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Nous avons lu…
Milena AGUS, Luciana CASTELLINA. Prends garde. Liana Levi, 2015 – R AGU
Un fait historique : 1946, dans les Pouilles, quatre sœurs, propriétaires
terriens, sont malmenées par la foule en colère, deux décèdent.
Milena Agus s’empare de ce fait divers et invente l’histoire de ces quatre
sœurs, riches mais qui vivent comme des pauvresses, à l’écart du monde.
Luciana Castellina prétexte le fait divers pour retracer l’histoire méconnue
d’une époque en s’appuyant sur les archives.
Les deux histoires sont présentées tête-bêche, chacun choisissant sa priorité :
le roman ou l’histoire, et de toute manière les deux sont complémentaires.
Une œuvre très originale. (Muriel)
Vincent ALMENDROS. Un été. Éditions de Minuit, 2015 – R ALM
L’été. Un vieux voilier. Deux frères. Deux couples.
Au mois d’août, Jean demande à son frère Pierre de le rejoindre à Naples. Il le
rejoint avec sa compagne, une jeune scandinave appelée Lone. Tous trois
embarquent sur un voilier, bientôt rejoint par Jeanne, la femme de Jean.
Commence alors une croisière où les protagonistes s’observent, se cherchent.
Il ne se passe pas grand-chose dans le dernier roman de Vincent Almendros :
quelques visites sur des îles, une soirée arrosée, des baignades, des regards,
une attention particulière à la faune, aux jeux du soleil sur la mer. Un été en
somme. Pourtant la prose si particulière de l’auteur, à la fois solaire et
détachée, nous rappelle ces films lumineux et terribles des années 60. En 95
pages, Almendros arrive à rendre palpable cette atmosphère trouble,
discrètement érotique… jusqu’au bouleversement final. Un court moment de
lecture, un court instant de plaisir, à l’image de ce qu’a vécu Pierre. (François)
Russel BANKS. Un membre permanent de la famille. Actes Sud, 2015 – R BAN
12 nouvelles, 12 personnages…
Chacun a un monde particulier, une situation différente. Et pourtant on
retrouve bien l’univers de Russel Banks : solitude, deuil, relations familiales
difficiles, des personnages qui ne supportent pas leur vie, ou leurs familles, et
qui plus ou moins consciemment les détruisent.
Une femme veut acheter une voiture. Elle se retrouve seule dans un parc de
voitures d’occasion, à l’abri sur un toit pour échapper au chien de garde… Un
homme est invité à passer Noël chez son ex-femme et son nouveau mari,
entouré de leurs anciennes connaissances et surtout de l’enfant du nouveau
couple… Une mère tente de retrouver sa fille qu’elle a jetée à la rue suite à
des problèmes de drogue… (Anne-Laure)
Jean-Philippe BLONDEL. Un hiver à Paris. Buchet-Chastel, 2015 – R BLO
Le narrateur reçoit un courrier d’une personne connue il y a de nombreuses
années, à propos d’un certain Mathieu.
Retour en arrière : Paris, classe prépa du lycée D. Le narrateur, Victor, arrive
à la capitale pour suivre ses études supérieures. Ses parents, restés en
province, ne comprennent pas grand-chose à ses études, à la charge de
travail. Il s’en éloigne peu à peu. Pourtant, il n’a pas plus de connaissances à
Paris. En cité U à Nanterre, il passe son temps à réviser, rendre des copies,
lire… En deuxième année, il parle un peu avec Mathieu, arrivé depuis peu. Ils
fument ensemble devant le lycée. Un jour, Mathieu sort en trombe d’une salle
de classe et se suicide en sautant dans la cour. C’est un choc pour les élèves
mais la vie continue, les examens approchent, les professeurs parlent très peu
du drame. Victor passe auprès des autres pour « l’ami » de Mathieu. Il
rencontre très souvent le père de Mathieu et lâche peu à peu ses études,
s’étant trouvé des excuses pour se justifier… (Anne-Laure)
Alexis BROCAS. La Vie de jardin. Gallimard, 2015 – R BRO
Elle s'appelle Estelle, Marie-Laure, Florence ou Solenne. Un jour, elle quitte
Paris pour une maison avec jardin. Pour une banlieue près des flux d'argent,
loin du bruit des pompes : l'endroit idéal pour élever des enfants. Il s'appelle
Aymeric, Benoît, Flavien ou Pierre. Son quotidien : branlettes, brimades,
quatre cents coups, amitiés éternelles. Au pensionnat, qu'a-t-il à faire des
rêves de sa mère ? Il est financier, avocat, agent immobilier ou chercheur.
