire PCA3 constitue un outil diagnostique
qui semble apporter au dosage sérique du PSA un gain en
termes de spécificité et de valeur prédictive négative. Son
intérêt vise, dans la démarche diagnostique du cancer de
la prostate, à mieux orienter les patients justifiants de biopsies prostatiques. Les pathologies prostatiques non cancéreuses comme l’HBP ou une prostatite peuvent s’accompagner d’une élévation du PSA sérique, à l’origine de
la réalisation probablement inutile de biopsies prostatiques. La place du test urinaire PCA3 dans ces situations
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Dottor C. Boisson-Gaudin
Fédération de biochimie Nord
Hopital de la Croix-Rousse
Hospices civils de Lyon, Lyon, France
e-mail: [email protected]
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