Chapitre 5.2 – La nature corpusculaire de la lumière La quantité de mouvement du photon En 1905, Albert Einstein a réactualisé la notion corpusculaire de la lumière en introduisant la notion de photon comme étant la particule transportant l’énergie du champ électromagnétique. Puisque le photon est une particule, on peut lui attribuer une quantité de mouvement même si le photon ne possède pas de masse. Représentation artistique d’un photon. Avec l’équivalence masse-énergie, on peut maintenant définir la quantité de mouvement p comme étant la quantité d’énergie E transportée dans un mouvement ce qui peut être appliquée à un photon grâce à l’équation suivante : p= où Eγ c p : Quantité de mouvement du photon ( kg ⋅ m/s ) Eγ : Énergie électromagnétique transportée par le photon (J) c : Vitesse de la lumière ( c = 3 × 10 8 m/s ) Preuve : À partir de l’expression relativiste de l’énergie totale d’une particule, évaluons la relation existant entre l’énergie transportée par un photon et sa quantité de mouvement sachant que le photon est une particule sans masse : E 2 = p 2c 2 + m 2c 4 ⇒ E 2 = p 2c2 (Masse du photon nulle, m = 0 ) ⇒ E = ± pc (Appliquer une racine carrée de chaque côté) ⇒ p= E c (Isoler p) La voile photonique La découverte de la quantité de mouvement du photon a permis à plusieurs scientifiques d’imaginer une nouvelle façon de voyager dans l’espace : la voile photonique. Basée sur la navigation maritime1, les collisions entre les photons et une voile permettraient par conservation de quantité de mouvement de propulser un vaisseau spatial. Les étoiles seraient alors la source du vent solaire. 1 Voile photonique. Un bateau à voile est propulsé par les collisions des moléculaires d’air véhiculées par le vent. Référence : Marc Séguin, Physique XXI Volume C Note de cours rédigée par : Simon Vézina Page 1 Longueur d’onde et quantité de mouvement La longueur d’onde λ et la quantité de mouvement p d’un photon peuvent être reliées ensemble grâce à la constante de Planck h de la façon suivante : h λ= p où v v v = ci λ : Longueur d’onde du photon (m) p : Quantité de mouvement du photon ( kg ⋅ m/s ) h : Constante de Planck ( 6,63 × 10 −34 J ⋅ s ) λR λB v pR v pB Preuve : À partir de la quantité de mouvement d’un photon, introduisons la définition du quanta d’énergie du photon : p = E/c ⇒ p = (hf ) / c (Remplacer l’énergie du photon, E = hf ) ⇒ c/ f = h/ p ⇒ λ = h/ p (Isoler c / f) ■ (Remplacer λ = c / f ) La diffusion La diffusion (scattering) est la déviation que subit une radiation (lumière, ondes, particules) initialement rectiligne vers une ou plusieurs directions. Diffusion réflexive : Diffusion qui respecte la loi de la réflexion sans échange d’énergie. Diffraction : Diffusion dans plusieurs directions sans échange d’énergie dont la distribution angulaire dépend de la géométrie de la matière causant la diffusion. Interaction : Diffusion causée par une interaction fondamentale (électromagnétique, nucléaire, faible) où il y a échange d’énergie entre la radiation et le milieu en interaction. Exemple : Diffusion d’un laser sur un cristal de carbone Le premier pic correspond à la diffraction de la radiation d’origine. Le deuxième pic correspond à l’interaction de la radiation d’origine avec des électrons faiblement liés des atomes portant le nom de « diffusion Compton ». Référence : Marc Séguin, Physique XXI Volume C Page 2 Note de cours rédigée par : Simon Vézina L’effet Compton Le comportement corpusculaire du photon et l’hypothèse de la quantification de l’énergie du photon par la longueur d’onde furent vérifiés expérimentalement en 1923 