Tard le soir, il construit le monde de demain. Et si ce devait être notre monde ?
Alexis Brocas nous offre le récit d'une riche banlieue pavillonnaire : un roman
d'une ambition folle, la peinture d'une époque. À suivre sur trente ans, la vie
de dizaines de personnages. La subtilité de l'analyse sociologique rejoint le
plaisir de raconter une histoire. Né à Paris en 1973, Alexis Brocas a grandi à
Saint-Cloud. La Vie de jardin est son premier roman pour adultes.
Entre 1981 et 2015, de l’arrivée à Saint Cloud jusqu’à aujourd’hui, on suit
l’adolescence des enfants et leur entrée dans la vie adulte, très souvent
chaotique.
Une mise en place qui se fait doucement, chaque personnage (et ils sont
nombreux!) est parachuté, à nous de faire le lien, de les remettre dans l’ordre.
On peut être perturbé au départ mais une fois dans l’histoire on ne la lâche
plus. Un récit qui laisse à penser que c’est autobiographique. Une sévère
critique de la bourgeoisie, de l’éducation religieuse, de celle des parents, des
banlieues chics.
Très intéressant, un bon moment de lecture, quelques passages lourds
cependant. (Angélique)
Charly DELWART. Chut. Seuil, 2015 – R DEL
Dans la Grèce plongée au coeur de la crise, une jeune fille de quatorze ans
décide d'arrêter de parler et se met à écrire sur les murs d'Athènes, au milieu
des inscriptions qui se multiplient pour dénoncer le système qui a conduit à
l'effondrement. Ses slogans à elle sont tournés vers l'après, car elle est de la
génération qui devra reconstruire, croire. Ses parents se séparent, sa sœur ne
veut rien savoir, son frère s'est exilé, son entourage est perplexe. Mais elle
tient bon.
La narratrice est une ado qui se sent à part, en dehors de son groupe de
copines avec qui elle écrit, car elle ne parle pas des garçons. Elle vit avec ses
parents qui ne s’entendent plus du tout. Elle a une grande sœur plus âgée
avec qui la communication est difficile et un frère, l’aîné, qui est parti finir ses
études à Londres pour fuir tout ça, la crise du pays et celle des parents ! La
narratrice va décider d’arrêter de parler, elle en a besoin, c’est sa façon de
réagir aux évènements. Cette dernière est intéressée par les aphorismes,
slogans, et pensées qui sont écrits sur les murs de la ville d’Athènes, à tel
point qu’elle va les noter, puis elle va, elle-aussi en écrire, d’abord dans un
cahier puis sur les murs. À son tour elle va s’intéresser à l’amour, et son
mutisme ne sera pas un obstacle. Peut-être est-il justement une force dans
son rapport aux autres. Un livre très intéressant sur l’adolescence, la Grèce et
le contexte économique actuel vu par les yeux de cette adolescente. De très
belles phrases à noter mais une écriture un peu faible cependant. Une bonne
surprise de cette rentrée littéraire. À faire lire aux ados. (Angélique)
Virginie DESPENTES. Vernon Subutex. Grasset, 2015 – R DES
Premier tome d’une trilogie annoncée, Vernon Subutex narre les tribulations
du personnage homonyme. Ancien disquaire rock, Vernon a dû fermer
boutique ; expulsé de chez lui, sans argent, sans téléphone, sans famille,
Vernon squatte chez ses amis de la grande époque (sex, drugs et rock’n’roll).
C’est l’occasion pour Virginie Despentes de dresser une série de portraits
remarquablement incarnés, qui dresse en creux le visage d’une génération qui
voit son monde disparaître, celle qui a eu 20 ans dans les années 1990.
Des transsexuels, des bobos, des financiers, des anciennes stars du porno,
des beaux, des moches, des mamans, des couples, des ouvriers, des violents,
des clochards, des fachos, des drogués : l’humanité de ce début du siècle
fourmille devant nos yeux. Chacun a ses failles, ses heures de gloire, ses
espérances, son réseau, ses égoïsmes que l’auteur nous dévoile dans une
prose rageuse. Avec son style âpre, mais non dénué d’une certaine grâce,
Virginie Despentes orchestre parfaitement cette polyphonie. Elle ajoute une
once de roman policier à son récit pour le rendre plus efficace. En effet,
Vernon se retrouve en possession de cassettes vidéos qu’un chanteur célèbre
a enregistrées peu avant sa mort. Chacun cherche à s’accaparer ses bandes
mais Vernon, sans domicile, erre dans Paris : des quartiers huppés à
Belleville, d’un banc à une soirée mondaine et cocaïnée. Et personne ne le
retrouve… du moins dans le premier tome. Un grand roman ! (François)
Élise FONTENAILLE. Blue Book. Calmann-Lévy, 2015 – R FON
Il est une chose dont peu se souviennent, c'est que l'Allemagne fut une
puissance colonisatrice. De 1883 à 1916, elle occupa ce qu'on appelait alors
le Sud-Ouest africain, l'actuelle Namibie. Il en est une autre que beaucoup
ignorent, c'est que cette colonie fut le théâtre du premier génocide du XXe
siècle. Un génocide oublié, occulté même, car le premier rapport officiel - le
fameux Blue Book - sur le massacre des Hereros et des Namas fut soustrait à
la connaissance du public en 1926.
Élise Fontenaille-N'Diaye, alors qu'elle enquêtait sur son aïeul, le général
Mangin, a retrouvé ce rapport disparu. Dès lors, elle se devait de raconter. Si
ce livre vise à ranimer le souvenir de cette sombre page de l'histoire du
colonialisme, il ne se veut pas un ouvrage de spécialiste. L'auteur y donne son
point de vue d'écrivain, son point de vue personnel. Quelque part entre le
désert du Kalahari et la presqu'île de Shark Island, au large de Lüderitz, s'est
déroulée une macabre répétition générale, préfiguration des exterminations à
venir.
Un livre ô combien intéressant mais tellement affreux pour le contenu. Elise
Fontenaille N’Diaye nous avait habitué à des récits tirés de faits divers, elle
traite ici d’un fait historique. Nous sommes davantage dans un récit que dans
la fiction.
En peu de pages, Élise Fontenaille N’Diaye, dénonce, raconte, l’horreur
commise par le peuple allemand lors de la colonisation de l’Afrique du SudOuest à la fin du XIXe, avec brio. C’est concis, utile, choquant. Sachant que ce
fameux Blue Book est un livre qui a réellement existé, qui a dénoncé ce qui
s’est passé avant d’être retiré, détruit, « oublié », nous sommes encore plus
touchés par ce qui est raconté ici. Heureusement pour l’Histoire il reste un
exemplaire de ce Blue Book auquel l’auteure a eu accès. Merci à elle
d’évoquer ce dur sujet. Pour ma part je n’ai pu lire les extraits à la fin de
l’ouvrage. À ne pas mettre en toutes les mains. (Angélique)
Laurent GAUDÉ. Danser les ombres. Actes Sud, 2015 – R GAU
Laurent Gaudé a décidé de nous plonger dans le monde haïtien et le
tremblement de terre survenu il y a cinq ans. On retrouve ici un peu l'ambiance
de la Porte des Enfers. Une ville sombre, des habitants errant dans ses rues,
chutant et se relevant sans cesse, même avant la tragédie ainsi qu’une once
de surnaturel !