par Arthur Holly Compton pour l’observation de la diffusion du photon sur un électron. Cette expérience appelée « effet Compton » met en lien le transfert d’énergie d’un photon lorsqu’il entre en collision avec un électron libre (ou très faiblement lié à un atome). La perte d’énergie se résulte en une augmentation de la longueur d’onde du photon (diminution de la fréquence). Compton fut récompensé par le prix Nobel de physique en 1927 pour cette découverte. A.H. Compton (1892-1962) L’expérience démontre qu’il y aura déviation de la trajectoire d’un photon d’un angle θ en fonction de la variation de la longueur d’onde λ entre le photon avant et après la collision : λ h (1 − cos(θ )) λ f − λi = me c où c λi λi : Longueur d’onde initiale du photon (m) θ λ f : Longueur d’onde finale du photon (m) c θ : Angle de déviation du photon initial. h : Constante de Planck ( 6,63 × 10 −34 J ⋅ s ) v Ce schéma est exagéré, car la variation de longueur d’onde λf – λi est très peu prononcée pour la lumière visible, car h/mec = 2,426 x 10-12 m. L’effet Compton devient plus remarquable chez les photons à haute fréquence comme le rayonnement gamma. me : Masse de l’électron ( 9,11 × 10 −31 kg ) c : Vitesse de la lumière ( c = 3 × 10 8 m/s ) Preuve : Dans le référentiel d’un laboratoire, effectuons une collision entre un photon et un électron immobile. Lors de cette collision, il y a conservation de la quantité de mouvement et conservation de l’énergie. Puisque l’électron acquière une grande vitesse, l’énergie relativiste de l’électron est nécessaire dans la démonstration : Avant la collision : Après la collision : λ2 y λ1 v p2 x θ φ v p1 v pe Référence : Marc Séguin, Physique XXI Volume C Note de cours rédigée par : Simon Vézina f Page 3 Appliquons la conservation de la quantité de mouvement selon l’axe x : ∑p xf = ∑ pxi (Conservation de p x ) ⇒ p 2 cos(θ ) + p e cos(φ ) = p1 (Décomposition selon l’axe x) ⇒ p e cos(φ ) = p1 − p 2 cos(θ ) (Isoler p e cos(φ ) ) ⇒ pe cos 2 (φ ) = p1 − 2 p1 p 2 cos(θ ) + p 2 cos 2 (θ ) 2 2 2 (1) (Mettre l’équation au carré) Appliquons la conservation de la quantité de mouvement selon l’axe y : ∑p yf = ∑ pyi ⇒ p 2 sin (θ ) + p e sin (φ ) = 0 (Conservation de p y ) ⇒ p e sin (φ ) = − p 2 sin (θ ) (Isoler p e sin (φ ) ) ⇒ pe sin 2 (φ ) = p 2 sin 2 (θ ) 2 2 (Mettre l’équation au carré) (2) 2 2 Effectuons l’addition de l’équation (1) et (2) et factorisons le terme p e et p 2 . Par la suite, appliquons l’identité trigonométrique cos 2 α + sin 2 α = 1 : [p 2 e 2 ] [ ] [ 2 2 2 ] [ ] 2 cos 2 (φ ) + p e sin 2 (φ ) = p1 − 2 p1 p 2 cos(θ ) + p 2 cos 2 (θ ) + p 2 sin 2 (θ ) ( ) 2 2 ( ) ⇒ pe cos 2 (φ ) + sin 2 (φ ) = p1 − 2 p1 p 2 cos(θ ) + p 2 cos 2 (θ ) + sin 2 (θ ) ⇒ pe = p1 − 2 p1 p 2 cos(θ ) + p 2 2 2 2 ((1) + (2)) (Factoriser ) (Identité) (3) Appliquons maintenant la conservation de l’énergie : ∑E f = ∑Ei ⇒ Eγ 2 + E e f = Eγ 1 + E e i (Énergie du photon et de l’électron) ⇒ p 2 c + E e f = p1c + E e i (Énergie du photon : Eγ = pc ) ⇒ p2 c + p e f c 2 + me c 4 = p1c + ⇒ p2 c + p e c 2 + me c 4 = p1c + me c 2 2 2 2 2 2 p e i c 2 + me c 4 (Énergie rel. : E 2 = p 2 c 2 + m 2 c 4 ) 2 ( pe i = 0 , pe f = pe ) 2 2 (Isoler la racine) 2 2 (Factoriser c) ⇒ p e c 2 + me c 4 = p1c − p 2 c + me c 2 ⇒ p e c 2 + me c 4 = c( p1 − p 2 ) + me c 2 2 2 2 2 ( ) 2 ⇒ p e c 2 + me c 4 = c( p1 − p 2 ) + me c 2 ⇒ pe c 2 + me c 4 = c 2 ( p1 − p 2 ) + 2me c 3 ( p1 − p 2 ) + me c 4 ⇒ pe = ( p1 − p 2 ) + 2me c( p1 − p 2 ) 2 2 2 (Mettre au carré de chaque côté) 2 (4) Référence : Marc Séguin, Physique XXI Volume C Note de cours rédigée par : Simon Vézina (Développer