Il y a Lucine qui revient à Port au Prince après la mort de sa sœur cadette
pour annoncer au père de sa nièce ce décès et lui demander de l'argent. Elle
doit retourner dans leur ville natale pour aider sa sœur aînée à élever leurs
neveux et nièces. Il y a Saul, apprenti médecin, qui a fui la maison familiale. Il
est en réalité le fils illégitime du chef de famille et de la bonne, jamais vraiment
accepté par la femme légitime. Il y a ce lieu, cette maison, ancienne maison
close, où tous, âmes errantes, se retrouvent. Et il y a ce tremblement de terre,
ces 35 secondes qui changent leurs vies, les vies de milliers de personnes,
qui mettront du temps à s'en remettre...
Poignant, ce roman nous plonge vraiment au cœur de Port au Prince, ses
couleurs, ses odeurs, ses habitants, et cette tragédie ! (Anne-Laure)
Michel GUENASSIA. Trompe-la-mort. Albin Michel, 2015 – R GUE
Nous suivons l’histoire de Thomas Larch, né en Inde d’une mère indienne et
d’un père anglais. Il quitte l’Inde à 8 ans.
Adolescent, sa maison prend feu, sa mère décède dans l’accident, Tom en
veut à son père, absent. Sur un coup de tête, il s’engage dans l’armée, y fait
une brillante carrière parsemée de blessures au combat mais il s’en tire
toujours, y compris lorsque son hélicoptère s’écrase au sol. Il devient
« Trompe-la-mort » quand une journaliste tire de sa vie un documentaire
faisant de lui un « super-héros ».
Un bon roman d’aventures parfois à la limite de la crédibilité mais avec un
héros très attachant, qui commet des erreurs et s’en remet. Les meilleures
pages se situent dans cette Inde contemporaine, entre modernisme et
traditions. (Muriel)
Phil KLAY. Fin de mission. Gallmeister, 2015 – R KLA
Un soldat en Irak doit abattre des chiens qui se nourrissent de cadavres, puis,
quelques mois après, reprendre place sur son canapé dans une banlieue
résidentielle où femme et labrador l'attendent. Un marine affecté aux "Affaires
mortuaires" identifie, transporte et inhume des combattants indistinctement
Irakiens et Américains. Pendant ce temps, un jeune officier se voit assigner la
tâche absurde d'améliorer la vie des civils en leur apprenant à jouer au baseball. Dans Fin de mission, Phil Klay emmène le lecteur sur les lignes de front
de l'Irak et de l'Afghanistan. Il cherche à comprendre ce qui s'est passé là-bas,
mais aussi, surtout, comment vivent ceux qui sont rentrés. Entre brutalité et
foi, culpabilité et peur, impuissance et besoin de survie, les vétérans cherchent
un sens à donner au chaos auquel ils ont réchappé. Écrit avec un réalisme pur
et dur, ce livre fait de Phil Klay l'une des nouvelles voix les plus talentueuses
de sa génération. National Book Award 2014.
Phil Klay était lui-même vétéran des marines. Un récit très personnel, très
codifié, une écriture très brève et hachée, une ambiance militaire. Certaines
nouvelles sont plus difficiles à lire à cause d’un style trop oral, de la
multiplication des sigles. Un choix et une volonté de l’auteur très certainement.
Un sujet très intéressant, mais loin de nous d’une certaine façon. On sait
malheureusement que ça se passe ainsi, en effet certains soldats de retour au
pays ont parlé, les journalistes ont également dénoncé ce qu’il s’y passait.
Cependant vu de l’intérieur on ressent davantage le désarroi des soldats, les
non-dits, l’absurdité de certaines missions, comme celle d’apprendre aux
irakiens à jouer au base ball !
Peut être trop dur pour certains lecteurs, sujet sensible. (Angélique)
Justine LEVY. La Gaieté. Stock, 2015 – R LEV
On retrouve Louise, héroïne de Mauvaise fille et double de l’auteure. Dans son
précédent roman, elle rencontrait Pablo, après une rupture amoureuse très
difficile et qui la laissait amochée par la vie, une fois de plus. Et puis, ils
décidaient d'avoir un enfant. Pourtant, elle pensait ne pas pouvoir être mère.