le terme au carré) 2 (Simplifier me c 4 et diviser par c 2 ) Page 4 Effectuons la soustraction entre l’équation (3) et (4) afin d’obtenir la relation désirée : [p ] − [ p ] = [ p 2 2 e 1 e 2 2 ] [ ] 2 − 2 p1 p 2 cos(θ ) + p 2 − ( p1 − p 2 ) + 2me c( p1 − p 2 ) 2 2 2 2 ((3) - (4)) 2 ⇒ 0 = p1 − 2 p1 p 2 cos(θ ) + p 2 − ( p1 − p 2 ) − 2me c( p1 − p 2 ) ⇒ 0 = p1 − 2 p1 p 2 cos(θ ) + p 2 − p1 − 2 p1 p 2 + p 2 − 2me c( p1 − p 2 ) (Dév. le carré) ⇒ 0 = −2 p1 p 2 cos(θ ) + 2 p1 p 2 − 2me c( p1 − p 2 ) (Simplifier) ⇒ 0 = 2 p1 p 2 (1 − cos(θ )) − 2me c( p1 − p 2 ) (Factoriser 2 p1 p2 ) ⇒ 2me c( p1 − p 2 ) = 2 p1 p 2 (1 − cos(θ )) (Changer l’égalité) ⇒ p1 − p 2 = p1 p 2 (1 − cos(θ )) me c (Diviser par 2me c ) ⇒ h = (h / λ1 )(h / λ2 ) (1 − cos(θ )) (Remplacer p = = h 1 (1 − cos(θ )) me c λ1λ 2 (Simplifier h) ⇒ λ1 1 λ1 − − h λ2 1 λ2 ( 2 2 ) me c h (1 − cos(θ )) me c ⇒ λ 2 − λ1 = ⇒ λ f − λi = h (1 − cos(θ )) me c (Simplifier) h λ ) (Multiplier par λ1λ2 ) (Remplacer λ f = λ 2 et λ i = λ1 ) ■ Situation 1: L’effet Compton. Un photon dont la longueur d’onde est de 7,1 × 10-11 m entre en collision avec un électron immobile et dévie de 70o par rapport à la trajectoire qu’il aurait suivie s’il n’avait pas été dévié. On désire déterminer (a) la longueur d’onde du photon après avoir été dévié, (b) le module de la vitesse acquise par l’électron et (c) son orientation. Évaluons la longueur d’onde du photon diffusé par l’effet de Compton : λ f − λi = h (1 − cos(θ )) me c 6,63 × 10 −34 (1 − cos(70°)) 9,11 × 10 −31 3 × 10 8 ⇒ λ f − (7,1 × 10 −11 ) = ⇒ λ f = 7,2596 × 10 −11 m Référence : Marc Séguin, Physique XXI Volume C Note de cours rédigée par : Simon Vézina ( )( ) (a) Page 5 Évaluons l’énergie du photon avant et après la diffusion afin d’évaluer sa perte en énergie. Cette variation sera égale à l’énergie cinétique de l’électron en considérant qu’il était immobile avant la diffusion : K = − ∆Eγ ⇒ K = −(Eγ f − Eγ i ) ( ∆E = E f − E i ⇒ K = Eγ i − E γ (Distribuer négatif) ⇒ K = hf i − hf f ⇒ c c K = h − h λi λ f ⇒ 1 1 K = hc − λ λ f i ⇒ 1 1 K = 6,63 × 10 −34 3 × 10 8 − −11 7,2596 × 10 −11 7,1 × 10 ⇒ K = 6,1588 × 10 −17 J f ( ( Eγ = hf ) ( λ = c / f donc f = c / λ ) (Factoriser hc) )( )( ) ( ) (Remplacer) (Évaluer K) Supposons que notre électron est non-relativiste, nous pouvons évaluer sa vitesse à l’aide de l’expression classique de l’énergie cinétique : K= 1 2 mv 2 ⇒ (6,1588 × 10 ) = 12 (9,11× 10 )v ⇒ v = 1,1628 × 10 7 m/s ⇒ v = 0,03876 c −17 − 31 2 (Remplacer) (Évaluer v) (v avec c = 3 × 10 8 m/s ) (b) Puisque la vitesse de l’électron est une petite fraction de la vitesse de la lumière, on peut confirmer que l’électron est non-relativiste. Appliquons la conservation de la quantité de mouvement selon l’axe y afin d’évaluer l’orientation de la vitesse de l’électron après la diffusion du photon : ∑p yf = ∑ pyi ⇒ pγ y f + p e y f = p γ y i + p e y i ⇒ h sin θ + (− me v sin φ ) = (0 ) + (0 ) λ f (6,63 × 10 ) −34 ⇒ ⇒ (7,2596 × 10 ) −11 sin (φ ) = 0,8101 ( ( p e = mve , classique) )( ) sin (70°) − 9,11 × 10 −31 1,1628 × 10 7 sin φ = (0 ) ⇒ φ = 54,106° Référence : Marc Séguin, Physique XXI Volume C Note de cours rédigée par : Simon Vézina (Remplacer) (Évaluer φ ) Page 6 Expérience de Pound-Rebka En 1960, Robert Pound et Glen Rebka réalisent une expérience pour mesure le changement de fréquence d’une source de lumière à 633 Hz en fonction d’un déplacement verticale dans un champ gravitationnel constant sur une distance de 22 m. On peut interpréter l’expérience comme étant la chute d’un photon dans la gravité. Le « changement d’énergie gravitationnelle » Ug même sans