Elle ne peut pas en être capable, elle a déjà du mal à s'occuper d'elle-même,
comment savoir être mère quand on a eu une mère comme la sienne?
Dans ce nouveau roman, Louise raconte qu’elle a toujours été triste. Enfant,
elle devait vivre entre sa mère, une droguée paumée et dépressive, et son
père, son héros, cumulant les belles-mères. Louise cherche donc à être la
mère parfaite, parée à toute éventualité (assez de couches, de
mercurochrome, de lait, de céréales, de médicaments...). Son père (BHL) est
ici toujours par monts et par vaux mais profondément lié à sa fille, rassurant,
héroïque. Un sujet qui parle à beaucoup de femmes (jeunes ou plus âgées,
mère ou célibataire) : la maternité. Un style à la limite de l’oralité, aucune
pensée de Louise ne nous échappe, nous la rendant encore plus proche et
touchante ! (Anne-Laure)
Eric METZGER. La Nuit des trente. Gallimard, 2015 – R MET
C'est l'histoire d'un garçon, Félix, qui décide de passer une nuit de
vagabondage dans Paris pour fêter ses trente ans. Un garçon qui découvre
soudain qu'il est devenu adulte sans s'en rendre compte. Avec la fin de la
vingtaine, c'est une forme de légèreté qui est sur le point de disparaître et
peut-être aussi quelque chose de plus essentiel. Mais quoi ? Pendant cette
nuit pleine d'incertitudes, de coïncidences et d'imprévus, le nouveau
trentenaire découvre qu'il ne mène pas forcément la vie qu'il espèrerait mener,
et sa rencontre avec Louise, une jolie jeune femme qui disparaît aussi vite
qu'elle est apparue, ne fait que raviver des souvenirs enfouis depuis des
années. Où le conduira ce vagabondage nocturne ? Parviendra-t-il à retrouver
Louise ? En tout cas, Félix n'aurait jamais imaginé que cette nuit l'emmènerait
aussi loin...
L’auteur est né en 1984, il a donc 30 ans comme le protagoniste. D’ailleurs
certains noms propres ne sont pas donnés. C’est osé si c’est une histoire
personnelle car l’auteur prend alors des risques et attise notre curiosité.
Au départ on est touché par ce personnage solitaire et mystérieux dont c’est
l’anniversaire. C’est le jour de ses trente ans, mais il ne dit rien à personne, il
ne le fête plus à cause du « fantôme », une personne qui le hante. Puis on le
découvre petit à petit, il est intelligent, malin, cynique parfois. Surtout il n’est
pas celui que l’on croit…
Ce récit ne se présente pas vraiment comme un premier roman, c’est plutôt un
récit personnel. Un épisode très court, avec beaucoup de dialogues.
Un bon moment de lecture, « une agréable nuit » que l’on passe avec le
narrateur. À découvrir. (Angélique)
Jean-Noël ORENGO. La Fleur du capital. Grasset, 2015 – R ORE
Bienvenue à Pattaya, en Thaïlande, capitale mondiale de la prostitution,
station balnéaire familiale la plus populaire d'Asie du Sud-Est et paradis des
transsexuelles, noctambules, bandits, expatriés venus des quatre coins du
globe. Une ville-univers, symbole de tous les paradoxes de notre époque, où
le sexe, la mort et l'argent cohabitent avec la spiritualité la plus intense : fleur
du Capital et clash des civilisations d'un genre particulier...
Ce roman baroque et polyphonique est conçu comme un gigantesque théâtre
où se déploie la danse frénétique de l'Occident décadent et de l'Orient
renaissant. Cinq voix nous guident à travers la multitude des rues et des bars,
à la rencontre de figures splendides et déchues : Marly, l'exilé en sursis ; Porn,
la ladyboy parfaite dont il est amoureux ; Kurtz, le guerrier de la passe ; Harun,
l'architecte obsédé ; et Scribe, l'auteur fétichiste de la cité.
Dans une langue puissamment inventive, tranchante et hypnotique, ce premier
roman nous emporte aux tréfonds de l'Extrême-Orient, au coeur du désir
humain.
Tout est dit dans le résumé. C’est très difficile de parler de ce livre. À la fois
très impressionnée par le monument qu’il est, la qualité littéraire de l’écriture,
la construction, les références et parallèles littéraires, et le projet qu’à eu
l’auteur en décidant d’écrire ce livre. En même temps le thème central est la
prostitution thaïlandaise, avec précisément la ville de Pattaya qui est le
« spot » de la prostitution en Thaïlande. Donc à qui s’adresse le livre ? Il faut
non seulement être intéressé par le sujet, mais tenir bon car c’est un livre qui
tombe des mains tant il est imposant et lourd, tant par le récit dense et détaillé.
Un roman qui laisse perplexe, un auteur qui mérite d’être remarqué pour le
travail qu’il a réalisé. (Angélique)
Romain PUERTOLAS. La Petite Fille qui avait avalé un nuage gros comme
la Tour Eiffel. Le Dilettante, 2015 – R PUE
L’année dernière nous avions beaucoup entendu parler de ce fakir, coincé
dans une armoire Ikéa, qui sillonnait l’Europe.
Cette fois-ci, Romain Puertolas nous amène à la suite d’une factrice,
Providence, mère d’adoption d’une fillette marocaine, Zahera, atteinte de
mucoviscidose. Elle doit la ramener en France pour une opération. Le jour du
départ, le nuage islandais fait des siennes et Providence ne peut rejoindre sa
fille. Elle décide donc d’apprendre à voler et rencontre des moines
bouddhistes, un chaman, un rabatteur s’exprimant comme un pirate…
Lorsqu’on lit un roman de Puertolas, on ne cherche pas d’histoires
vraisemblables, rien n’est crédible, on le sait et c’est cela que l’on apprécie.
Aussi, quand sur les derniers chapitres de ce livre, la réalité reprend le
dessus, cela plombe le texte et en retire l’intérêt que l’on pouvait y trouver…
(Anne-Laure)
Leonor de RECONDO. Amours. Sabine Wespieser, 2015 – R REC
1908, dans une demeure bourgeoise du Cher. Madame, Victoire, est mariée à
Anselme, mariage d’argent arrangé par sa mère. Il est très occupé par son
travail, et considère l’acte sexuel comme un devoir hygiénique donc il visite
régulièrement la jeune bonne, Céleste, qui subit ses assauts sans se plaindre.
Victoire le repousse autant qu’elle peut et 5 ans après le mariage n’a toujours
pas donné d’héritier à la famille. Céleste, enceinte, réussit à cacher sa
grossesse jusqu’au 6e mois.
Victoire lui propose alors de récupérer l’enfant et de lui donner son nom.
Leonor de Recondo s’attache dans ce nouveau roman à la peinture du corps,
violenté pour Céleste, haï par Victoire qui ne se regarde jamais dans un miroir,
meurtri chez Pierre qui a choisi de se taire pour toujours.
Peinture d’une société à un moment donné, le début du XXe siècle, et de la
condition féminine :
Les hommes sont meurtris par la défaite de la dernière guerre, 1870, qui a fait
139 000 morts et 450 000 blessés ou malades. Les bourgeoises subissent le
joug des parents ou maris mais amorcent leur libération par le vêtement
féminin (Victoire supprime son corset) et surtout elles prennent les décisions.
Comme Céleste, l’employée de maison, soumise au bon vouloir de ses
maîtres mais qui prend en main sa destinée.
Victoire et Céleste, unies par cette maternité, découvrent l’amour qu’elles
ressentent l’une pour l’autre, et les frontières sont abolies, les conventions
sociales disparaissent mais nous ne sommes qu’en 1908, quel avenir pour cet
amour interdit ?