masse est convertie en énergie électromagnétique hf puisque le photon ne peut pas changer son énergie cinétique K en raison de sa vitesse constante et qu’il n’a pas d’inertie (pas de masse). L’équivalence masse-énergie d’Albert Einstein est nécessaire pour donner un sens à l’énergie potentielle gravitationnelle du photon : g f ' = 1 + 2 c Changement de la fréquence f de la lumière en fonction de sa position dans le champ gravitationnel terrestre. Une chute de hauteur engendre une augmentation de la fréquence. y f (y = 0 à l’endroit où f ’ est mesurée) où f ' : Fréquence de la lumière mesurée à la coordonnée y = 0 après le déplacement vertical (Hz). f : Fréquence de la lumière émise initialement à la coordonnée y (Hz). y : Hauteur initiale de la lumière (m). (vers le haut : y < 0 , vers le bas : y > 0 ) g : Champ gravitationnel constant (N/kg). c : Vitesse de la lumière, c = 3 × 10 8 m/s . Preuve : Évaluons la variation de l’énergie potentielle gravitationnelle ∆U g que l’on pourrait attribuer à un mouvement vertical ∆y d’un photon dans un champ gravitationnel constant Ce changement de hauteur pourra modifier la fréquence f du photon par conservation d’énergie. Nous utiliserons l’équivalence masse-énergie E = mc 2 pour réaliser la preuve : E f = Ei ⇒ Eγ f + U g f = Eγ i + U g i ⇒ (hf ) + (m ⇒ hf f = hf i + mi g ( y ) (Posons y f = 0 , y i = y ) ⇒ Eγ i hf f = hf i + 2 c g y ( E = mc 2 ⇒ m = ⇒ hf f = hf i + gy (Remplacer Eγ i = hf i ) f f g y f ) = (hf i ) + (mi g y i ) ( Eγ = hf , U g = mgy ) (hf i ) c2 g ■ f f = 1 + 2 y f i c Référence : Marc Séguin, Physique XXI Volume C Note de cours rédigée par : Simon Vézina ⇒ ( E = Eγ + U g ) E ) c2 (Simplifier h, factoriser f i ) Page 7 Le décalage vers le rouge gravitationnel Le décalage vers le rouge gravitationnel (gravitational redshift) est un effet de la relativité générale sur l’évolution de la longueur d’onde de la lumière lorsque celle-ci voyage dans un espace où la gravité n’est pas constante. La lumière quittant une forte gravité doit augmenter sont énergie potentielle gravitationnelle U g ce qui réduit sont énergie électromagnétique hf par conservation de l’énergie résultant en une diminution de sa fréquence : GM f r = 1 − 2 f b Rc où Émission de lumière bleu et décalage vers le rouge de celle-ci en raison d’un déplacement dans un champ gravitationnel non constant. http://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9calage_ d%27Einstein f r : Fréquence de la lumière mesurée à une distance infinie de l’objet massif (Hz). f b : Fréquence de la lumière émise à une distance R de l’objet massif (Hz). R : Distance entre le site d’émission de la lumière et le centre de l’objet massif (m) M : Masse de l’objet générant le champ gravitationnel (kg). G : Constante de la gravitation universelle, G = 6,67 × 10 −11 N ⋅ m 2 kg 2 . c : Vitesse de la lumière, c = 3 × 10 8 m/s . Preuve : Appliquons la démonstration précédente en utilisant l’expression générale de l’énergie potentielle gravitationnelle étant GmM Ug = − . r À partir de la conservation de l’énergie, nous avons : E f = Ei ⇒ Eγ f + U g f = Eγ i + U g i ⇒ (hf ) + − G m ⇒ ⇒ ⇒ ⇒ f M = (hf i ) + − G mi M rf ri hf f − G ( E = Eγ + U g ) mf M hf f = hf i (∞ ) f = hf i + −G (E −G γi mi M (R ) ) / c2 M R (hf )M hf f = hf i − G 2i c R GM ■ f f = 1 − 2 f i c R Référence : Marc Séguin, Physique XXI Volume C Note de cours rédigée par : Simon Vézina ( Eγ = hf , U g = −G mM ) r (Posons r f = ∞ , ri = R ) ( E = mc 2 ⇒ m = E ) c2 (Remplacer Eγ i = hf i ) (Simplifier h, factoriser f i ) Page 8
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