Un roman avec un scénario et des personnages déjà vus mais une qualité
d’écriture en finesse et en émotion. (Muriel)
Mélanie SADLER. Comment les grands de ce monde se promènent en
bateau. Flammarion, 2015 – R SAD
J.L. Borges (Javier Leonardo Borges, et non pas son célèbre homonyme)
prépare une grande conférence devant ses éminents collègues. Il veut faire
impression et se lance dans des recherches insensées ! Au cours de l’une
d’elles, il découvre qu’un héritier de l’Empire aztèque ne serait pas mort
comme l’Histoire l’annonçait. En effet, une trace d’une déesse aztèque est
retrouvée en Turquie. Ni une ni deux, il dépêche son collègue turc sur l’affaire.
Entre enquête nocturne dans des mosquées, déchiffrage de parchemins, de
Buenos-Aires à Topkapi, ce récit d’aventures aurait mérité d’être un plus
fouillé notamment dans sa première partie. On se perd vite dans l’arbre
généalogique de l’empereur aztèque ! (Anne-Laure)
Colombe SCHNECK. Dix-sept ans. Grasset, 2015 – R SCH
En 1984, à 17 ans, Colombe Schneck s’apprête à passer son baccalauréat.
Fille de médecins, elle est assez libre de ses faits et gestes et se croit à l’abri
de tout, protégée…
Et pourtant, elle tombe enceinte, à quelques semaines de l’examen. Elle sait
qu’elle n’a pas envie de garder le bébé, elle est trop jeune, elle a sa vie à
construire et surtout elle ne veut pas rester avec son petit copain.
C’est le récit de cette période, de cette solitude, de son refus de se confier à
ses amies. Elle a décidé seulement maintenant d’en parler, vingt ans après…
Texte très court qui soulève un sujet dont les jeunes filles pourraient avoir
honte de parler et qui pourtant, est très important pour elles. (Anne-Laure)
Aki SHIMAZAKI. Azami. Actes Sud, 2015 – R SHI
Mitsuo et Atsuko ont la trentaine, ne sont mariés que depuis huit ans,
s'entendent très bien, et pourtant ils n'ont pas fait l'amour depuis la naissance
de leur fils de trois ans. Mitsuo compense en fréquentant des « pink salons ».
Atsuko fait avec (ou sans), et met en œuvre son rêve : créer sa propre
exploitation agricole de production de légumes bio. Des retrouvailles fortuites
avec une ancienne camarade d'école primaire - son premier amour, Azami (la
fleur de charbon) - créent chez le mari la tentation de l'adultère…
Dans cet élégant roman écrit en français et au charme suranné, il ne se passe
pas grand-chose : Aki Shimazaki nous montre avec pudeur et minutie, les
liens qui se tissent entre ses personnages, les failles qui se creusent entre
eux. Ce roman, presque une comptine, il en a le mystère, la force évocatrice
et la concision, nous parle du temps qui passe, des regrets amoureux, des
espoirs déçus, des rêves que nous gardons au creux de notre paume et que
nous ne verrons jamais se réaliser. (François)
Valérie TONG CUONG. Pardonnable, impardonnable. Lattès, 2015 – R TON
Un après-midi d’été, Milo, 12 ans, et sa tante, Marguerite, font une course de
vélo sur une route de campagne. La vitesse est grisante, soudain, c’est la
chute. Milo est hospitalisé, dans le coma. Réunie autour de lui, sa famille se
déchire. Ses parents, sa grand-mère, sa tante, tous se pensent innocents,
accusent les autres.
Entre secrets de famille, adultère, fausse couche, mensonge, divorce et
regrets, c’est toute l’histoire d’une famille, des non-dits de plus de 30 ans, qui
refont surface, autour de ce petit garçon, qui se bat pour sa vie.
Peut-on avouer ses fautes ? Saurons-nous pardonner ? (Anne-Laure)
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Là où les rivières se séparent
Un pays pour mourir
Guerre d'hiver (La)
Berezina
Hôtel international
Genoux écorchés (Les)
Un an après
Homme qui avait deux yeux (L')
Arpenteurs (Les)
Robert Laffont
Gallmeister
Seuil
Albin Michel
Guerin
Intervalles
Christophe Lucquin éditeur
Gallimard
Zoe
Gallmeister
Vos notes…
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